The First Flight [FR]

Chapitre 13 ❀ Se mouiller

Mes yeux se sont écarquillés et j'ai regardé Colin, qui commençait à ressembler à un daim piégé dans les phares d'une voiture. Il a secoué la tête vivement, mais je savais que ça ne passerait pas avec Lana.

« Je – J'ai pas vraiment- » ai-je tenté, mais elle n'a rien voulu savoir.

« Je serai entrée et sortie en une seconde. »

C'est là que j'ai compris qu'elle allait ouvrir la porte d'une seconde à l'autre et voir Colin. Il était inenvisageable qu'elle ne pose pas de question, et nous aurions été incapables d'y répondre.

Il ne fallait pas que ça arrive.

« Entre là-dedans, » ai-je dit à Colin, qui me regardait comme si j'étais cinglée.

« Jen, je ne vais pas entrer sous la douche ! » a-t-il protesté.

« Oh si. » J'ai entrepris de le pousser vers l'autre bout de la salle de bain, jusqu'à ce que la poignée de la porte s'abaisse et qu'il réalise que c'était notre seule option.

Il s'est glissé à l'intérieur, aussitôt trempé par le jet d'eau, et je l'ai suivi pile au moment où Lana ouvrait la porte de la salle de bain. On était tous les deux trempés, mais c'était le cadet de mes soucis.

Je l'ai entendue farfouiller dans les placards sous le lavabo. J'avais l'habitude de tout garder dans ma valise, même si étions là pour deux semaines, ce qui fait que les affaires de Lana occupaient quasiment toute la salle de bain. Je me suis pressée contre la paroi de la douche.

Les cheveux de Colin étaient mouillés, de même que son sweat et son short. J'ai écarté mes cheveux dégoulinants de mon visage, mais je n'ai pas pu m'empêcher de le regarder à travers le rideau de pluie.

Il me regardait lui aussi.

« Ahh, je l'ai, » a dit Lana. Elle a émis un petit rire satisfait. « Tu as l'intention de nous rejoindre quand tu auras fini ? »

Son corps me disait qu'il était toujours en colère, mais ses yeux racontaient une toute autre histoire. Je savais que je mettais trop de temps à répondre.

« Sûrement, » ai-je dit.

« C'est encore ta migraine ? » a-t-elle demandé.

Les battements de mon cœur se sont accélérés quand Colin a hoché la tête, très légèrement. « Oui, » ai-je répondu, et je n'arrivais même pas à me sentir coupable de ce mensonge.

Tout ce que je ressentais c'était de la chaleur. Cette fichue eau était vraiment trop chaude. Et pourquoi n'avais-je pas remarqué plus tôt que la douche avait un mode pluie ?

« Peut-être...peut-être que tu devrais juste te reposer un peu alors, » a suggéré Lana. « On pourra toujours manger le gâteau demain. Ne t'en fais pas pour ça. »

« Oui, peut-être, » ai-je dit, mais seulement parce que je ne pouvais plus m'arrêter de le dévisager. Je n'avais jamais regardé quelqu'un aussi intensément.

Mon propre short était absolument trempé. L'eau ruisselait sur mon visage, et sur le sien aussi. On aurait dit qu'il y avait beaucoup plus d'eau que prévu.

« Je vais prévenir les autres, » a dit Lana. « Si tu décides de ressortir, à toute à l'heure. Et sinon, j'espère que tu as passé une bonne journée aujourd'hui. »

« Merci, Lana. » J'ai enfin pu regarder ailleurs, mais j'ai encore volé une seconde avant de contempler le sol de la douche. « Ça a été un super anniversaire. »

Du coin de l'œil, je l'ai vu appuyer sa tête sur le carrelage contre le mur. Lana a encore traîné dans la salle de bain pendant une seconde puis elle a ouvert la porte. Je pensais qu'on se serait mis en mouvement dès qu'elle serait partie, mais aucun de nous n'a bougé.

Les larmes qui me brûlaient déjà les yeux ont fini par couler. J'ai laissé échapper un unique sanglot et j'ai caché mon visage dans mes mains.

« Jen. »

Des pas mouillés sur le sol carrelé de la douche. Plus il était près de moi, moins je pouvais me contenir. Tout le stress, toutes ces heures de solitude à Vancouver et ces relations brisées se déversaient sur moi et se mélangeaient à nos pieds, avant de disparaitre dans le siphon.

« Jen, regarde-moi. Ouvre les yeux. Regarde-moi. »

Je n'ai pas ouvert les yeux. Au lieu de ça, j'ai pressé mes mains plus fort contre mon visage pour cacher les larmes qui coulaient à flot.

« Jennifer. Regarde-moi. »

Comme je ne réagissais toujours pas, il a doucement levé ses mains et les a posées sur les miennes. C'est alors que j'ai réalisé que j'étais glacée, et son contact me brûlait la peau.

Il a abaissé mes mains. Je l'ai enfin regardé, les larmes aux yeux.

« Qu'est-ce que tu vois ? » a-t-il demandé, ce qui aurait pu être une question bizarre si je n'avais pas su exactement quoi répondre.

« Quelque chose qui ne sera jamais à moi. »

L'étincelle s'est éteinte dans ses yeux et il m'a regardée comme si je venais de le frapper en plein visage. D'une certaine façon, ça m'a fait reprendre mes esprits.

Il fallait qu'il sorte de là, avant que ça ne tourne mal.

« Colin, je t'en supplie. S'il te plaît, va-t'en. »

« C'est ce que tu veux ? »

« Oui. »

Il n'a pas bougé. Au lieu de ça, il s'est encore approché, et il a reposé la question. « Est-ce que c'est vraiment ce que tu veux ? »

« Oui. »

S'il ne s'en va pas, c'est moi qui m'en irais.

« Ce n'est pas vrai et tu le sais. Qu'est-ce que tu veux ? »

Le manque de distance entre nous déclenchait un feu dans mon abdomen, mais c'est sorti comme un cri de rage quand je l'ai regardé dans les yeux.

« JE VEUX QUE TU T'EN AILLES !! » Je me suis tournée vers lui furieusement et j'ai commencé à le repousser. « VA-T'EN, VA-T'EN, VA-T'- »

Ses lèvres ont coupé la suite de mes mots.