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Savez vous ce qu'est le bourrage de crâne ? C'est ce qui arrive quand on répète information tellement de fois que l'on finit par l'assimiler.

C'est ce qui m'est arrivé. On m'a répéter tellement de fois que Orlan avait essayé de se suicider que j'y croyais entièrement. En arrivant dans sa chambre j'étais définitivement dans un état de colère.

J'avais l'impression de m'être fait trahis. Certes je ne l'aidais pas beaucoup au collège, mais je restais une bonne amie non ? Juste je ne comprenais pas pourquoi il avait décidé ça. J'avais presque envie de pleurer de colère.

- Orlan !

Ne pouvant me contenir, et sans même lui lancer un regard, je commençais à lui crier dessus. Violement. Si violement que je savais au fond de moi que je le regretterai. Ma supposition était juste : car au fil de mon récit Orlan devenait de plus en plus immobile. Comme figé dans le temps. Et moi je ne pouvais plus m'empêcher de débiter des mots sur le suicide que j'avais entendue par mes parents ou dans des cours préventifs en EMC.

Il ne bougeait pas du tout. Je me mis à le regarder, il avait quelques bandages autour du poignet mais aussi, et surtout, autour de la taille. S'il semblait souffrir ? Pas en apparence en tout cas. Mais il était vraiment blessé.

Tout en continuant de parler pour rien dire, plus doucement cette fois, je vis son visage se décomposer peu à peu. Finalement je décidai que lui poser une question serait plus judicieux.

- pourquoi tu as essayé de te suicider ?

Resté silencieux depuis tout à l'heure, il sembla s'extirper d'un mauvais rêve. Il entrouvrit la bouche mais la ferma aussitôt.

- Orlan, réponds. Il s'est passé quelque chose ?! Tu aurais du m'appeler !

Il ne parlait toujours pas.

- je sais que je ne suis pas très utile au collège mais...

- est ce que je t'ai dis que je voulais me suicider ?

Ma voix se perdit. Je le fixais sans comprendre ce qu'il cherchait à m'expliquer.

- tu me prend vraiment pour un imbécile.

Sa voix était froide, j'étais choquée car je cru déceler de la colère dedans. Oui Orlan était triste et en colère.

- jamais je ne me suiciderai. Quoi qu'il arrive.

Toujours aussi immobile qu'une statue, je sentais qu'il reprenait l'avantage sur moi et que bientôt je ne saurais quoi faire.

- mais ils ont dit que tu avais essayé de mourir...

- non.

Ma colere retomba d'un coup. Il était sincère. Je le sentais.

- je n'ai pas pu voir la voiture. Elle m'a renversé. Ce n'était pas volontaire.

Bouche-bée je repensais à tout les médecins et infirmières. Ils m'avaient tous mentis.

- tu me crois ?

Je voulais lui répondre. Mais je n'y arrivais pas. Aucune son ne sortait de ma gorge et les lèvres étaient scellées ensembles. Il se mit à trembler violement montrant enfin ses faiblesses. Sa voix prit une tournure bizarre, comme boulversée.

- je pensais que tu me croirais toi.

- je te crois, articulai-je avec difficulté.

Mais au lieu d'arranger son état, il n'en sortit que plus triste.

- je ne comprends pas pourquoi ils disent que tu as essayé de te suicider.

- parce que... (Sa voix tremblait de plus en plus) ils n'attendent que ça. Comme beaucoup de monde.

- quoi ?! Arrêtes de dire ça tout de suite ! Personne ne veut ta mort !

- tu demanderas cela a Zéphyr, à Meredith ou à n'importe quel élève du collège alors. Tu peux aussi demander aux profs ou aux médecins. Même à la tante. S'ils sont sincères ils te répondrons tous qu'ils ont hâte que je meurs !

- pourquoi ?, Demandai-je à mi voix.

- parce que... Je suis un aveugle orphelin. Je suis un boulet inutile je ne sers à rien.

- c'est pas vrai.

- tu es la seule à dire le contraire.

Je le regardai.

- ils ne peuvent pas vouloir ta mort juste pour ça !

Soudainement Orlan fondit en larmes. Mon cœur se déchira en même temps.

- et si j'ai poussé mes parents à la mort ils ne peuvent toujours pas vouloir ma mort ?

Le silence fut pesant le temps que je digère l'information. C'était la première fois que je me rendais compte qu'Orlan souffrait vraiment beaucoup trop. Tout le temps.

- pour eux je resterai toujours le petit garçon de 10 ans qui à inciter des parents à se suicider et qui est devenu "volontairement aveugle".

Doucement je m'assis sur le lit d'Orlan. Malgré les sentiments qui se mêlaient en moi, je ne pouvais pas craquer devant Orlan. Pas maintenant.

- explique moi tout, dis-je le plus gentiment possible.

Orlan prit une grande inspiration. Je lui essuyait moi même quelques larmes sur ses joues puis je me collai à lui en faisant attention à ne pas lui faire mal.

- d'accord.

AveugleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant