C'était humainement possible de répondre quelque chose d'aussi horrible à sa propre fille ? Ce soir je partais. Et raconter tout cela aux parents n'avaient rien changé. Cela avait peut-être même aggravé les choses. En descendant ce matin là, j'entendis Syria et mon père se disputer encore une fois.
- Pourquoi tu ne veux pas retourner à Paris ? Il y a énormément de boulot à Paris pour toi.
- je veux rester ici.
- mais, tu pourrais continuer de vivre avec nous.
- je suis majeure. Je n'ai pas de problèmes d'argent. Je fais ce que je veux.
Je passais comme une ombre devant ma famille. Je ne leur parlais plus depuis que mon père m'avait sorti cette fameuse phrase. J'avais l'impression d'être devenue un zombie. Je n'avais plus adressé la parole à Orlan. Il avait beau essayer de me parler, je lui disais de partir. Même Akihiko m'avait contacté pour voir si j'allais bien. MÊME AKIHIKO. Sans parler de Zéphyr qui m'avait litteralement harcelé de messages.
Mais je ne leurs parlais plus, j'avais pas la force. Et de toute façon, ce soir, tout sera terminé. Je n'aurais plus qu'à oublié. Syria m'avait dit que je pourrais leurs écrire, mais cela ne serait pas pareil. Je ne voulais juste plus penser à eux. Et surtout pas à Orlan. Tout oublier, c'était bien ça.
J'avais promis à Sigrid qu'ils étaient au courant de tout. Je l'avais rassurée en disant qu'ils l'avaient bien prit car elle s'en voulait. Elle allait s'en rendre compte un jour que c'était faux. Mais pas grave.
Je me mis en route pour le collège. À mon arrivée, Zéphyr alla vers moi :
- saluuuut ! Ça vaaa ?
Elle faisait ça chaque matin, je ne lui répondit pas. Comme si j'avais soudainement un filtre, je ne l'entendis plus. Comme si j'étais seule. Tout se passa normalement. Jusqu'à la récréation. Je m'étais assise sur un banc, et je n'avais pas remarqué au début que j'étais juste devant un groupe de trois personnes qui discutaient assises dans l'herbe.
Zéphyr et Akihiko était dos à moi, mais Orlan lui était pile dans ma direction. Heureusement qu'il ne pouvait pas me voir. Ils discutaient.
- C'est pas notre faute si elle te parle plus ! On a tout essayé.
- mais vous êtes sûrs qu'elle ne vous a rien dit ? Je suis sûr qu'elle va pas bien...
- ah bah ça c'est sûr qu'il s'est passé quelque chose. Mais tant qu'elle ne dit rien on saura pas
Orlan se mit en position sushi puis il fit la moue.
- franchement arrête de déprimé là ! C'est pas comme si elle était importante. Elle est toujours méchante avec toi, dit Akihiko.
- n'importe quoi ! Elle est très gentille.
Les deux autres soupirent. Akihiko dit d'un ton morne.
- on t'as déjà dis qu'elle était pas cool avec toi. Tu le sais non ? Et puis faut que tu arrête de penser à elle comme ça ! Déjà elle boude depuis des jours. Si elle était vraiment ton amie, elle te parlerai là.
- c'est mon amie...
- elle t'a fait trop de mal depuis le début ! Sincèrement Orlan arrête, je t'ai toujours dis que c'était le genre de fille pas fréquentable.
- et puis maintenant, reprit Zéphyr, c'est nous tes amis !
Tiens, j'avais rater un épisode. Finalement Zéphyr et Orlan étaient amis ?
- je préfère Sigrid.
- ah bah merci c'est sympa.
Akihiko soupira et dit d'un ton pas du tout aimable.
- tu veux pas arrêter de parler de Sigrid tout le temps comme ça ?
- je te signale que c'est toi qui a commencé à parler d'elle !
- oui mais t'arrête pas de déprimer ! T'as l'air aussi depressif qu'elle !
- mais Sigrid est... Elle est joyeuse et puis elle drôle. J'aime pas la savoir mal... Je m'inquiète juste.
Zéphyr voulu dire quelque chose mais Akihiko la coupa.
- écoute. Sigrid est une fille horrible. Arrête de t'accrocher à elle comme ça. Elle ne t'as rien apporté de bon dans ta vie.
- qu'est ce que tu en sais ?
- elle arrête pas de se moquer de toi !! Et elle fait de l'humour noir avec ta situation aussi !
- je préfère son humour noir. Au moins c'est drôle contrairement à vous qui chuchotez des choses sur moi avec pitié.
Et Orlan se leva et s'éloigna. Et pour la deuxième fois, je vis des larmes couler sur ses joues. Il venait de répondre si violement à Akihiko. Cela me faisait bizarre. Il sait se défendre maintenant ?! J'ai rater plus d'un épisode en fait !!! Faudra m'expliquer là.
Non, pas la peine. J'ai pas envie d'en savoir plus. Car ce soir je vais tous les oublier. Je devrais au moins dire au-revoir à Orlan, mais je n'en avais pas le courage. Oublier, c'est bien.
***
C'était mon dernier cours dans ce collège. Juste avant d'entrer dans la salle, je m'approchai d'Orlan.
- Orlan ?
Il sursautait et sourit.
- Sigrid ?! Ça va ?
C'était précisément pour cela que je ne voulais pas lui parler. Il allait m'en vouloir après si je ne lui disais pas la vérité.
- Oui, t'en fais pas...
- Pourquoi tu... hum... Enfin tu viens même plus au parc ces derniers temps.
Je soupirai, comment lui dire ? J'allais devoir lui mentir tant pis...
- Je suis privée de sortie à cause du brevet blanc. Mais ne t'en fais pas. Demain je viendrais.
- D'accord. Mais tu vas bien hein ?
- T'en fais pas tout va bien.
La prof nous dit d'entrer dans la salle. Je me tournais mal à l'aise vers Orlan. C'était sûrement la dernière fois de ma vie que je lui parlais. Et il me souriait tout content. Bizarrement je n'étais même plus triste, j'étais juste lasse. J'allais revoir Mélody dans mon ancien collège, j'allais reprendre une vie normale comme m'a dit mon père. Oui, c'est bien. Et j'allais aussi oublier Orlan. Mais c'était pas grave.
- A demain Sigrid.
- A demain.
Quel demain ? Pff, c'est ridicule tout cela. Je m'assis à ma place. Je n'écoutais pas les trois quarts du cours. Je voulais juste partir. Une fois que j'aurais déménagé, plus rien ne me rappellerait ici.
Le cours passa à une vitesse hallucinante. Comme si c'était une fin de journée normale, je partie lentement. Mais la prof m'arrêta.
- Tu ne me dis même pas aurevoir Sigrid ? Tu étais une excellente élève. Je regrette vraiment que tu déménage.
Je souris à la prof, heureuse qu'elle me complimente.
- Merci madame. Aurevoir.
Je passai la porte, mais l'absence de bruit inhabituel derrière moi me figeai. Je me retournais pour voir Akihiko et Orlan. Ils avaient entendus... Prise de panique, je me mis à courir. J'allais tout oublier maintenant.
