Chapitre 41

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Suite à mon commentaire, le silence se fit dans la pièce. Ils me regardaient, puis se regardaient entre eux avant de reprendre du début. Est-ce que ce petit jeu allait durer encore longtemps? Ça commence à devenir un peu gênant là… Le silence, c’n’est pas pour moi. Ça me met mal à l’aise. Ça me donne l’impression qu’ils sont trop occupés à me juger pour parler. C’est peut-être simplement moi qui est parano, c’est encore un mystère.

Finalement, après plusieurs secondes qui semblèrent durer des heures, toute ma famille se mit à éclater de rire. Tous, sauf moi. Comment aurais-je pu rire? Je n’savais même pas pourquoi ils riaient. Peut-être qu’ils sont juste un peu débile…

<< Pourquoi vous riez? On dirait une bande de débiles tout droit sortie de l’asile.

-Parce que tu as raison et que nous avons tort. Nous ne devrions pas nous crier dessus comme nous le faisons. On est une famille. Une famille doit se respecter et se serer les coudes. Une famille doit prendre soin des autres au lieu de les critiquer sans arrêt. Une famille doit communiquer avec respect. Samuel, dit maman, je suis fière de voir ce que tu as fais de ta sœur. Tu l’as bien élevée malgré tout.

-Malgré tout quoi?, rétorqua le principal intéressé.

-Tu avais à t’élever toi-même en plus de l’élever elle, mais tu as tout de même fais du bon boulot. Tu aurais pu mal tourner, mais je vois bien que ce n’est pas le cas. J’aurais également pu me retrouver avec une fille droguée ou une Marie-Couche-Toi-Là et au lieu de ça, j’ai devant moi une belle jeune femme avec des manières et des convictions auxquelles elle s’accroche. Je te remercie d’avoir si bien pris soin d’elle pour nous.

-Pour vous ou à votre place?

-Tu as raison de nous en vouloir et j’imagine que nous ne pouvons t’en blâmer. Nous le méritons, je le sais bien. J’ai été une mauvaise mère pour toi et j’en suis navrée.

-Mon fils, j’aurais dû être présent à tes côtés et je le regrette. J’aurais dû être celui qui t’apprend à devenir un homme. Dieu sait que devenir un homme est quelque chose de difficile, et j’aurais dû être là pour pouvoir t’aider et te faciliter la tâche. J’ai été absent durant les moments les plus importants de ta vie, mais…

-Mais quoi? Tu ne peux plus rien faire pour effacer tout ça! Le passé est passé, c’est arrivé, tu ne peux plus rien changer! Les regrets, c’est cool, mais ça ne corrige rien. Tout reste pareil.

-Tu comptes nous rayer de ta vie?

-Je n’ai pas à le faire de toute évidence, vous l’avez fait pour moi.

-Samuel…

-Pourquoi maintenant? Pourquoi c’est seulement aujourd’hui que vous décidez qu’il serait peut-être temps pour vous d’agir comme des adultes? Vous auriez dû y penser avant. En fait, vous auriez simplement dû rester, rester et ne jamais partir. Il est trop tard pour regretter. Après toutes ces années, toutes ces années où j’ai espérer votre retour. Toutes ces années où j’ai souhaité vous retrouver. Toutes ces années où j’ai continué de croire que vous reviendriez un jour. J’ai imaginé la scène de nos retrouvailles pendant des mois!

-Et tu es en train de la vivre maintenant, alors quel est le problème?

-Le problème? Le problème, c’est qu’il est trop tard. J’avais cessé d’y croire depuis longtemps. J’ai cessé de me faire croire qu’un jour, en rentrant de l’école, je vous trouverais dans le salon à attendre que je revienne. Mes illusions ont laissé place à la réalité. Ma peine s’est mutée en haine et en rage.

-Sammy…

-À ton avis, Lexi, pourquoi je me suis émancipé d’eux hein? De toute façon, ce n’est qu’un bout de papier qui décrit la situation dans laquelle j’ai été plongé il y a des années. À mes yeux, vous n’êtes plus mes parents. Vous avez cessé de l’être en embarquant dans cet avion pour l’Afrique. En quittant le pays, vous avez choisit l’aller simple vers la liberté. Vous avez sauvé plusieurs enfants, mais vous avez perdu le vôtre. >>

Il s’éloigna, les yeux brillants de ces larmes qu’il s’est toujours résolu à garder. Les yeux brillants de ces larmes qu’il a toujours refusé de laisser couler. Les yeux de ces larmes <<qui n’ont jamais existées>>. Les yeux brillants de ces larmes <<que je me suis toujours imaginées>>. Les yeux brillants de ces larmes de rage, de tristesse et de douleur. Les yeux brillants de ces larmes qui reflètent ce qu’il ressent. Les yeux brillants de ces lames que mes parents ont engendrées. Les yeux brillants de ces larmes qui ne pardonneront pas.

Les yeux brillants de ces larmes qu’il a retenues pendant des années et qu’il a finalement décidé de laisser glisser.

Don't Be Afraid. (Dark Liam)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant