J'arrangeais le bouquet de fleurs sur la table basse et remplis le vase un peu plus. Le bouquet était composé de lilas et de roses. C 'était le cinquième en six jours. J'étais enfin retournée chez mon père ; chez moi. Je me sentais légèrement mieux mais avais toujours cette impression étrange que mon âme flottait a côté de mon corps. J'avais l'impression de voir Rose agir, mais de ne pas être elle. C'était une chose qui m'était déjà arrivé une seule fois, il y a trois ans de cela. Cela avait duré une journée entière et j'avais bien failli en finir.
Je m'approche du comptoir gris et prend les cachets de mon traitement avec précaution, un par un et m'oblige à avaler un sandwich. J'ai passé les trois derniers jours enfouie sous ma couette ; littéralement. J'étais incapable de bouger, comme si le poids dans ma poitrine était devenue énorme et m'alourdissait trop pour que je bouge. Je n'avais pas eu la force de manger, pas eu la force de me doucher non plus. Je sais que cela n'est pas dû seulement au deuil ; c'est mon quotidien. D'un coup, je pris conscience de quelque chose ; Pourquoi Alena n'était-elle pas venue à l'enterrement ? Ni Kim ? Venant de Kim, je m'y attendais , mais l'absence de Alena venait de me frapper en plein dans la poitrine. J'étais trop obnubilée par ma propre souffrance et n'avais même pas pris conscience que je n'avais aucune nouvelles d'elle depuis son départ de l'hôpital. Elle était même partie sans me dire au revoir. Cela ne lui ressemblait pas.
Je ramasse les cachets que j'ai éparpillé un peu partout sur le comptoir et les remets un à un dans leur petit sachet en me demandant si ce ne serait pas mieux de les sniffer. J'avais déjà essayé avec les anxiolytiques mais pas le lithium ou les autres médicaments. Il paraît que lorsque l'on sniffe les médicaments au lieu de les ingérer oralement, ils atteignent beaucoup plus vite le cerveau. Le pire est que je n'ai pas besoin d'anxiolytiques aujourd'hui, mais de régulateurs. Je me sens en pleine forme. Vide, mais en pleine forme. J'ai besoin d'action, de risque, de danger. Je sors mon téléphone de ma poche et compose le numéro d'un des hommes que j'avais rencontré en soirée ; Grégoire. Il m'arrive souvent de l'appeler quand j'ai besoin de danger ; il est fraîchement fiancé. Mais cela ne l'empêche pas de raffoler de mes courbes. Nous avons déjà couché trois fois ensemble et il semble beaucoup m'apprécier.
La sonnerie me fait sursauter et je soupire bruyamment, raccrochant le téléphone. Avant que je n'atteigne la porte, je vois mon père devant cette dernière, grande ouverte, donnant sur les agents Brag et Sellers.
-Qu'est ce qu'il se passe ? Sortis-je en m'approchant.
-Nous voulons juste discuter, répond Sam.
Je n'avais aucune envie de voir des policiers chez moi. Ou même de voir des policiers tout court. Je sens l'agacement monter en moi et s'insinuer tel un blizzard de mon ventre jusqu'à ma mâchoire, qui se contracte. Mon père les fait entrer poliment et leur serre la main, pendant que je les toise sauvagement, croisant les bras.
Ils se dirigent tous dans le salon et je les suis, agacée. Tout le monde s'assoit, sauf moi.
-Nous sommes venus car nous pensons que c'est important pour vous de savoir cela, dit James.
Mon père fronce les sourcils et leur demande des explications.
-Le groupe responsable de la fusillade font parti d'un large réseau de terroristes. Ils sont tous répartis dans les environs en ce moment... Et c'est rare qu'une des victimes se défende et tire sur plusieurs d'entre eux, annonce Sam.
-Nous craignons des représailles, sort James de sa voix grave.
Il s'avance et pose ses coudes sur ses genoux, avant de joindre ses mains. Il lève le regard et le plante dans le mien, ce qui me lance des électrochocs. Un frisson me parcourt la colonne vertébrale et je continue de le regarder, admirant sa mâchoire forte et ses cheveux couleur miel.

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Roses
ActionRose, une étudiante addict et hargneuse est dans le coma. Elle va devoir lutter contre elle-même pour que son âme cesse de vagabonder dans l'obscurité. Tout ce dont elle se rappelle : la souffrance et des coups de feu. #1 santé mentale le 9/08/2019...