Chapitre 5

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-Un proto...Je... Je les ai frappé et j'ai couru aussi vite que j'ai pu pour rattraper le bus. Puis je suis venue ici.

-Bien. Je vais te raccompagner chez toi, mais je dois prévenir Sam avant, déclare-t-il en sortant son téléphone.

Il sort de la pièce et j'entends sa voix grave à travers le mur fin. C'est déjà la deuxième fois qu'il me raccompagne.

Je suis plongée dans mes pensées pendant une durée indéterminée, puis suis ramenée brusquement à la réalité par la porte coulissante qui s'ouvre bruyamment. A ce moment là, je me rends compte que j'étais en train de pleurer ; mon corps étant secoué de soubresauts.

-Tiens, fait James en me tendant un paquet de mouchoirs.

Il s'accroupit devant moi.

-Tu as raison de te laisser aller, c'est un énorme choc. Tu as vécu énormément de choses pour une jeune femme de ton âge.

Je n'essaies même pas de lui répondre, mais essuie mes larmes une à une. Elles ne veulent pas s'arrêter de couler. Je me mouche rapidement en me détournant, honteuse.

-Ou est-ce que tu as le plus mal ? Me demande-t-il.

-A la gorge. Il a tenté de m'étrangler. A la tête aussi ; enfaite j'ai mal partout. A l'intérieur et a l'extérieur. Je n'en peux plus, je n'ai vraiment pas la force.

-Je comprends tout à fait. Ton amie Alena est passée au poste dernièrement. Elle était convoquée, mais elle a prit de tes nouvelles, annonce-t-il.

-Je n'en ai rien à faire. Elle n'est plus rien pour moi. Elle m'a ignorée pendant la période la plus difficile de ma vie ! Elle me disait qu'elle serait toujours là pour moi... Mais dans la vie, on vit seul, on souffre seul et on meurt seul. Je me rends compte que mes « amis » ne sont sans doute que des connaissances, j'ajoute en fixant le vieux parquet.

Il soupire et se relève. Il semble écouter ce que je dis mais ne pas l'entendre ; il n'est apparemment pas d'accord avec moi.

-En tous cas, Sam est prévenu. Nous allons mettre en place un système de protection.

Je me lève brusquement.

-Je ne veux pas être suivie a toute heure de la journée. Je veux pouvoir être libre.

-Et tu veux te faire agresser à nouveau comme aujourd'hui ? Demande-t-il agressivement. Je ne suis pas sûr que tu t'en sortiras indemne cette fois.

Sa remarque me pince le coeur et mon ventre se noue. Je suis réellement en danger de mort. Je sens mes palpitations revenir à cause de l'anxiété et tente de réprimer un frisson de peur. Je fais quelques pas dans son appartement.

-Et ca va durer combien de temps ?

-Jusqu'à ce qu'on les trouve. Ils t'en veulent vraiment d'avoir ruiné leur plan. Ils mettent souvent plusieurs semaines à les élaborer.

Mes pensées divaguent vers ce jour-là. Je repense aux gens en train de hurler, de courir partout pour sauver leur propre vie. Je me souviens du bruit du coup de feu que j'avais tiré ainsi que l'instant ou j'ai compris que Lily était entre la vie et la mort. Des flash de flaques de sang me reviennent et je secoue la tête pour chasser ces pensées. Mon téléphone sonne et me fait sursauter ; c'est Kim. Je l'avais complètement ignorée ces derniers jours.

James me fait signe qu'il faut partir et je le suis à contre coeur dans sa voiture. Le chemin se fait en silence, mais c'est un silence relaxant. J'appréhende énormément la réaction de mon père.

-Comment ça se passe à la maison ? Tes parents sont là pour toi ? Demande James lorsque nous sommes presque arrivés.

-Ca se passe... J'ai l'impression de voir ma porte s'ouvrir le matin et de voir la petite tête de Lily s'y infiltrer pour me demander de rester avec elle, comme elle avait l'habitude de le faire. Sam nous a conseillé de jeter ses affaires, de ne pas faire comme si elle allait revenir, mais je refuse encore d'y croire.

-Nous en avons parlé, oui. Ce serait mieux pour vous tous, et surtout pour toi si tu ne gardais que quelques souvenirs... Lily est un évènement marquant de cette fusillade. C'était la seule enfant et les gens savent qu'elle est morte dans les bras de sa grande sœur...

-Vous voyez, tout le monde en parle ; elle est dans tous les esprits mais elle n'est pas là en vrai ! Pourquoi tout le monde parles de ma s...

-Je viens juste de te dire pourquoi, me coupe-t-il en me jetant un regard. Ton anonymat va être très difficile à garder ; Alena a parlé, d'autres victimes ont parlé de Lily et « de sa grande soeur »... Les gens parlent. Votre famille entière est au centre des rumeurs.

Un moment de silence s'installe.

-Je sais, j'ai pu voir cela à l'église.

-Avec qui étais-tu ? Il demande en tournant à droite.

-Ma mère, je réponds sèchement, agacée.

-Et tu l'as quitté pour te balader dans la rue ?

-J'avais quelque chose à faire.

Il prend une grande inspiration, jetant un coup d'oeil dans le rétroviseur avant de se garer devant la maison.

-J'ai bien vu comment tu te comportes avec elle. Je ne veux pas te dire quoi faire, mais juste saches que mes parents n'étaient pas là pour moi, car ils ne le voulaient pas. Les tiens essaient au mieux qu'ils peuvent, ne les rejette pas aussi durement.

Je suis sur le point d'objecter, quand il secoue la tête pour me faire taire.

-Je vais entrer maintenant, et annoncer à ton père ce qu'il s'est passé, ainsi que ce qu'il va se passer. Tu souhaites rester dans la voiture ?

Je hoche la tête en déglutissant. Il coupe le moteur et sort de l'immense voiture en un geste fluide, puis claque la portière. Mon coeur cogne contre ma poitrine et j'ai l'impression que ma tête va exploser. Je baisse les vitres rapidement et hume une grande bouffée d'air frais, avant de m'allumer une autre cigarette.

RosesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant