Chapitre 5

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— Ne vous en faites pas, ce n'est qu'un mauvais moment à passer...

Elizabeth soupira et se tourna vers Jack. Assis dans un fauteuil, le pirate avait rejoint la jeune femme à l'auberge de Port-Royal, après la tombée de la nuit. Il n'était pas en danger dans la ville, mais il préférait ne pas avoir à faire avec les gardes du Gouverneur...

— Votre père pense que je ne suis pas digne de vous, et il a bien entendu raison, dit Jack en se levant. Je ne suis qu'un pirate, un maudit pirate qui passe plus de temps à boire qu'à pirater, mais il y a une chose dont je suis certain, Lizzie...
— Laquelle ?

Jack s'avança vers elle et se pencha au-dessus d'elle avec un sourire avant de l'embrasser.

— Ceci répond-il à votre question ? souffla-t-il.
— Je n'ai pas bien compris, Capitaine, recommencez... ronronna Elizabeth en souriant doucement.

Jack s'exécuta avec un plaisir non dissimulé et Elizabeth l'entoura de ses bras. Il passa ses mains sur sa fine taille engoncée dans un corset de cuir, puis la jeune femme brisa le baiser et appuya son front contre celui de son compagnon.

— Je vous aime, Jack... dit-elle doucement. J'ai de la peine à croire que ce soit possible d'aimer quelqu'un a ce point... Il y a une année, j'étais une poupée de porcelaine coincée dans son corset et engluée dans un mariage que je ne voulais pas... Aujourd'hui, je suis la femme d'un pirate, et pas n'importe lequel, le Seigneur des Mers du Sud...

Jack sourit. Il l'embrassa de nouveau puis, la hissant sur sa taille, il la conduisit sur le lit et s'allongea sur elle. Il posa sa tête sur son estomac et Elizabeth posa ses bras sur le haut de son dos...

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— Ils ne sont pas descendus de la soirée... Ils ont passé la nuit ensemble, vous croyez ?
— Sans doute, mais pas à faire des galipettes, répondit Anamaria.
— Qu'est-ce que tu en sais ? demanda l'un des dernier matelots engagés.
— Je connais Lizzie, elle ne s'abandonnera à Jack que lorsqu'elle saura qu'elle en a le droit. Pas avant.
— Il n'est plus tout jeune le Capitaine, lâcha alors un autre homme. S'ils veulent un môme, ils devraient commencer maintenant...

Un silence s'installa et Anamaria soupira dans sa chope de bière. Elle annonça ensuite qu'elle allait se coucher, et elle monta au premier en prenant sa clef sur le tableau.
En passant devant la chambre d'Elizabeth, la jeune femme tendit l'oreille, mais elle n'entendit rien de particulier. Elle secoua alors la tête et s'enferma dans sa chambre en soupirant d'aise à l'idée de pouvoir enfin prendre un bon bain...

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Les jours s'écoulèrent, lentement, mais sûrement, et Elizabeth n'eut pas le choix que d'aller présenter ses respects à la nouvelle épouse du Commodore. Elle n'était pas du tout enchantée de devoir ce plier à cette lubie mondaine, mais son père y tenait, afin qu'elle puisse voir que son ex époux ne lui en voulait pas de l'avoir abandonné.

Abandonné.

Elizabeth était furieuse. Elle marchait dans les rues de la ville depuis plusieurs minutes. La visite chez le Commodore datait du matin et n'avait duré qu'une poignée de minutes, heureusement, car si elle avait été obligée de déjeuner avec ces deux-là, comme son père, elle en aurait piqué une crise. Du reste la chère épouse du Commodore lui avait clairement fait comprendre, à demi-mots, bien entendu, qu'elle n'avait rien à faire dans une maison au milieu de bourgeois...

Abandonné ! Quel goujat ! Faire croire à cette greluche que je l'ai abandonné pour vivre une vie de piraterie !

Perdue quand ses pensées, la jeune femme ne vit pas l'homme qui venait en face d'elle, et elle le heurta à l'épaule.

— Pardon ! s'excusa-t-elle aussitôt. Je ne vous avais pas vu, Monsieur... Oh...!

Elizabeth recula d'un pas en reconnaissant la jambe de bois qui s'était arrêtée et qui l'a regardait de haut en bas d'un air gourmand.

— Mademoiselle Swann... roucoula-t-il de façon presque gluante. Quel plaisir de vous voir ici...

Elizabeth revit alors ces semaines passées enfermée dans la maison de Barbossa, au large de l'Angleterre... Elle en eut un frisson et recula à nouveau avant de faire volte-face et de partir à grands pas. Dans son dos, elle entendit le rire gras de Barbossa et elle eut un haut de cœur. Elle se jeta dans la première boutique qu'elle vit et décida de se cacher dans un coin, le temps de faire passer les dizaines de sentiments contradictoires qui se bousculaient en elle, tout  d'un coup...

— Mademoiselle ? Tout va bien ? Oh... mais vous êtes Mademoiselle Swann !

Elizabeth leva la tête vers la vendeuse et se releva, cachée derrière un miroir.

— Pardonnez-moi, dit-elle. Je... J'ai croisé une personne de mon passé et...
— Ce pirate à la jambe de bois ?

Elizabeth opina vivement. Personne à Port-Royal n'ignorait plus l'histoire de la fille du Gouverneur qui avait trouvé chaussure à son pied chez les pirates, mais les derniers faits qui leur étaient parvenus par quelques marchands en avaient choqué plus d'un.

Marie, la vendeuse, invita alors Elizabeth à partager son thé et à lui expliquer ce qui avait bien pu la pousser à se réfugier dans sa boutique ainsi. Ravie de pouvoir parler à quelqu'un d'inconnu, la jeune femme s'en donna à cœur joie pendant le reste de l'après midi...

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— J'imagine qu'il est ici pour vendre de la marchandise... dit Jack, préoccupé. Vous avez bien fait de vous cacher, il aurait été capable de vous enlever de nouveau.
— En pleine rue ?

Jack regarda sa compagne et grimaça.

— Jusqu'à ce que nous repartions, j'aimerai que vous vous installiez chez votre père, dit-il alors.
— Quoi ? Non, Jack, je...
— Ce n'était pas une demande, mon amour... J'ai peur que Barbossa trouve encore une idée tordue pour vous arracher à moi, et il en est hors de question.

Elizabeth serra les mâchoires. Elle avait quitté sa nouvelle amie une heure plus tôt et avait rejoint Jack à la taverne en rasant les murs.

— Jack... Qu'est-ce qui pourrait définitivement tenir Barbossa à l'écart de nous ? demanda-t-elle alors.
— Le tenir à l'écart ? Le mariage.

Elizabeth s'étouffa.

— La mariage ? Mais...
— Il existe un code d'honneur chez les pirates, dit Jack. Et peu importe le degré de fourberie de chacun, nous sommes tenus d'y répondre. Ainsi, un pirate ne touchera jamais à la femme d'un autre pirate, sous peine de lui déclarer la guerre.

Elizabeth serra les lèvres.

— Mais je ne...

Elle se détourna, une main sur la taille, l'autre sur le front. Jack posa ses mains sur ses épaules.

— Ce ne sont que des mots, dit-il doucement. De quoi avez-vous peur ?
— Je... Je ne sais pas, à vrai dire, mais mon mariage avec le Commodore a été un échec, il... Il estimait avoir tous les droits sur moi, surtout celui de me prendre quand bon lui semblait...

Jack fit pivoter la jeune femme face à lui.

— Je ne ferais jamais une telle chose ! dit-il. Vous avez ma parole, Lizzie, que le jour où nous partagerons le même lit, vous serez totalement envieuse.

La jeune femme se mordit la joue avant de se couler dans ses bras, inquiète. Il la serra contre lui un long moment avant de l'enjoindre à rassembler ses affaires, qu'il allait la conduire chez son père dès ce soir.

⏳ Capitaine E. SparrowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant