Chapitre 5

600 44 6
                                    

— Tu ne peux pas laisser une femme dicter ta vie, fiston.
— Et c'est toi qui dit ça ? Maman ne t'aurait pas mené la vie dure pendant des années par hasard ? Sans que tu ne fasses rien pour y changer ?

Jack grimaça. Il était bientôt l'aube et Jack et son père avaient discuté pendant des heures.

— Écoute, va la chercher...
— J'ai promis d'attendre une année...
— Si je compte bien, il reste trois mois... Soit juste de quoi gagner l'Angleterre, la chercher, la trouver, mettre un plan au point... Et la récupérer, énuméra Teague.
— Papa... Tu ne me facilites pas la tâche, tu sais ? Tu crois quoi ? Bien sûr que je veux récupérer Elizabeth, mais si je vais la chercher, si je l'enlève, son père nous enverra la Royal Navy et nous finirons au fond de l'océan...
— Au moins, vous serez ensemble...

Jack fit une vilaine grimace à son père et se détourna. Il s'approcha de la porte de la maison et se passa les mains sur le visage.

— Je ne pensais pas voir un jour mon fils amoureux... dit alors Teague.
— Je suis un pirate, mais je reste un homme... répondit le concerné.
— Certes... sourit Teague, amusé. Allez, dit-il alors. Va rejoindre ton équipage et gagnez l'Angleterre. Le temps que vous arriviez, elle aura été libérée.

Jack regarda son père avec surprise.

— Libérée ? Comment ça ?
— Tu ne m'as pas dit que... Tu as parlé d'un an...
— Oui, mais c'est la promesse que moi je lui ai faite... Son père ne sait rien.
— Mais alors...?
— Oui... soupira Jack. C'est ce que je te dis... Si je vais la chercher, son père nous fera traquer et nous ne serrons jamais en paix... Il fera écumer les océans, il mettra Tortuga à feu et à sang...
— Tu exagères... Le Gouverneur Swann n'est pas aussi cruel...
— Lui non, mais la Compagnie des Indes...

Teague grimaça. Il avait eut à faire à la Compagnie des Indes plusieurs fois ces derniers mois, mais son navire était puissant et son équipage solide. Ils s'en étaient sortis parfois de justesse, mais toujours sans dommages irréparables.

— La prochaine fois que je tombe sur un de leurs navires, je te jures que je l'envoie par le fond ! grogna Teague. Depuis qu'ils sont arrivés dans les mers des Caraïbes, c'est devenu invivable !

Jack se contenta de hausser les épaules. Il quitta alors son fauteuil et s'étira bruyamment.

— Bonne nuit, papa...
— Toi aussi, mon fils...

Jack quitta ensuite la maison de Tia et descendit les ponts de corde et les escaliers branlants qui lui permettaient de regagner le quartier où ses hommes avaient été installés.
Cependant, il ne trouva personne dans la grande maison. Il y avait encore leurs affaires, mais point d'équipage.

— Ils sont passés où, ces corniauds, encore ? grommela-t-il. Sont jamais là quand j'ai besoin d'eux ! Pas croyable...

Jack marmotta encore un peu puis décida qu'il chercherait ses hommes le lendemain. Discuter avec son père l'avait épuisé et en plus, il était en train de décuver. Il avait donc la langue sèche et un mal de crâne à s'en taper la tête contre le mur...

Déposant manteau et armes près d'une couchette, il s'y vautra en soupirant bruyamment. Il s'endormit en un rien de temps et Elizabeth ne tarda pas à investir ses pensées...

~

— On peut pas faire ça...
— Tia a raison, Gibbs... Jack est obsédé par Elizabeth, on ne fait quasiment rien depuis des mois parce que son foutu compas ne pointe que vers le nord !

Anamaria croisa les bras, contrariée. Depuis qu'ils avaient ramenée Elizabeth à Port-Royal, ils n'avaient presque pas abordé de navires, ils avaient récupéré très peu de choses à vendre pour avoir une solde et Jack semblait s'en ficher.

— Je sais à quoi tu penses, Ana, mais tu as tort, dit alors Gibbs. Ok, le Capitaine est amoureux, mais il reste notre Capitaine. 
— Ouais, ben, je préfère Jack quand il est ivre plutôt qu'amoureux, franchement... grommela la jeune femme en croisant les bras. Dis-moi depuis combien de temps on n'a pas eut une solde correcte ? Des mois, Gibbs, ça fait des mois que...
— Ce n'est pas la faute de Jack si tous les vaisseaux marchands sont escorté par la Compagnie des Indes, Anamaria.

Gibbs et Anamaria pivotèrent et le Capitaine Teague s'approcha lentement, imposant dans son manteau rouge sombre et affublé de son grand chapeau noir.

— Monsieur... dit Gibbs en baissant les yeux.
— Allons, mon bon Joshamee, ne faites pas autant de chichis parce que je suis le père de votre Capitaine...
— Ce ne sont pas des chichis... marmonna Gibbs, un peu refroidi.  Vous êtes un pirate renommé, bien plus que Jack et...
— Bah, bah !
— Je suis d'accord sur le fait que ce n'est pas de la faute de Jack si la Compagnie des Indes nous empêche de pirater, mais on va devenir quoi, nous, si on ne peut plus attaquer personne ? dit alors Anamaria.
— Allons, allons, mon enfant, calmez-vous... Nous sommes dans tous dans la même panade, répondit Teague en haussant les épaules. Pas plus tard qu'hier, j'ai reçu un télégramme de Barbossa qui faisait route vers l'Angleterre... Apparemment, on lui aurait proposé un poste de Corsaire.

Gibbs grogna.

— Les temps sont durs, on dirait, dit-il, renfrogné. Si même Barbossa décide d'abandonner la piraterie...

Personne ne répondit. Anamaria s'excusa alors et s'en alla. Teague la regarda partir.

— Serait-elle jalouse ? demanda-t-il.
— Jalouse d'Elizabeth ? Non, elles sont amies, répondit Gibbs. Non, ce qui l'agace c'est que Jack soit à peine capable de penser rationnellement... Son compas pointe continuellement vers le nord et au nord d'ici... Il y a l'Angleterre...
— J'ai conseillé à Jack de s'y rendre, dit Teague. Le temps que vous arriviez, vous aurez sans doute trouvé comment récupérer la fille...

Gibbs baissa soudain le nez et regarda ailleurs. Teague haussa un sourcil puis ronfla, amusé.

— Ne me dites pas que vous avez envisagé de fausser compagnie à mon fils ! rigola-t-il. Le Pearl sans Jack c'est une coquille de noix !
— Peut-être, mais au moins, on pourrait pirater et arrêter d'engraisser comme des cochons en restant cloîtrés ici...

Teague grimaça.

— L'un de mes Seconds cherche un équipage, dit-il alors.
— Et le Pearl ?
— Il ne craint rien ici, il est bien trop respecté pour se faire voler...
— Mouais... Barbossa l'a piqué à Jack plus d'une fois, hein...

Teague inspira profondément et Gibbs plissa le nez.

— Le jour se lève, dit alors le Capitaine. Laissez à Jack encore deux jours et je vous promet qu'il partira. Il a cette fille dans la peau, Monsieur Gibbs, il l'aime et il ne la laissera pas dans son couvent encore une année.
— Promis ?
— Je ne fais jamais de promesses.

Teague tourna ensuite les talons et Gibbs soupira. Il regarda les maisons empilées sur l'îlot puis décida d'aller se coucher.
Deux jours. Il laissait à Jack encore deux jours pour se décider, si d'ici-là il ne s'était pas secoué, la proposition de Tia Dalma prendrait effet.

.

Dernière modification le 8/08/2020

⏳ Capitaine E. SparrowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant