Chapitre 11

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— On va faire quoi de lui ?
— Il est en âge de travailler sur le navire, répondit Jack. Mais il est traumatisé.
— Qui ne le serait pas... Il a passé deux semaines entouré de cadavres !

Jack grimaça et se laissa tomber sur une chaise. Elizabeth l'observa.

— Est-ce qu'il a dit comment il avait survécu ?
— Non, même si j'imagine qu'il a été contraint de faire des choses peu catholiques pour survivre... répondit la jeune femme.

Jack grimaça. Il revenait du quartier des matelots où, dans le noir, pelotonné dans un hamac sous la surveillance de Gibbs, Thibault dormait. Il avait été lavé à l'eau de mer glacée et ses vêtements avaient tous été brûlés, au cas où. Il avait ensuite mangé jusqu'à être malade puis il s'était couché et depuis il dormait.

— On le largue au premier dispensaire qu'on croise ? demanda Anamaria.
— Ça serait mieux, mais si on leur dit qu'on l'a trouvé dans un navire mort du choléra, ils vont le jeter à la rue, répondit Elizabeth, embêtée. On devrait aller jusqu'à Tortuga, là-bas, il pourra se fondre dans la masse et partir s'il en a envie. Le temps qu'on arrive, on saura s'il est malade ou pas, mais je pense qu'il a dit la vérité, il n'a pas été infecté.
— On ne sait pas grand-chose sur cette maladie, mais il a passé deux semaines avec des morts, donc s'il avait dû être malade, il serait mort lui aussi, répondit Jack. Marty, ça va nous prendre combien de temps pour rejoindre Tortuga ?

Le pirate court sur pattes s'approcha d'une carte punaisée sur une table. Ils se trouvaient tous dans le bureau de Jack et un silence s'installa sur le groupe pendant que Marty faisait ses calculs.

— Environ deux mois, Capitaine, répondit soudain le matelot.
— Bon, fixe le cap alors. D'ici-là, on saura s'il est infecté et surtout, si nous, nous l'avons été aussi.

Elizabeth et Anamaria grimacèrent. S'ils tombaient malades, Jack leur en voudrait très certainement, car elles avaient ramené le garçon, mais il s'en voudrait lui aussi, car c'était sur son ordre que les deux jeunes femmes étaient allées voir la source de l'appel à l'aide...

Un peu plus tard dans la journée, alors que le soleil se couchait, Elizabeth était suspendue dans les haubans, pensive. Quand elle sentit les cordes remuer, elle baissa les yeux et Jack se hissa près d'elle.

— Jack...
— Tout va bien ?
— Oui, la journée a été éprouvante, ce n'est rien...
— Allez dormir dans ce cas.
— J'irais après vous avoir préparé le repas. Comment va le petit ?
— Marty est avec lui, il ne parle pas, mais il écoute et Marty essaie de lui détourner l'esprit en lui racontant Tortuga.

Elizabeth opina.

— Chéri, je... commença-t-elle. Non, oubliez, ce n'est rien...

Jack grimaça.

— Vous voudriez garder le petit, je me trompe ? Vous fait-il pitié ?
— Non, du tout, mais il a perdu toute sa famille, Anamaria a achevé son petit frère, il n'a plus rien ni personne et nous allons l'abandonner à Tortuga...
— Que voudriez-vous faire d'autre ? Même s'il est en âge travailler sur le Pearl, je pense qu'il a sa dose de mer pour les prochaines années...
— Sans doute, mais... Jack, laissez-moi m'occuper de lui, jusqu'à Tortuga au moins. Il a besoin d'une mère.
— Il a treize ans...
— Ça n'empêche pas. Il a besoin de sentir qu'il est en sécurité et qu'il n'est pas seulement un paquet de cordes en plus sur un navire pirate.

Jack serra les mâchoires. Il hésita un instant puis hocha la tête.

— Très bien, répondit-il. Occupez-vous de lui, et une fois à Tortuga, je demanderai à mon père de prendre soin de lui.
— Vous feriez ça ?
— Vous avez raison, ce gamin a vécu en enfer pendant deux semaines, au milieu des cadavres de sa famille, son petit frère mourant dans les bras. Si nous ne l'avions pas trouvé, il serait mort de faim ou de soif. Il a besoin qu'on s'occupe de lui pendant quelque temps puis quand il ira mieux, il partira vivre sa vie.

⏳ Capitaine E. SparrowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant