Mrs Robinson

1K 94 45
                                    

Des billards, des flippers et des babyfoots agrémentaient le lieu. Les clients, nombreux, mélangeaient étudiants, parieurs du PMU et les inévitables piliers de bar, sans que l'on sache qui était qui.

Et c'est lors d'un soir de décembre de l'année 1992, marre d'entendre Simon et sa copine de passage, je m'étais réfugié dans ce bar. Plongé dans un devoir malgré le bruit incessant des clients, une femme d'un certain âge s'était adressée à moi.

— Un jeune homme comme toi en train de travailler un samedi soir ? Normalement, les étudiants sortent pour décompresser de la semaine, non ?

— Mon colocataire baise et ce devoir doit être rendu lundi à la première heure. Je n'ai pas le temps de m'amuser, avais-je répondu d'un ton assez désinvolte.

— Oh ! Je vois. Tu échappes à une partie de débauche, alors. Dommage, ça fait du bien de s'amuser mon grand... avait-elle dit lentement.

À ce moment-là, j'avais levé les yeux vers elle. Un verre de vin blanc à la main, elle se tenait debout devant moi. Ses cheveux auburn, portés en queue-de-cheval, et une robe courte couverte d'une veste tailleur oversize, je m'étais attardé sur son décolleté qui, pour ma défense, s'affichait dans ma ligne de mire. J'avais supposé qu'elle devait être un modèle de La Redoute, catalogue que je feuilletais enfant, durant mes étés parisiens, à la page des sous-vêtements.

— Puis-je ? avait-elle annoncé en me montrant la chaise face à la mienne.

— Oui, bien sûr, avais-je répondu sans lâcher mon stylo.

— Qu'est-ce que tu étudies ?

— Je suis à l'École des Beaux-Arts.

— Oh ! J'ai affaire à un jeune artiste !

— Un futur mécène, je l'espère. Et vous, que faites-vous dans la vie ?

— J'enseigne.

— Qu'est-ce que vous enseignez ?

— Plein de bonnes choses.

Son regard avait parcouru mon corps comme si elle m'avait déjà déshabillé. Une chaleur sexuelle s'était installée entre nous et avait réchauffé chaque parcelle de ma peau.

Peu loquace, elle m'avait demandé si je comptais rester encore longtemps dans cet endroit. Ne sachant quoi lui répondre, elle m'avait devancé, me proposant de finir la soirée chez elle.

Un chauffeur nous avait attendus en double file et ouvert la porte arrière.

— Tu te sens à l'aise ? s'était-elle inquiétée. Tu as l'air réservé.

— Je ne parle pas avant d'agir, Madame.

— Bonne réponse, m'avait-elle répondu en souriant, l'air satisfait. Quand nous monterons chez moi, continue d'être discret.

— Êtes-vous mariée ?

— Pas de questions.

— Je peux au moins me renseigner sur votre prénom ?

— Anastasia.

— Je m'appelle James.

— Tu es anglais ? s'était-elle étonnée.

— Oui.

— Ton accent est assez discret.

— Oui.

— Et tu es beau garçon. Ne te méprends pas, les Anglais ne sont pas réputés pour être de beaux hommes. Ce sont plutôt leur humour et leur insolence qui nous font craquer.

— Ma grand-mère est Française.

— Oh ! Tout s'explique, s'exclama-t-elle en se mordillant la lèvre inférieure avec un sourire.

J'avais été troublé, entre l'excitation et la peur. Je n'avais jamais côtoyé une femme plus âgée que moi, je n'arrêtais pas de me dire : vais-je assurer ? Elle ne manquait sûrement pas d'expérience.

Je me rappelle encore de ce parfum aux roses, que j'avais senti et qui se diffusait partout dans son magnifique appartement. Elle m'avait invité à la suivre dans sa chambre en me prenant par la main et elle m'avait dit :

— Ce soir, James, tu vas poursuivre tes connaissances et cela commence par regarder.

Elle avait ôté chaque vêtement qu'elle portait avec lenteur et précision, avant de rester uniquement en bas-résilles et talons. Un fourmillement s'était emparé de moi de la tête aux pieds. Mon pénis s'était durci à la vue de ses formes, de ses petits seins fermes, son sexe partiellement épilé, ses longues jambes lisses aux hanches fines, son ventre plat et surtout la gestuelle sensuelle qu'elle avait employée à se dévêtir. De ses grands yeux noirs, elle m'avait observé longuement. J'avais contemplé chaque partie de son corps et tenté de poser ma main sur elle, mais elle me l'avait claquée en faisant non de la tête, avant d'ajouter :

— Patience. Laisse tes yeux s'imprégner de chaque tissu de mon corps que tu vas pouvoir sentir et toucher. Laisse-toi me désirer.

Les secondes, les minutes étaient insoutenables.

— Écoute, chuchota-t-elle.

Nos souffles haletants avaient pris la rythmique d'une musique que nous seuls étions aptes à entendre. Tempo entraînant qui nous laissait agir de concert.

— Maintenant, déshabille-toi, James, et doucement, approche-toi de moi.

J'avais enlevé lentement mon pantalon, mon pull et pris un malin plaisir à la faire patienter à son tour. Sa respiration s'était accélérée.

Enfin nus, face à face, elle m'avait permis de la toucher en me guidant de ses mains. Le bout de mes doigts avait été sensible au contact de sa peau, parcourant son cou, en descendant jusqu'à ses mamelons qui avaient pointé sous mes caresses. Puis mes paumes tout entières avaient effleuré ses hanches et ses jambes. Je sentais mon sexe me faire mal d'excitation au fur et à mesure que le moment fatidique approchait. Et là, j'entendis à nouveau sa voix dans un murmure :

— Goûte maintenant.

Ma bouche avait embrassé la sienne et nos langues s'étaient unies. Anastasia commença enfin à me toucher : d'abord le torse puis l'arrière de ma nuque avant de caresser mon dos. Petit à petit, mes lèvres goûtaient à son corps entier, sucré et léger, jusqu'à ce que je descende dans son entrejambe, mouillée de plaisir. Ma langue savourait l'entrée de son vagin avant de lui titiller le clitoris, ce qui l'avait fait tressaillir. À cet instant, elle m'avait agrippé par les épaules et poussé sur le lit. Elle se mit à genoux et, tout en me regardant, enfonça ma queue dans sa bouche qu'elle lécha, suça et dégusta avec gourmandise en me disant qu'elle était délectable chaque fois qu'elle se retirait. Un désir animal et sauvage s'était emparé de moi. Une pulsion violente que je ne connaissais pas. Et, comme si elle avait deviné, elle me dit :

— Là, tout de suite, prends-moi !

Nous avons baisé la majorité de la nuit. De ma vie, rien ne fut plus abrupt que cette fois-ci ! Je n'avais même pas eu peur de lui faire mal, car je le voulais, je voulais qu'elle hurle, qu'elle ne puisse plus lâcher un mot, même plus un souffle, et j'y étais arrivé.

Je ne l'ai jamais revue.

Ma vie sexuelle auprès des femmes avait pris une allure addictive après cette aventure et mes fantasmes transgressaient toutes les limites du tabou et de l'interdit.

Œuvre d'art T.I - La muse Où les histoires vivent. Découvrez maintenant