Petites confidences

639 65 75
                                    

Nathalie a réservé pour quatre personnes dans un restaurant non loin de l'Université Le Cosi, restaurant traditionnel corse et provençal. En arrivant, je trouve un charmant petit restaurant aux grandes baies vitrées et des tables disposées dehors, sur le trottoir. Sans y entrer, je peux me faire une idée de son intérieur. Murs d'un ton rouge et canapés en cuir installés sous un large miroir. Des tables avec fauteuil à partir du bar et dans son fond opposé, une grande vitrine boisée ornée de livres et de babioles sur le thème de la Corse.

Frank arrive en même temps que moi et je distingue la silhouette de Nathalie sur un des fauteuils du fond, Christophe en face d'elle.

Frank et moi entrons et saluons le barman, puis nous nous annonçons au serveur. Le garçon de table nous accueille et nous indique la place réservée par Mme Cigliano. Elle a dû nous entendre, car elle se lève de sa chaise et nous regarde avec le sourire.

— On vous attendait messieurs !

— Excuse-nous d'avoir fini à l'heure, Madame, rétorque Frank avec humour.

— Alors ce premier jour de cours, James ? me demande Christophe.

— Épatant.

C'est si peu dire !

Je m'assieds à côté de Nathalie et prends la carte en mains. Nous avons une heure et demie pour manger avant de reprendre les cours de l'après-midi.

Sur la carte, je lis :

« Le Cosi raconte la Corse aux parisiens qui la connaissent bien et à ceux qui n'y ont jamais posé le pied, Le Cosi raconte la Corse aux exilés, à ceux qui l'aiment et à ceux qui la détestent, tout aussi bien. Une soirée au Cosi, c'est un chapitre de la Corse qui s'ouvre à Paris, des souvenirs de vacances, une pulsion de départ, un plaisir d'être là. Une soirée au Cosi, c'est un peu plus qu'une sortie au restaurant et un peu moins qu'un aller-retour sur l'île de beauté, mais entre les deux, un moment suspendu de grâce culinaire, l'exploration d'un territoire. Et le roulis de la mer à l'horizon. »

De la poésie dans un voyage culinaire ? Ce restaurant va me plaire. À peine passé commande, mon téléphone sonne et je m'excuse auprès de mes collègues en me levant de table. Je réponds et sors sur le trottoir, afin de ne pas déranger la clientèle.

— James Taylor.

— Bonjour, M. Taylor. Je me présente, Maître Pascal Durand, commissaire-priseur à Paris 16e. J'ai eu vos coordonnées par le biais de votre collaboratrice, Madame Flores, lorsque j'ai appelé à votre galerie.

— Oui, bonjour Maître Durand. Mon adjoint, Monsieur Williams, m'a avisé de votre appel. Il ne m'a toutefois exprimé la situation que dans les grandes lignes. Un Delacroix récemment trouvé ?

— C'est cela. Un collectionneur anglais résidant en banlieue parisienne est, selon ses dires, en possession d'une toile non répertoriée. Il a donc pris la décision de l'expertiser et de la restaurer à l'Atelier Drouot. Il est ensuite venu solliciter mes connaissances pour que je l'examine. À première vue, de mon œil expert, il m'a tout l'air d'être un original du Maître.

— D'accord. En quoi puis-je vous être utile, Maître Durand ?

— Étant donné votre réputation en art connaisseur et que vous détenez une galerie, le collectionneur - un très bon client - m'a demandé de faire le lien entre vous deux pour pouvoir discuter avec vous de la probabilité de la vente de l'œuvre.

— Si, bien évidemment, celle-ci est une originale.

— Peu de doute. Mais, pourrions-nous convenir d'un rendez-vous en déjeunant ?

Œuvre d'art T.I - La muse Où les histoires vivent. Découvrez maintenant