13/03/2133, 3h42.

12 1 0
                                    


Ce qui s'est passé depuis hier soir est arrivé si vite que j'ai l'impression d'avoir vécu l'équivalent d'un mois en un jour. Les événements se sont enchaînés à une vitesse angoissante quand j'y repense. Tout a démarré à la fin de ma garde au centre. Je me suis rendue au repère du King pour lui faire un compte-rendu de ce que Filia m'avait confié hier. Je lui ai fait part de son accord et c'est sûrement là que tout a dérapé.

- Super, nous opérerons ce soir ! A-t-il répondu

J'étais un peu perdue, alors je lui ai demandé de développer. J'étais sûre que nous ne pouvions pas extraire Filia ce soir, sans plan, sans idée précise de ce que nous allions faire. Le King a alors cherché à me rassurer en m'assurant qu'il avait fait des tas de recherches. Et effectivement, c'était le cas. Il avait repéré les gardes des droïdes et effectué toutes les recherches possibles sur les puces de géolocalisation. On ne peut en réalité en trouver qu'à certains endroits du corps car sinon, il leur est impossible de se connecter à un satellite. Puis, une fois que l'on savait ça, il ne restait plus que l'omoplate, le genou, le dos de la main et le dessus du pied. Comme les puces implantées sur le pied et la main sont moins sûres de fonctionner correctement, cela nous donnait une chance de trouver.

Par la suite, il m'a montré des schémas, et nous avons passé plus d'une heure à construire le plan. Il était très simple : je retrouvais Filia, je l'aidais à enlever ses puces et on filait avec ma voiture jusque ici. Ça aurait dû fonctionner.

Après l'avoir répété une petite centaine de fois, réglé tous les moindres détails, en passant de l'itinéraire à l'heure et au temps que devrait prendre chaque geste, j'étais fin prête à partir. Malgré mes membres tremblant d'appréhension et d'excitation, je me sentais innocente, et nullement dans la peau d'une future criminelle. Je m'apprêtais à sortir du sous-sol, oreillette vissée dans l'oreille, pour faire un tour en ville avant de passer à l'action. Le King m'avait convaincue que c'était ce qu'il y avait de mieux à faire. Pourtant quand j'eus à peine fait trois pas il m'a rattrapé. Sa bonne humeur, que je n'avais pas encore vu quitter son visage, venait de déserter ses traits.

- Écoute, il y a juste un problème. Tu vas devoir quitter ta vie, toi aussi... Il y a des caméras partout et je ne peux pas les couper éternellement. Ils vont nous retrouver si tu n'enlèves pas ton I.D., Zala. Si tu veux sauver cette petite, il faut que tu passes de l'autre côté, que tu deviennes Fuliste toi aussi.

Sa voix était aussi grave que sa mine, j'ai compris qu'il ne plaisantait pas. J'étais si déterminée à libérer Filia... je crois que je n'ai pas réfléchi plus de deux secondes avant d'accepter, le temps d'avoir une pensée pour Mila. Je suis persuadée que c'est ce qu'elle aurait voulu faire, et elle l'aurait fait. Je veux réaliser ce qu'elle n'a pas pu faire pour honorer sa mémoire et ne pas regretter toute ma vie de ne pas avoir sauvé quelqu'un quand j'aurais pu le faire.

Après avoir circulé pendant une demi-heure dans les rues de la ville, et avoir longuement admiré tous ces jeunes enfants si innocents face à la vie, face à l'ampleur de la maladie qui plane au-dessus de leur tête à chaque instant, j'ai eu envie de l'être moi aussi, naïve. J'ai eu envie d'aller les rejoindre, de retomber en enfance, d'aller jouer dans le jardin, de m'amuser tranquillement avec ce bébé qui venait juste de naître, ma petite sœur. Ou même plus tard, lorsque je lui apprenais à faire du vélo, que l'on jouait à la poupée et que notre seule inquiétude était de savoir s'il allait faire beau pour pouvoir jouer au ballon dans le jardin. Ce qui me manque le plus de cette époque, c'est cette famille que nous formions. Cette belle petite tribu,où tout le monde était joyeux et n'avait aucune raison de ne pas le rester, où un simple câlin calmait tous les tracas de la vie quotidienne.

Au plus près des étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant