Chapitre 25

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Itzal frissonna. Où Lucas était-il passé ? Il hésita à se relever davantage. Là, au moins, il était à peu près camouflé par les buissons qui servaient de couvert végétal à cette altitude. Le Messager était-il enseveli sous ces rochers ? Impossible, ses réflexes étaient bien plus aiguisés que les siens.

Le son d'une voix glaciale et cruelle le figea sur place.

–Te voilà enfin... Il y a longtemps que je te cherche.

Lentement, Itzal pivota sur lui-même. La voix était trop lointaine pour lui être adressée. Par contre, sur la nouvelle ligne de crête apparue après l'éboulement, il distingua parfaitement la silhouette qui se découpait devant les nuages gris.

Et les deux ailes rouges dans son dos.

Itzal frémit. Dans quel pétrin s'était-il fourré ? Mais l'homme - non, il n'arriverait pas à prononcer son nom ! – ne s'intéressait visiblement pas à lui.

Il comprit soudain. Une seule autre personne était censée se trouver là. L'Envoyé se déplaça doucement pour avoir une meilleure vue, prenant garde à rester invisible dans les buissons. La fine bruine qui continuait de tomber imbibait peu à peu son uniforme, mais créait aussi un effet de flou sur le paysage. Une aide au camouflage parfaite.

Sur l'autre versant, il découvrit le Messager à terre. Et pas de son plein gré, réalisa Itzal. Son aile droite était prisonnière d'un bloc rocheux.

Le plus incroyable était qu'il avait réussi à sortir sa lame. Mais que pouvait-il faire dans cet état face au terrible Éric aux Ailes Rouges ?

–Nous revoici face à face, Messager.

Les yeux gris du Commandeur se posèrent sur Lucas. Malgré sa position inconfortable, le Mecer restait impassible.

Le Commandeur des Maagoïs dégaina son épée dont la lame noire absorbait goulûment la lumière. Les cristaux de Kloris, cultivés sur le Sixième Monde, Aranel, donnaient des tranchants à toute épreuve. Et plus le cristal goûtait à la saveur du sang de ses victimes, plus il en redemandait.

–Cette fois, tu ne m'échapperas pas.

La lame s'abattit sur Lucas, qui réussit à parer le coup de justesse. Engagé dans un rapport de force loin d'être en sa faveur, le Messager serra les dents pour repousser son ennemi. Étendu sur le dos, il n'avait aucune chance. Il se contorsionna pour s'accroupir, ignorant la douleur qui pulsait déjà dans son aile. Nul besoin d'un Soctorisien pour deviner qu'elle était cassée.

Éric sourit.

–Ainsi tu es encore combatif. Bien. Je vais pouvoir m'amuser un peu dans ce cas.

Il attaqua de nouveau, et Lucas para sans difficulté. Il voulut contre-attaquer, et fit un pas de trop : son aile coincée lui envoya une décharge de douleur. Grimaçant, il recula. Éric se trouvait hors de portée.

–Tu n'as pas le bras assez long. Dommage.

Le regard bleu-acier de Lucas se durcit, impressionnant Éric. Quelle froideur ! Un bloc de glace était capable d'exprimer plus d'émotions.

–Ne crois pas la victoire si facile pour autant.

–Impudent ! Comment oses-tu ? Tu n'es qu'un misérable insecte, et je vais te clouer au sol pour de bon !

Rageur, le Commandeur attaqua avec force. Itzal se secoua. Il devait réagir ou Lucas risquait de se faire tuer. Et s'il survivait, il aurait à raconter son impuissance. Hors de question. Non qu'il tienne à affronter le Commandeur, il n'était pas non plus suicidaire, mais il devait exister un moyen de détourner son attention quelques instants. Le temps que Lucas se dégage et que le duel redevienne équitable.

Les Douze RoyaumesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant