Une chouette hulula, brisant le silence de la nuit. Tout était calme dans l'air frais. Aucun nuage ne venait occulter les étoiles présentes dans le ciel, qui associées à la lune émeraude généraient une douce clarté.
Réfugié sur les toits du Temple, Lucas goutait la paix de cet instant. Nul ne viendrait le déranger, ici. Il se sentait seul, désespérément seul, et pourtant ne désirait aucune autre compagnie que la douceur de la nuit. Lika ne serait jamais plus là pour apaiser ses tourments, ou partager ses pensées les plus intimes. Comment retrouver l'envie de vivre alors qu'il ne pourrait jamais partager autant avec quiconque ? Toute relation lui apparaissait désormais superficielle. Plus qu'un vide, c'était un manque. Au plus profond de son âme, quelque chose s'était brisé. Sa vie était réduite à néant.
Alors pourquoi ne trouvait-il pas le courage de mettre fin à ses jours ? Quelle obscure sensation lui enjoignait de s'abstenir chaque fois qu'il posait la main sur son épée ? Une sourde colère l'envahit, qu'il ne chercha pas à dissiper comme il en avait l'habitude. Colère contre lui-même de n'avoir pas su protéger Lika comme il aurait dû ; colère contre son père complice de cette mascarade ; colère contre le Wild qui lui avait enlevé ce qu'il avait de plus cher ; colère contre ses amis dont il refusait la pitié ; et plus simplement, colère contre l'univers entier qui se liguait contre lui.
Une ombre masqua un instant la lune, sans que le Messager, trop concentré sur lui-même, ne s'en aperçoive. Trois passèrent encore avant qu'il ne sorte de sa torpeur contemplative. Des réflexes conditionnés par des années d'entrainement ne s'oubliaient pas en un instant. Un nuage n'était pas si rapide. Il fut aussitôt sur ses gardes. Le silence était devenu pesant, comme si la forêt environnante retenait son souffle.
Lucas ne mit que quelques secondes à trouver leur piste. Les arbres avaient bougé sur sa gauche. Un sourire carnassier s'afficha sur son visage, et il se redressa lentement, avant de glisser sur les vents dans leur direction.
Ses pensées se focalisèrent sur ses ennemis, le chagrin céda à la concentration. Il plongea sous le couvert végétal, droit sur sa victime. Elle n'eut pas le temps de crier : la dague du Messager traça un arc de cercle sur sa gorge, et l'homme s'effondra dans un gargouillis.
Le Massilien avait déjà disparu dans les ombres, à la recherche d'un nouvel adversaire. Il n'avait aucune idée de leurs buts et de la raison de leur présence en ces lieux. Leur uniforme gris étoilé de rouge était une preuve suffisante de leur appartenance aux troupes d'élite de l'Empire. Les Maagoï, sur Mayar...Sûrement une mission capitale pour l'Empire. Sûrement qu'Éric était avec eux.
Lucas ne songea même pas à prévenir Aioros.
Tout problème avait une solution, du moment qu'il tenait une épée entre ses mains.
Il traqua les membres de l'escouade, s'attaquant aux guetteurs, tuant puis s'enfonçant dans les ombres avant que les renforts n'arrivent. L'effet de surprise passé, ils se regroupèrent sous les frondaisons, se montrant plus méfiants. Pourtant, ils tinrent conseil à voix basse, négligeant l'utilisation de signaux d'alerte visibles. Une mission secrète d'infiltration, nota distraitement le Messager. Perché sur une branche, il observait les soldats qui s'agitaient en contrebas. Des ombres qu'il distinguait à peine dans l'obscurité de la forêt. Il en avait déjà éliminé douze. La lame de sa dague était rouge. Des tâches écarlates souillaient ses vêtements en plusieurs endroits, rémanences des coups qui l'avaient atteint. Tous les Maagoïs ne s'étaient pas laissé tuer sans combattre.
L'effet de l'adrénaline s'estompait déjà, et son corps fatigué demandait du repos. Il ne pouvait l'écouter. Seule l'action, et le frisson du combat, lui permettaient d'oublier un moment la douleur sourde qui vrillait son esprit.
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Les Douze Royaumes
FantasySatia est une jeune fille issue du Douzième Royaume. Elle étudie à l'Académie de Valyar, sur Sagitta, la plus prestigieuse de la Fédération. Là-bas, nul ne connait son passé. Elle dissimule soigneusement ses origines pour mener une vie ordinaire, ou...