Ush ROWTAG T1 : Monstres inattendus

7.2

J'étais sur la bonne voie pour détester la magie.

Je ne flottais pas mais je n'étais pas non plus debout comme j'aurai pu l'être dans un beau rêve. J'étais entourée de noir et mon corps physique n'existait pas. Seul ma conscience subsistait dans ce lieu, et ça avait un aspect très bizarre, très céleste. J'aurais pu croire que j'étais morte, mais je n'étais pas stupide : si je pensais que je n'étais plus, c'était que je ne l'étais pas.

J'avais eu deux années de souffrances pour le comprendre.

Je sentis une autre présence. J'essayai de la visualiser mais ce fut impossible. Elle m'oppressait, me rendant malade. J'étais bien sans elle, je voulais qu'elle disparaisse. Et maintenant.

-Qui est là ?

Rien ne me répondit. Puisque tout ce jouait à un niveau autre que physique , je me concentrai , essayai d'envoyer ma question avec mon esprit et non pas avec ma parole.

L'endroit fut moins noir, la pression moins oppressante, et un corps apparut. Enfin, plutôt une apparence, comme une ombre. Humaine, elle semblait attendre quelque chose. Si la présence pouvait se créer un corps, j'en voulais un aussi. Je m'imaginais avec le maximum de défauts possible, ne souhaitant pas embellir la réalité. J'eus l'impression de tomber en premier lieu puis d'être enfermée, d'être bloquée. En regardant à gauche à droite, je compris que j'avais eu accès à un physique. La main au niveau de mon regard, je pus constater que mes doigts étaient cassés.

Bon.

Je devrais m'estimer heureuse de ne rien ressentir. Lorsque j'affronterais la réalité, ça risquerait de piquer un peu. Je me préparais mentalement à cette épreuve en me focalisant sur l'ombre. Je n'avais toujours pas de réponse.

-Êtes vous la magie de l'antre ?

-NON ! Explosa l'ombre.

Elle s'agita dans tous les sens, prenant de plus en plus d'espace, sa taille devenant de plus en plus impressionnante au fur et à mesure de sa contrariété. Moi, je ne comprenais pas. Si la forme humanoïde n'était pas la magie de l'antre, qu'est ce qu'elle pouvait être ? Elle ne pouvait pas être celle d'un alter-humain, puisqu'il n'y en avait pas eu une seule trace dans la pièce. Elle ne pouvait pas être la mienne puisque je n'étais pas magique.

L'ombre s'avança brusquement vers moi faisant des grands pas avec ses grandes jambes. Elle devint de plus en plus menaçante , ses mains étant devant elle comme si elle voulait me prendre par le cou. Aussi étonnant que cela puisse être , je n'avais plus aucune envie de reculer face à quoique ce soit.

Moi, blasée ? Non, juste mentalement fatiguée.

Elle s'arrêta lorsqu'un de ses doigts se posa sur ma gorge. Elle n'avait pas de bouche, pas de nez, pas de yeux et pourtant je la sentis me regarder sous toutes les coutures respirant devant mon visage. Je n'appréciais pas me faire souffler dessus mais je n'avais -apparement - pas mon mot à dire. Elle prit une décision : encadrant mon visage de ses immenses mains, elle approcha son visage pour rugir . L'onde de son cri brisa mon audition, et je hurlai de douleur à mon tour.

Ce fut à travers son braillement que je sus qui elle était. Des images et des sons s'imposèrent dans mon esprit, m'implantant des souvenirs qui n'étaient pas les miens. L'ombre était l'âme du  vieux livre. Plus qu'ancien, il appartenait à la vieille bique. Et il voulait que je me lis à lui.

Le vacarme de l'âme du livre se termina brutalement. Ma tête allait exploser, envahie par des images qui n'étaient pas les miennes. Je mis longtemps pour mettre de l'ordre dans mon esprit. Le bouquin était un livre où de vieilles runes, d'anciens sorts et formules y étaient entreposés. Des runes étaient comme des sortilèges, sauf qu'ils n'étaient possibles d'en poser que sur des objets et qu'ils étaient plus des symboles qu'autre chose. Protection, mort, conseil... leurs utilisations étaient diverses. Mais plus les runes étaient puissantes, plus l'utilité était infaillibles. Les runes demandaient au poseur quelques sacrifices, et contrairement au sorts, ils prenaient sur le poseur.Perte de vue, moins de concentration magique...