Chapitre 8 : Chabawck, vingt ans plus tôt. (2/3)

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Jalia s'approcha pour observer. Festor préféra la retenir, on ne savait pas encore à quoi ressemblait le propriétaire des lieux. Quoique, d'après la misère ambiante, il ne devait pas être très dangereux. La jeune stoltzin réagit comme un enfant auquel on aurait retiré son jouet et se mit à bouder.

L'apparition du chaman l'effraya, elle se blottit contre son compagnon. Le soldat la rassura de quelques paroles apaisantes, mais elle ne quitta pas les bras protecteurs aussi longtemps que le bawck resta devant eux. Le sorcier les dévisagea un instant, puis il souleva un pan de la tente et leur fit signe de le suivre à l'intérieur.

Deirane n'avait aucune idée de l'intérieur d'une tente bawck, elle ne s'attendait certainement pas à ce qu'elle vit. Ce peuple avait l'air fruste, elle les croyait peu civilisés, pourtant tout était rangé avec soin. Elle remarqua ce qu'elle n'avait pas vu de l'extérieur. Les peaux étaient cousues pour former un ensemble indivisible. Contre les parois, des poches contenaient tous les biens du bawck. Aucun d'entre eux n'était cassable ou volumineux, il n'y avait ni poteries ni marmites. Par contre les petits outils, couteau, serpette, machette, hache et d'autres qu'elle ne put reconnaître abondaient. Les liquides étaient contenus dans des outres étanches.

En y réfléchissant bien, les lieux étaient adaptés à une vie nomade. Le sol était en cuir, le seuil surélevé et les coutures étanches en faisaient une protection efficace contre les mortelles pluies de feu. Et pour le transport, il suffisait d'enlever la charpente et la tente se transformait en un gigantesque sac. Elle doutait que les tentes des autres bawcks soient aussi bien organisées. Cependant un chaman, par son métier, avait beaucoup de choses à transporter et ne possédait aucun esclave ou concubine pour l'aider dans cette tâche. Il ne pouvait se permettre, contrairement au chef de la horde, de posséder beaucoup de biens.

Il n'y avait aucun coussin pour apporter un certain confort. Juste une natte, pour le moment roulée, pour dormir.

Le bawck s'assit en tailleur, face à l'ouverture, et les invita à l'imiter. Festor fut le premier à le faire, suivi de peu par Deirane. Jalia, prudente, s'installa avec beaucoup d'hésitation entre le stoltzen et l'humaine, rassurée par leur présence à ses côtés. Jensen mit plus de temps à se décider, il s'assit finalement auprès de sa fille.

Pendant un moment, ils se dévisagèrent en silence, personne ne prononçant le moindre mot. Ce fut le bawck qui entama la conversation.

Kefupae xe ukeiden, commença-t-il.

La voix était gutturale, la prononciation étrange, néanmoins les mots étaient parfaitement reconnaissables. Il venait de les saluer en helariamen.

Ekfupae le ukeiden, sivsen bawck, répondit Festor.

Le bawck hésita un long moment avant de continuer.

— Skayt n'est pas prêtre, Skayt est chaman.

Ce coup-ci, il s'était exprimé dans la langue de l'Yrian, qu'il semblait mieux maîtriser que l'helariamen.

— L'équipage qui se tient devant Skayt est bien étrange, reprit-il, quelles circonstances unissent un grand maître de l'Helaria et un paysan de l'Yrian.

— Les hasards des rencontres, répondit Festor.

— Qui est le chef ?

— Nous n'avons pas de chef, intervint Jensen, notre groupe n'est que de circonstance.

— Comment Skayt peut-il s'adresser à ses hôtes s'il ne sait pas qui parle pour le groupe ?

Festor fusilla Jensen du regard, avant de répondre.

La Paysanne (La malédiction des joyaux - livre 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant