Chapitre 37 : Sernos, de nos jours. (3/5)

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Menjir ne s'installa pas, comme cela était la coutume dans d'autres royaumes, en bout de table, mais au centre du long côté. Vespef, invitée d'honneur, fut placée à sa droite et Deirane à sa gauche. En face d'eux, quelques nobles à la conversation agréable prirent place. Les autres convives furent disposés tout le long de la table. Aster et Hester se retrouvèrent presque à une extrémité, l'un à côté de l'autre.

Les plats qui arrivèrent étaient typiquement helarieal. Ils différaient cependant de ce qui se pratiquait dans la Pentarchie à la fois par le volume et la présentation. Les stoltzt mangeaient peu et les parts étaient relativement peu copieuses. Ce n'était que très récemment, avec l'arrivée des Nouveaux Peuples, que les portions avaient augmenté, les humains avaient des besoins plus élevés. Et ils avaient l'habitude de disposer les plats au centre de la table où chacun pouvait piocher à sa guise alors qu'en Yrian ils étaient amenés au fur et à mesure par un défilé de domestiques qui ressemblait à une chorégraphie.

Alors que le premier plat arrivait, un noble se pencha vers Deirane.

— Ainsi, vous êtes la célèbre Serlen aux mille diamants.

— Je ne sais pas s'il y en a mille, répondit Deirane, mille pierres sûrement.

— J'ai longtemps cru que c'était une légende, que vous n'existiez pas.

— Plut aux dieux qu'il en eut été ainsi.

— Vous auriez voulu ne pas exister ?

— J'aurais voulu ne pas être comme je suis.

— Je vois. Votre tatouage vous a apporté plus de malheur qu'il ne nous en échoit généralement.

— Bien plus que vous ne pouvez l'imaginer.

— Dans ce cas, je ne vous donnerai pas le déplaisir de vous demander de me le montrer.

— Je ne vous le montrerais pas de toute façon. J'ai passé l'âge de ce genre de privauté.

— Vous êtes sévère avec vous-même. Peut-être n'avez-vous plus la fraîcheur de la prime jeunesse, la maturité a ses charmes aussi, parfois bien supérieurs. Vous êtes une très belle femme, plus belle que beaucoup de femmes bien plus jeunes

Deirane aurait dû être habituée tant ce compliment lui avait été fait souvent. Pourtant, elle ne put s'empêcher de rougir.

— Je vous remercie, dit-elle.

Le noble joua un instant avec son couteau avant de reprendre.

— Je pense malgré tout qu'il y a eu des moments positifs dans votre vie. En vingt ans, vous avez dû faire des choses extraordinaires.

Deirane réfléchit un instant avant de réponse.

— Les voyages, dit-elle enfin, j'ai beaucoup voyagé, j'ai visité quasiment tous les royaumes à l'est d'ici.

— Et qu'y avez-vous vu ?

— Des cultures différentes. Des villes qui n'ont rien à envier à Sernos hors la taille. Des gens, aussi différents de vous et moi que votre roi l'est de la pentarque.

— Surprenant, j'avais toujours considéré que les royaumes de la vallée de l'Unster représentaient le sommet de la civilisation.

— C'est le cas. Sernos est une ville majestueuse, digne d'être une capitale impériale. Et un jour certainement, l'Yrian pourra être qualifié d'empire. Kushan ne manque pas de charme avec ses canaux et ses ponts. D'autres villes secondaires, comme Elmin, ne sont pas à dédaigner non plus. Jimip en Helaria n'est pas une belle ville, c'est sa bibliothèque – la plus grande du monde – et sa communauté de savant qui sont réputés. Il existe aussi quelques perles en dehors de notre vallée. Shaab, par exemple, est en train de se couvrir de palais majestueux, à la mesure de la nouvelle richesse de ses commerçants. Nous avons là une future lumière de notre monde, si la guerre qui l'oppose à l'Helaria en laisse quelque chose. Nasïlia même, un mélange de culture edoriane et gems, est plus que surprenante ; elle possède un genre de beauté étrange qui mérite d'être vu. Et Lynn, la capitale de la Nayt a été entièrement conçue comme un monument. Ce n'est pas la plus grande ville du monde, par contre c'est certainement la plus belle.

La Paysanne (La malédiction des joyaux - livre 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant