Chapitre 14 : Boulden, de nos jours. (2/2)

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Les explications de la pentarque donnèrent à Deirane un air de chien battu.

— Sauf si son propriétaire s'installe dans un territoire qui a interdit l'esclavage.

La remarque de Saalyn lui redonna espoir.

— Si l'individu est bien celui que je pense, son domaine est au nord de Sernos.

— Avec un peu de chance, il pourrait même nous faciliter les choses et déposer son esclave dans un de nos consulats, lança Muy d'un ton sarcastique. Réfléchis un peu. À l'heure actuelle, la moitié de la ville doit savoir que tu nous as rencontrés hier. Dans son esprit, les chances que nous nous lancions à ses trousses sont loin d'être négligeables. En conséquence, il va s'arranger pour ne jamais tomber dans le cadre de notre juridiction. Ne compte pas le retrouver à Sernos.

— Muy, tu nous as convoquées uniquement pour saper le moral de Deirane ?

La petite stoltzin baissa la tête comme prise en faute.

Muy ouvrit un tiroir de son bureau d'où elle sortit un dossier qu'elle posa devant elle.

— Tu as un fils très persuasif, reprit-elle, il est venu me parler hier soir.

— Je ne pensais pas que vous l'écoutiez, vous...

Deirane hésita. Le regard de Muy pétilla d'amusement.

— Tu pensais que mon partenaire accaparait toute mon attention. Ce n'était pas le cas. Dans un lieu public en territoire hostile, j'ai appris à être attentive à ce qui m'entoure.

Elle ouvrit le dossier. Dedans il n'y avait qu'un parchemin. La pentarque le prit et le tendit à Deirane. Il était rédigé en langue de Sernos, la langue natale de l'humaine. De toute évidence, le scribe n'avait pas l'habitude de manipuler les cursives humaines, c'est pour elle qu'il avait été écrit.

C'était un avis du représentant bancaire d'Helaria en Boulden. Deirane le lut d'une traite.

— C'est le nom de l'acheteur ! s'écria Deirane. Lergerin Aldower. En vingt ans, je n'ai jamais su son nom.

— C'est le maximum que je puisse faire. Il faudra t'en contenter.

— M'en contenter ? Avec ça, je vais pouvoir le pister où qu'il se cache.

S'il n'y avait pas eu d'obstacle entre elles, Deirane aurait sauté au cou de la petite femme et l'aurait embrassée. Vu la réputation de cette dernière, il était heureux que le bureau fût là.

— Je vais vous envoyer Hester, dit Deirane, peut être pourra-t-il négocier le prêt de quelques soldats.

— Pour que je m'oublie au point de te confier une troupe, il faudra que ses talents aillent au-delà de la négociation, dit-elle en riant.

— Il a des chances de réussir ?

— Jusqu'à présent, personne n'a réussi. Mais que cela ne l'empêche pas d'essayer.

Muy redevint brutalement sérieuse. Elle referma le tiroir d'un mouvement brusque.

— Maintenant, vas-y, sauve cette fille, dit-elle. Je ne peux pas t'aider, tu as néanmoins toute ma sympathie.

— Merci.

Deirane se leva, imitée par Saalyn. Elle fit quelques pas en direction de la porte, tout en repliant soigneusement le parchemin. Juste avant de sortir, elle se retourna.

— Il n'y a vraiment aucune chance d'avoir une troupe, demanda-t-elle

— L'acheteur n'a commis aucun crime en Helaria ni dans aucun territoire où nous avons des accords, répondit Muy, je suis désolée.

La Paysanne (La malédiction des joyaux - livre 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant