- C'est la prof dont on est le plus proches. Peut-être qu'elle nous écoutera sans nous prendre pour des fous, qui sait ?
Sur l'escalier qui les menait au troisième étage, les L conversaient allègrement.
Après un instant de réflexion, Mara répondit à Zélie.
- De toute façon, ça ne coûte rien de lui en parler. Mlle Tirso-Molinier ne nous jugera pas pour si peu, dans le cas où on arriverait pas à la convaincre...
Ils gagnèrent rapidement la salle de littérature anglaise. Voyant que la porte était déverrouillée, ils entrèrent. Quelle ne fut pas la surprise générale lorsque leur professeure les accueillit. Elle qui arrivait d'ordinaire systématiquement en retard, voilà qu'elle était entrée en avance afin de préparer son cours. D'une voix tremblante, elle les salua.
- Hello, students...
Lui répondant de concert, les Littéraires mirent les tables en rond comme ils en avaient l'habitude, et prirent place. Martha allait ouvrir la bouche pour lui parler de leurs...expériences, mais elle se ravisa lorsqu'elle remarqua la pâleur et le tremblement des mains de Mlle Tirso-Molinier. Elle changea de script.
- Tout va bien, madame ?
Lentement, elle leva les yeux vers ses élèves.
- Je... Je ne sais pas trop... Je crois... avoir fait un rêve étrange...
Intriguée, Martha insista. Alors, leur professeure leur raconta tout. Stupéfaits, ils se regardèrent tour à tour. Ce fut Martin qui brisa le silence.
- Êtes-vous sûre qu'il s'agissait d'un rêve ? Je trouve que les détails sont trop nombreux pour que ça en soit un.
- Je ne sais pas trop... Toujours est-il que quand j'ai ouvert les yeux, c'est comme si rien ne s'était passé... C'est vrai, c'était tellement réaliste... Vous devez me prendre pour une junkie, pas vrai ?
Simultanément, la classe eut un petit sourire en coin. Simone lui répondit :
- Vous savez, si l'on vous racontait ce qu'on a vécu ces derniers jours, vous ne nous croiriez probablement pas non plus...
Et elle lui raconta tout. Du séisme au suicide de Mme Qualach devant leurs yeux, en passant par le rôle qu'avait joué Dominique dans leur compréhension des événements. Lorsqu'elle eut fini, Mlle Tirso-Molinier la fixa quelques secondes sans mot dire, puis s'adressa à l'ensemble de la classe.
- Vous voyez, s'il ne m'était rien arrivé aujourd'hui, je vous aurais simplement ri au nez en me moquant de Sacha et de ses pains au chocolat. Mais bizarrement, au vu de vos mines déterminées et aux détails que vous m'avez fournis, je vous crois, aussi bizarre que cela puisse paraître. Mais si je comprends bien, si ce que j'ai vu tout à l'heure est réel, ça signifie que Sacha est...ici ?
Avant que quiconque n'ait pu répondre, un applaudissement sonore retentit, semblant venir de partout à la fois. Comme par magie, Sacha se matérialisa à l'autre bout de la pièce. Interrompant ses applaudissements, il s'adressa directement à eux.
- Salutations, camarades. La forme ?
Partagés entre l'hésitation et la stupéfaction, les L se regardèrent tour à tour, hébétés. Sacha fronça ses sourcils broussailleux. Il mit ses poings sur sa taille et poursuivit, d'une petite voix :
- Hé, c'est malpoli de m'ignorer. Vous savez que je peux me vexer très rapidement.
Clignant frénétiquement des paupières, ce fut Simone qui, la première, lui répondit.
- Sacha... Qu'est-ce-que tu nous veux...?
Celui-ci se contenta de sourire. Il écarta les bras.
- Un peu plus de joie, s'il vous plaît. Je pensais que vous seriez tout de même plus heureux de me revoir...
Sulfurique, Fabiola lui répondit du tac-au-tac :
- Tu comptes t'arrêter où, sérieux ?
Élargissant son sourire, il lui répondit :
- Tiens, Fabi. Alors, ça t'a fait plaisir de frapper Marguerite? Tu as pu décharger tes pulsions d'animal en rut ?
- Ta gueule. Ne m'appelle pas comme ça.
Il croisa les bras.
- Oh, j'ai peur. Regarde, j'en tremble.
Sans réfléchir, elle se jeta sur lui. Étrangement, il ne réagit pas. Cependant, à l'instant où elle allait le percuter, le bruit sonore d'un corps qui percute un mur se fit entendre. Tout le monde dut se rendre à l'évidence : elle lui était passée au travers. Alors qu'elle se relevait, les yeux ronds, il se racla la gorge.
- Assez de trivialités, entrons dans le vif du sujet. Fabi, je sais que c'est dur pour toi, mais essaie de m'écouter, toi aussi. Sache également que tu n'es pas en capacité de me faire le moindre mal, alors économise ton énergie, tu en auras besoin.
Les poings serrés, l'intéressée reprit place en face de Sacha, fulminante. Si les autres étaient stupéfaits de ce qui venait de se passer, ils n'en montrèrent rien.
Pâlissant davantage, Mlle Tirso-Molinier jeta alors un oeil vers la porte, avant de se figer net. Celle-ci avait disparu. Sacha capta son regard.
- Oh, inutile de songer à vous enfuir. Je crains que ce ne soit trop tard... Bref, revenons à nos pains au chocolat. Vous êtes 7. Et devinez combien je suis censé avoir de cardinaux ?
Retenant son souffle, Zélie répondit :
- ..7. Je le sens mal...
- Exact. 7 cardinaux. Mais heureusement pour vous, ça n'a strictement aucun rapport, en fait. En réalité, je vais juste vous faire passer un dernier test.
Mara s'indigna.
- Un "dernier test" ? Avant quoi ? Et pourquoi "dernier" ?
Un sourire carnassier se dessina sur le visage de Sacha.
- Oh, croyez-moi, vous saurez tout en temps voulu. En attendant, laissez-moi au moins m'amuser un peu avec vous.
Sous le regard médusé de ses camarades, il claqua des mains. Aussitôt, l'air sembla se déformer, alors que les L et leur professeure se virent chuter dans un maelström de couleurs et de textures psychédéliques. Quand le sol se matérialisa sous leurs pieds, ils se remirent psychologiquement de la chute avant d'aviser leur environnement. Ils étaient face à un grand édifice en pierre sombre, lequel était doté d'un large porche.
Aussi fou que cela puisse paraître, derrière eux, il n'y avait rien. Le vide. Rien d'autre qu'un rideau de noirceur et de néant, qui semblait plonger vers les profondeurs du Tartare lui-même.
La voix de Sacha retentit alors au dessus d'eux, omnipotente.
- Ce labyrinthe sera votre ultime test. Votre objectif est simple : atteindre la sortie. Bonne chance. Ah oui, j'ai failli oublier de vous dire : il y a de très fortes chances que vous ne sortiez jamais d'ici, ou alors sous la forme de dés de jambon de pays. Bon allez, on se retrouvera à la sortie... ou pas.
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Histoire d'une Ascension
ParanormalPremièrement, sachez que cette oeuvre est un mélange assez étrange entre épique, humour noir, et détournement de clichés. Si vous êtes sujet à des crises d'épilepsie, je ne réponds de rien. Ensuite, vous est-il déjà arrivé de vous dire que notre mon...