Déterminées, Simone et Martha n'attendirent pas que le mur se referme derrière elles pour se mettre en marche. Très rapidement, elles atteignirent donc une vaste salle, n'ayant pas rencontré d'obstacle particulier sur le chemin. Aussi étrange que cela puisse paraître, la salle en question ne semblait pas avoir de plafond, seulement un grand trou au travers duquel s'élevait une tour en ruine, dont le sommet plongeait dans les ténèbres.
Des flaques d'un goudron visqueux couvraient également le sol de la pièce, arrachant à Martha une grimace de dégoût. En silence, celle-ci s'approcha de la tour, et contempla sa structure délabrée qui s'enfonçait dans l'obscurité. En dépit de son état, elle semblait tenir parfaitement en place, et semblait presque mettre les deux comparses au défi de la gravir. Simone s'avança également, puis fit le tour de la structure. Bien que de diamètre modeste, la taille de celle-ci demeurait inconnue. Elle se tourna alors vers Martha.
- Qu'est-ce qu'on fait ? Vu la situation, je crains qu'on n'ait pas d'autre choix que de la gravir, mais... comment te dire qu'elle semble encore moins stable que l'état psychologique du dirigeant nord-coréen...?
Avisant un petit porche qui devait en être l'entrée, Martha lui répondit :
- Comme tu viens de le dire, on n'a pas d'autre solution. Allez, viens. On y va.
A la suite de sa camarade, Simone entra donc dans la tour. L'intérieur de celle-ci était en accord avec l'extérieur : architecture romaine, murs craquelés et délabrés. Un escalier en colimaçon, prenant tout l'espace disponible, serpentait au-dessus d'elles. Tant bien que mal, les filles commencèrent donc leur ascension à la lumière des torches accrochées au mur. En effet, en dépit de la présence systématique de fenêtres de style "antique", la seule lumière disponible était celle des flambeaux, l'extérieur s'assombrissant de plus en plus à mesure que Simone et Martha montaient. Au bout d'une dizaine de minutes, elles firent une drôle de constatation : tandis qu'elles gravissaient les marches, les lumières qu'elles avaient laissées derrière elles s'éteignaient progressivement, les empêchant ainsi de situer leur progression par rapport à la base de la tour. Alors que l'ascension se poursuivait calmement, les deux comparses commencèrent à remarquer l'apparition de flaques de goudrons sur les murs et le sol, les mêmes qu'elles avaient vues devant la tour. Masquant leur dégoût, elles poursuivirent leur chemin, malgré les flaques qui se faisaient de plus en plus grosses et nombreuses. Au bout d'un certain temps, elles en étaient arrivées à un point ou le goudron était si éparse qu'il gouttait systématiquement des marches au-dessus d'elles, si bien qu'elles devaient y aller avec précaution pour ne pas se faire toucher par celui-ci. Au bout d'une bonne demi-heure d'ascension, et alors qu'elles n'avaient plus d'autre choix que de patauger dans le goudron, Martha s'arrêta, haletante.
- J'en peux... plus... On fait... une pause...?
Simone, qui n'avait pas davantage de souffle, accepta de bonne grâce. En fait, elle n'attendait que ça. Elles s'assirent donc sur le rebord d'une fenêtre, lequel était miraculeusement épargné par le goudron. Simone prit la parole :
- Tu penses qu'on en a encore pour longtemps ?
- Aucune idée. Ce foutu escalier en colimaçon nous empêche de voir le sommet, si seulement j'étais contorsionniste...
Subitement, Martha sentit quelque chose lui frôler le dos, lequel était exposé au vide extérieur. Instinctivement, elle sauta à terre, s'éclaboussant au passage de goudron visqueux. Simone arqua un sourcil. Cependant, avant qu'elle n'ait eu le temps de s'interroger, un cri à glacer le sang retentit au dehors, la faisant vaciller en avant. Heureusement, Martha la rattrapa in extremis, lui évitant de chuter tête la première dans le goudron et de ressembler à Martin Luther King. La seconde suivante, une main griffue agrippa le rebord de la fenêtre par l'extérieur, puis sembla tâtonner à la recherche de quelque chose. Ne trouvant rien, elle se retira, et repartit en ce qui semblait être des battements d'ailes saccadés. En état de choc, les deux filles reprirent donc leur ascension silencieusement, pataugeant un peu plus à chaque pas dans la glaise visqueuse . Au soulagement général, elles finirent par apercevoir, une vingtaine de marches plus loin, ce qui ressemblait à une trappe. Franchissant les quelques marches qui les en séparaient encore, elles hésitèrent lorsque celle-ci fut à portée. En effet, c'était de là que semblait venir le goudron, qui s'égouttait petit à petit de la trappe. Résolument, elles poussèrent celle-ci de concert, qui finit par s'ouvrir dans un grincement. Elle s'avancèrent donc au travers de cette dernière, découvrant une vaste pièce au colonnes anciennes et dominée par un trône en pierre, duquel semblait directement s'écouler le goudron. Sur celui-ci, une statue en basalte représentant Sacha était en position assise. Méfiantes, les filles s'approchèrent de celle-ci, et constatèrent que la statue avait de multiples lames plantées dans le torse et le dos, en contraste avec son visage impassible. En regardant de plus près, elles purent également constater que c'était des trous creusés par les lames dans la pierre que semblait s'écouler le goudron, comme une hémorragie. Poussée par une intuition inexplicable, Martha entreprit donc de retirer les épées une à une, suivie par Simone. Et en effet, il semblait que cela fonctionnait : chaque lame retirée faisait s'arrêter l'hémorragie de la plaie concernée. Les lames les plus compliquées à retirer furent les épées plantées dans le dos, dont l'angle difficile d'accès força Simone et Martha à conjoindre leurs forces. Enfin, au bout d'une quinzaine de minutes, toutes les épées furent à terre, et le goudron semblait s'être arrêté de couler. Comme pour admirer leur travail, les filles reculèrent et contemplèrent leur labeur, toutes fières qu'elles étaient. Soudain, un grondement se fit entendre, et la statue prit vie. Elle se leva de son trône, la mine impassible, et sembla aviser les deux comparses un bref instant, avant de lever les bras au ciel. Aussitôt, le goudron restant sembla prendre également vie, et se rassembla au centre de la pièce en une masse informe, jaillissant tant par la trappe ouverte vers l'escalier que des quatre coins de la pièce. Petit à petit, le goudron prenait forme et taille humaine. A la fin, seul son visage semblait en perpétuelle métamorphose, oscillant entre divers traits et expression. Au fond de la pièce, la statue de basalte vola alors en éclats, comme submergée par la puissance de cette chose dont elle venait elle-même de commanditer la création. Pétrifiées de terreur et d'incompréhension, Simone et Martha virent distinctement la chose les regarder, puis glisser lentement vers elles. Elle se retournèrent alors vers la trappe, mais celle-ci était close. Alors que la chose ouvrait une gueule noire et béante, comme pour les avaler, elle sembla soudain se raidir, et s'arrêta net, comme coupée dans son élan. Une voix familière retentit alors à la gauche de Martha.
- Ça va ? Vous n'êtes pas blessées ?
Sortie de nulle part, Dominique venait d'arroser la créature de ce qui semblait être de l'eau bouillante, un seau à la main. Regardant la chose avec dépit, elle murmura :
- Ah, j'te jure, Sacha et ses plans foireux...
VOUS LISEZ
Histoire d'une Ascension
ParanormalPremièrement, sachez que cette oeuvre est un mélange assez étrange entre épique, humour noir, et détournement de clichés. Si vous êtes sujet à des crises d'épilepsie, je ne réponds de rien. Ensuite, vous est-il déjà arrivé de vous dire que notre mon...