Sous Nos Étoiles

6 | Mots cachés

Point de vue Cayden

❝ Elle écrivait son sourire à l'encre de nos mots cachés. ❞

J'ai l'impression de me perdre. L'impression d'être perdu dans l'immensité de l'océan, ou encore dans l'insouciance de mes souvenirs. Le sombre de mes soucis semble se transformer en éclaircie. Tout se bouscule, tout s'évince et j'aime terriblement ça.

Quand ce regard se détourne, la lumière tente de s'éteindre. En vain, elle disparaît.

D'un coup d'œil, j'observe cette étrange créature affalée sur sa chaise. Mon regard se porte d'abord sur des bottines à talons pour continuer sa route sur des jambes beaucoup trop fines à mon goût. À peine suis-je arrivé au buste que la lumière qui brille en moi grésille. Pas besoin de lever la tête pour savoir que ses yeux azur sont remontés à la surface. 

Sur ce bleu, pas un bateau qui navigue, pas un pêcheur dans l'eau, seulement ma silhouette égarée. Comme si j'étais seul, j'observe longuement chaque trait et expression de ce visage, au premiers abords inconnu à mon égard. Ses yeux au regard indigo sont saillants et leur couleur me laisse perplexe. Vifs et étincelants, ils me fixent avec ambiguïté et surprise. Élégants, ses cheveux blonds peignés à la raie tentent de prendre possession de son visage tandis qu'elle baisse la tête, gênée. Abondants et fournis, ils pendent jusqu'au commencement de son abdomen.

Cette fille au teint pâle pourrait très bien me demander de regarder ailleurs, de décrocher mon attention mais elle ne fait rien de cela. Elle se laisse engloutir par sa timidité. Tout à coup, tout me semble triste et absent de toute gaieté. J'aperçois du coin de l'œil sa jambe droite taper frénétiquement contre la chaise à un rythme saccadé. Ses mains frêles et étonnamment douce à l'œil s'accrochent de toutes leur force au rebord râpeux du siège. Tandis que j'observe ses phalanges blanches et son visage privé de toute lumière, une bouffée de chaleur m'envahit.

— Salut. 

Je me tape intérieurement la tête. Un sentiment honteux m'envahit quand je me rends compte que je suis ridicule. Elle fixe étrangement ma main en l'air ne daignant pas à la serrer. Muette comme une tombe, elle se détourne et repose toute son attention sur la piste de danse et ses couleurs multicolore. Je ne sais pas ce qui m'a pris. J'avais espoir qu'elle puisse au moins me répondre et me gratifier un sourire, pour me rassurer moi-même, savoir que je ne suis pas de mauvaise compagnie.

Les minutes passent, je ne saurais compter leur nombre. Mais ce que je sais, c'est que je l'ai regardé un certain temps. Ne pouvant cesser de contempler ses yeux océans, j'ai tout lâché. J'ai arrêté pendant une fraction de seconde de penser ou encore de respirer, le temps que nos yeux se croisent.

Continue Cayden, essaye, souffle ma conscience.

Décidé, je me lève à la hâte pour rejoindre cette foutue table d'inscription. Je me faufile discrètement entre les fêtards en jetant de temps en temps des regards derrière, juste pour savoir qu'elle soit toujours là et que je ne fasse pas tout ça pour rien. Rapidement, j'arpente la table du regard avant de prendre ce que j'ai besoin sous les regards interrogateurs de certains. Quand j'ai ce qu'il me faut, je me retourne à la hâte et essaye de rejoindre l'océan à la nage, en évitant les obstacles sur mon passage.

À mon plus grand soulagement, celui-ci est toujours présent sur sa chaise. Cette étrange fille n'a pas bougé d'un millimètre, sa tête est toujours légèrement baissée vers ses pieds et son faible corps mal positionné sur la chaise inconfortable.