7 | Vertiges lunaires

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Point de vue Avery

❝ Ce soir-là, les étoiles brillaient sous mes vertiges lunaires. Mon cœur chantait. 


Je ne trouve pas la force. Mon trouble préfère voler ma voix plutôt que mon cœur. Si j'ouvre la bouche aucun son n'en sort, seulement le silence d'une triste existence. On ne choisit pas de parler, on se laisse emporter par les émotions pour enfin les transmettre. À défaut de ne pas le faire, je souris bêtement à ce jeune homme. Son regard vif n'arrête pas de me scruter comme si j'étais une étrangère venue d'un tout autre univers. Je n'aime pas attirer l'attention, laisser les gens promener leur âme sur la mienne jusqu'à l'écraser. Mais quand ses yeux ont parcouru mon corps et que sa main a effleuré la mienne, je crois que j'ai aimé. Une créature étrange est née, ses griffes me tordent le ventre à m'en faire souffrir et dès que mon regard se porte sur ce chocolat, une étrange douleur m'incite à regarder ailleurs, pourtant je ne le fais pas. Je me contente de fixer avec émerveillement ses cheveux sombres, presque noirs qui lui tombent sur le front.

J'aime ce jeu de regard, cette balle que nous nous relançons sans arrêt. 

Tu souris.

Sa voix à la fois suave et grave résonne dans ma tête. Une once d'émerveillement trône dans ses yeux tandis que je me force à ne pas les lâcher des yeux. J'aimerais à ce moment-là lui répondre, sentir les vibrations de ma voix et les lui transmettre.

Mais à l'instant même où je tente en vain d'ouvrir la bouche, je suis stoppée dans mon élan. Il a tourné la tête. Son regard s'est égaré ailleurs, loin de moi. Déçue, je me retourne à mon tour. J'espérais, je voulais une nouvelle fois ressentir cette bête, et cette fois-ci pouvoir l'étrangler.

L'écho de la voix rassurante de Serena résonne alors dans la salle : 

Bonsoir à tous, j'espère que la soirée vous plait !

Mon professeur resserre délicatement le micro dans sa main et reporte son attention sur les élèves qui commencent à se regrouper autour d'elle. Il suffit au garçon, présent à mes côtés, une fraction de seconde pour se lever et rejoindre le centre de la pièce. Du coin de l'œil, je ne peux m'empêcher d'observer sa démarche masculine. Sa chemise blanche se froisse suite aux mouvements de son buste, ses épaules larges se soulèvent avec délicatesse et son pantalon noir moule parfaitement les courbes de ses jambes. Ce n'est que lorsqu'il s'arrête devant la même fille que tout à l'heure que mon regard s'échoue ailleurs. 

Je me replace correctement sur la chaise et observe la scène devant mes yeux. Faiblement éclairée, les lèvres de Serena bougent rapidement mais je n'entends rien. Les traits de son visage deviennent de longs contours flous et la musique en fond cesse. C'est comme ça que je me perds, les images s'assemblent pour n'en former que de simples souvenirs douloureux. Les projecteurs utilisés sur la piste m'aveuglent et me force à fermer les yeux, seulement, quand le noir m'engloutis, il n'y a plus de porte de secours. C'est alors que les couleurs se forment, les bords se dessinent et elle apparaît. Je me souviens de ses yeux larmoyants qui me fixent, son sourire triste tandis que ses doigts caressent lentement ma joue. Je me revois, figée sur place à me demander les raisons de sa décision. Le silence me revient, sa puissance me rappelle sa disparition et mon cœur flanche. Sa voix fait écho, ses mots me noient dans la culpabilité, dans l'impuissance.

Lentement, mes paupières se soulèvent. Je ne sais pas ce qu'elle fait là, au beau milieu. Mais je sais qu'elle est omniprésente. Elle est là, dans mes pensées, chaque seconde. Elle se balade entre mes secrets, entre mes pleurs. Malheureusement, elle est bien plus forte. Mes songes sont tellement complexes et subtiles que je ne les comprends plus moi-même.

Sous Nos ÉtoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant