Point de vue Avery❝ Sous un ciel rongé par le désir, les astres se sont divisés. Chacun a retrouvé l'étoile qui l'attendait. ❞
La lumière des projecteurs s'échoue avec violence sur mon épiderme. Les membres affaiblis et la main droite dans celle d'une élève, je me baisse pour saluer le public. Les applaudissements redoublent d'intensité, certains osent même se lever. Happée par ce public rayonnant et admiratif, j'en oublierai presque les danseurs à mes côtés, quittant la scène avec grâce. À contre cœur, j'observe une dernière fois ces sourires encourageants. Ils résonnent en moi, intensifiant la délivrance que je ressens.
Perchée sur mes pointes, mon esprit fredonnait les paroles d'un corps apaisé par cet art tournoyant. Dans chaque geste, j'ai reconnu en moi celle que j'avais autrefois oublié. Au fil de la musique, elle s'est introduite là où les souvenirs altéraient les vives couleurs et j'en ai souris.
Une fois que le rideau se referme devant nous, je m'autorise enfin un regard en direction de Beryl. Le dos droit, son regard se perd dans l'immensité d'un vide apprécié. Sa poitrine monte et descend au rythme de sa respiration saccadée. Les élèves s'agitent autour d'elle mais peu lui importe. C'est comme si elle continuait d'observer les spectateurs malgré le rideau tiré. Dans ses récents souvenirs, elle cherche à nouveau leurs acclamations. Beryl fait partie de ce genre de danseuses, celles qui poursuivent la gloire malgré les nombreux interdits. Et là, devant moi, elle s'en réjouit. Cole ne tarde pas à la rejoindre, un sourire prétentieux collé aux lèvres. Je détourne aussitôt le regard.
Mes pointes me guident d'elles-mêmes vers ma loge. J'abandonne ainsi le théâtre, cet endroit si réconfortant et libérateur pour retrouver mon reflet, celui dont j'ai encore du mal à percevoir la beauté qui s'y perd. À l'abri des œillades indiscrètes, je laisse mon souffle s'échouer avec difficulté sur mes propres pensées. Les minutes défilent comme cela, prisonnières d'un esprit meurtri. Puis, la réalité parvient toujours à m'arracher de celles-ci.
Encore assise devant le miroir, Tessa s'engouffre dans la pièce, le visage illuminé. Elle fonce sur moi et m'étouffe entre ses bras.
— Tu as été merveilleuse, souffle-t-elle à mon oreille.
Fermant les yeux, je profite de ce moment tant adoucissant, j'inhale l'odeur de cette amitié partagée. Mais quand je les ouvre à nouveau, c'est à ce moment-là que je l'aperçois. Figé derrière Tessa, deux iris à la fois sombres et étincelantes s'ancrent aux miennes. Cayden se tient là, les mains dans les poches. Le regard étrangement timide qu'il m'offre me laisse sans voix.
— Tu étais là ? murmuré-je.
Un sourire on ne peut plus envoûtant s'étend sur ses lèvres.
— Je n'ai rien raté.
Sa voix est douce, elle m'enveloppe. Lentement, il s'avance vers moi et au moment où je pense qu'il va me prendre dans ses bras, il en fait bien plus. Avant que ses bras ne viennent m'entourer, ses lèvres se déposent délicatement sur ma joue. Celles-ci frémissent instantanément à ce contact et semblent en demander bien plus. Mes mains rejoignent d'elles-mêmes son cou tandis que les siennes s'amusent avec mon chignon. La tête contre son épaule, rythmée par sa respiration, je ferme les yeux à la recherche d'un sentiment que j'ai maintenant appris à maîtriser.
— Maintenant embrassez-vous, je tiens la chandelle.
Je me détache brusquement de Cayden, à nouveau consciente que Tessa est dans la pièce et que notre étreinte était bien plus longue qu'elle ne le devrait. Adossée contre le mur, ma colocataire nous observe, ses lèvres dévoilant joyeusement ses dents éclatantes. Mon regard se détache d'elle pour retrouver celui de Cayden et je me surprends à sourire. Bien que celui-ci ne semble pas décidé à enlever sa main de mon dos, celle qui effleure lentement et gracieusement la partie de ma peau à découvert, j'oublie toute l'anxiété que j'avais jusque là ressentie. Et c'est ainsi, perdue entre les émotions, que sa voix retentit, suave et troublante :
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Sous Nos Étoiles
Roman pour Adolescents« Ce soir-là, les étoiles brillaient sous mes vertiges lunaires. Mon cœur chantait l'apparition d'un sentiment jusque là négligé. » Elle n'est rien qu'une danseuse à temps perdu, une âme égarée. À l'écoute de son corps, de ses sentiments et de...