Chapitre 17 : Douleur

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Tu me manques.
Tu me manques.
Tu me manques.
C'est horrible de constater à quel point tu me manques... J'aimerais tant pouvoir te le dire. J'aimerais tant pouvoir m'excuser de m'être si mal conduite.
Et plus j'y pense... Plus ma poitrine se serre.

Le ressenti de ses bras autour de moi, le souvenir de ses mains contre mes poignets, la délicatesse de ses doigts sur mon visage. Sa chaleur... Elle toute entière... Son contact me manque désespérément. Je m'en veux d'avoir réussi à m'y habituer en si peu de temps.

Ça fait une semaine.
C'est intenable.

Je m'étonne le matin à espérer revoir son visage souriant. Revoir ses mains gesticuler devant elle lorsqu'elle parle, les yeux levés vers des souvenirs invisibles. Je m'amusais à compter le nombre de fois où elle passait sa langue sur ses lèvres roses, le nombre de fois improbable où elle disait mon prénom depuis qu'elle le connaissait ou encore le nombre de fois où, inconsciemment, elle recoiffait ses boucles sombres et rebelles. Tous ces petits gestes inutiles me manquent. Tout en elle me manque.
Son caractère franc et enfantin ou bien son côté plus mystérieux et monstrueusement séduisant.

Ses mots se répètent indéfiniment dans ma tête. Lorsque ma mère m'appelle, l'échos de mon prénom résonne dans mon esprit, avec la voix de Léa à la place. Comme une répétition qui torture mon être.

"Je t'aime."

Personne ne me l'avait jamais dit dans ce sens. Personne... Ça devrait me laisser indifférente. Je suis sans attache. Je ne ressens pas les choses comme tout le monde. Cette différence me tue... Mais c'est ainsi. Alors ce "je t'aime" qu'elle m'offre... Pourquoi me rend-il si étrange?

Le noir devient bleu et, à bout de souffle, je retrouve le blanc.
Je sors la tête de l'eau, recoiffe mes cheveux vers l'arrière et regarde longuement cette pièce embrumée de ma présence. Je frissonne. Je n'aime pas ça.
Je revois ses yeux azurs, si beaux, si francs, je revois sa bouche rose se mouvoir en deux syllabes bien distinctes. Aucuns sons ne sort d'entre ses lèvres. Et pourtant je sais parfaitement ce qu'elle me dit. Ça résonne.
Doucement, ces mots d'amours devinés de sa bouche muette changent. Il n'y a plus deux mais trois syllabes. Trois mots. J'ai un pincement au cœur. Je frissonne de nouveau. Comme un cauchemar en plein jour.
Aujourd'hui le ciel est bleu.

"Je te hais."

Je me recroqueville sur moi-même. L'eau est encore bonne, pourtant je suis glacée.

"Je sais... Pardonne-moi..."

Il est 12h43.
Ma mère crie "À table!"
Mon père et mon frère lui répondent qu'ils arrivent dans dix minutes, le temps de terminer leurs partie. Incorrigibles. Je descends, la mine basse, dans la cuisine et mets automatiquement la table pendant que ma mère surveille la cuisson du riz.
Robot...

"Ah au fait ! se rappelle ma mère, je ne te l'ai pas dit à toi Chloé !
-Hmm...?
-J'ai invité le maire et sa famille pour le dîner, demain. Ça me semblait tout à fait naturel de les remercier pour leurs accueil chaleureux, tu ne crois pas?
-Hmm. Oui... Cool."

À quoi ressemble la mort?

Ce que vient de me dire ma génitrice ne fait qu'un tour dans mon cerveau. Puis ça rebondit entre tous mes neurones qui semblent se reconnecter, se réveiller, soudainement... Après un petit temps de réaction, je m'exclame :

"ATTENDS ! QUOI !?!
-Le maire... et sa famille... ils vont venir dîner demain, répète ma mère probablement exaspérée de ma lenteur.
-Mais... par "famille"... Tu...
-Sa femme et ses deux filles.
-Ses deux filles...
-Oui... Je ne connais pas la petite dernière mais l'aînée c'est ton amie Léa non?"

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