Chapitre 11

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Jelena Goran/13 novembre 2006

Je déteste la rentrée. J'étais si heureuse, seule chez moi, à passer mes journées à discuter avec Realuka... Même si elle mettait parfois plusieurs semaines, voire plusieurs jours à me répondre et que ça me rendait un peu triste, nos échanges me permettait de m'évader, de rester loin de la réalité... Loin des autres.

Je sais que ces beaux jours sont maintenant derrière moi, et que si je me sentais mieux ces derniers jours, la maladie va bientôt reprendre le dessus ; la souffrance faisait juste une pause.

Je me lève avec peine, me prépare, et ma mère me conduit jusqu'au lycée. Dans la cour, l'ambiance est bizarre ; les gens dévisagent les autres, les groupes chuchotent entre eux. Au début, je crains même d'être la cause de ces étranges réactions.

Je pars me ranger devant la salle de mathématiques, et ne peux m'empêcher de tendre l'oreille.

-T'as entendu ? s'exclame un ami de Zlatko, qui est malheureusement dans le même cours que moi.

-Ouais... soupire un autre élève. C'est chaud...

-Vous pensez que Zlat a réagi comment ?

-Ben... Mal, je pense... C'est normal, c'est quand même son frère...

Je me fige en comprenant de qui ils sont en train de parler.

-Tomber pour trafic de drogue... C'est chaud quand même...

-Vous savez combien de temps il va être incarcéré ?

-Pas trop longtemps, je pense, mais... Ca va pas arranger son casier judiciaire quoi...

Et même si je sais que je ne devrais pas, je ne peux m'empêcher de m'inquiéter pour lui.

Nous rentrons en cours, et je tente de me concentrer... En vain ; impossible de ne pas penser à Mirko.

En a-t-il pour longtemps en prison ? Est-il bien traité ? S'entend-il avec les autres détenus ? Arrive-t-il a tenir le coup... Pense-t-il à moi des fois ?

Un mot lancé sur ma table interrompt mes réflexions.

« ZLATKO VEUX TE VOIR A LA POSE S'EST HYPER IMPORTANT ET TA INTÉRÊT D'Y ÊTRE »

L'heure passe d'un coup plus vite, et seul le bruit continu de l'aiguille sur la pendule, seules les secondes et les minutes qui s'écoulent gardent leur importance ; je fixe cette horloge comme si ma vie en dépendait.

Ce qui n'est peut-être pas si éloigné de la réalité.

La sonnerie retentit, et je prends tout mon temps pour ranger mes affaires.

-Jelena... Je peux te parler ? demande le professeur lorsque nous ne sommes plus que tous les deux dans la pièce.

Il s'avance vers moi, et mes membres commencent à trembler.

-Je peux savoir ce qui se passe ?

-Ri... Rien...

-Tu as passé tout le cours à regarder l'heure, sans prendre de notes, rien...

-Je... Je suis désolée...

Il soupire bruyamment.

-Tu sais, tu ferais mieux de te concentrer et de noter tes cours si tu veux un jour réussir...

Je m'excuse et le silence s'installe. Je prie pour qu'il sorte de la salle avec moi, mais à la place, il retourne s'asseoir à son bureau.

-J'ai énormément de copies à corriger, il faut que je m'y mette dès maintenant... Bonne journée, Jelena !

Je m'excuse une nouvelle fois, roule en tremblant jusqu'à la porte... Et tombe nez-à-nez avec Zlatko.

-Toi...

Il contracte ses poings, et je devine que je vais passer un très, très mauvais moment.

-C'est TOI qui a fait emprisonner mon frère...

-Mais... Mais non, balbutié-je, comment aurais-je pu...

Il me gifle avec une violence inouïe, et je pose ma main sur ma joue en sentant les premières larmes venir.

-Qui d'autre, sinon ? Tu passes ta vie à gâcher la mienne... Par ta simple existence !

-Ar... Arrête, je t'en supplie...

Il me frappe encore, dans le ventre cette fois.

-Toi et toute ta famille... Vous ne méritez pas de vivre...

Il me passe à tabac, et je tente de parer ses coups avec mes bras... En vain, il est beaucoup trop fort pour moi.

-Meurs...

Je me roule en boule, pensant en effet que ma dernière heure est venue ; comment pourrais-je survivre en souffrant à ce point ? C'est... C'est inhumain.

-Pitié...

Il ricane et me met un dernier coup dans le ventre, avant de s'enfuir en courant.

Je pense un instant à faire comme la dernière fois ; me rendre dans la salle informatique, me connecter sur mon skyblog et parler avec mon amie qui, avec un peu de chance, sera en ligne...Mais je reste sans bouger, à me vider de mon sang et des mes larmes ; cette fois, je n'en ai même plus la force.

Nikad Ne Odustati / Luka Modric Où les histoires vivent. Découvrez maintenant