16.

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Une rage que j'écoutais enfin.
Je la laissai m'envahir, sentant sa douce chaleur réchauffer mon corps, guérir mon coeur, afermissant mes muscles.
Je ne fuierai plus. Devant personne.

Lentement, je me sentais tenir sur mes jambes. Je repoussai la main de cette femme, et me dressai de toute ma hauteur. D'un revers de main j'essuyai les larmes qui mouillaient mes joues et chassai celle qui menaçaient encore de tomber d'un alignement de paupière. Je levai enfin les yeux vers elle.

« Mon père était un homme bien. Certainement le meilleur qui soit. Il aidait toujours les gens autour de lui du mieux qu'il pouvait, et ma mère faisait de même. Vous savez vous me faites de la peine madame, declarai-je à mon aïeul. Vous ne connaissez même pas votre propre fils. Vous ne savez pas qui il a été. Est-ce que vous l'avez déjà ne serait-ce que regarder ? Vous êtes vous déjà ne serait-ce que demander comment il allait ?
Je vais vous dire comment était mon père. Mon père était un scientifique. Il cherchait des antidotes et des vaccins contre des maladies graves. Et ma mère était aussi une scientifique, elle ne jouait pas à mettre une blouse blanche. Quant à mon frère, je n...»

Je m'arrêtai nette. La sorcière me fixait, mais quelque chose avait changer dans son regard, on n'y lisait plus une haine pure mais de la peur et surtout du dégoût. Ne comprenant pas ce changement soudain je cherchai Jungkook du regard, il me fit des signes étranges, pointant successivement son oeil, sa main puis moi. Je jettai un regard rapide vers ma main qui avait auparavant essuyer mes larmes et y découvrir avec horreur ma lentille brune. Malgré toute la rage et le courage que j'avais en moi, je ne mis m'empêcher de faire quelques pas en arrière. Ma tete heurta une étagère et une assiette en porcelaine en tomba, sous le regard effaré de mon cousin et de ses parents.

L'assiette explosa au sol mais je n'entendis pas le choc. J'étais déjà dans mes pensées. Je me posais enfin les bonnes questions.
Que j'ai les yeux d'une couleur différente faisait vraiment de moi le monstre qu'ils voient ?
Que je sois plus intelligente que la moyenne devait obligatoirement me mettre en marge de la société ?
Que j'ai les yeux bridés faisait-il de moi une personne moindre ?
Est que ce que disait cette femme sur ma famille devait vraiment changer la vision que j'en avais ?

Toutes ces questions avaient une réponse négative alors pourquoi avais-je trembler et baisser les yeux toute ma vie durant ? Parce que j'avais peur ? Non, parce qu'on m'a élevée comme ça. Après la réaction de ma meilleure amie, j'ai été élevée dans cette optique. Mes parents m'avaient dir de faire ceci ou cela et je leur avait fait confiance les yeux fermés. Mais maintenant j'ouvrais enfin les yeux.

Je fis un pas en avant et le crissement de la porcelaine sous mes pieds me donna un courage farouche, qui me fit dire des choses que je n'aurai jamais pensé dire un jour sur un ton que je n'aurai jamais pensé utiliser un jour.

«Finalement je me fiche de ce que vous pouvez penser, je connais ma famille et ce n'est pas l'avis d'une vieille femme bornée qui va me faire changer d'avis, de plus je n'ai rien a vous prouver. Vous savez, à la base je suis venue parce que ma mère m'avait dit que ça pouvait être une bonne idée. Mais je pense que je suis surtout venue voir quel genre de femme vous êtes. J'étais curieuse à votre propos. Je ne comprenais pas pourquoi mon père ne vous aimait pas. J'aurai pu vous aider, vous rassurer a propos de votre fils, me comporter comme votre petite-fille qui vient vous voir tout les week-ends, mais vous, la première fois que vous m'avez vue, vous m'avez traitée de monstre, vous m'avez insultée moi et ma famille en prime. Vous avez fait des erreurs dans votre vie madame, et l'une d'elle a été de me sous-estimer. Je ne vous aiderais pas, je n'y penserai même plus, vous êtes trop bornée pour ça. Venir ici était une mauvaise idée, et au fond je le savais, je ne reviendrais plus, je vous laisse continuer votre vie et je suis désolée pour le dérangement.»

Je pris mon sac et en sorti l'enveloppe que m'avait donner ma mère avant mon départ et la donna à ma tante.

«Vous êtes une femme formidable, vraiment. Ne croyez pas ce que raconte cette femme, vivez comme vous l'entendez. Voici de quoi repayer l'assiette, je suis vraiment désolée, lui dis-je à l'oreille»

Je lui déposait l'enveloppe sur ses genoux, une expression de fierté et de confiance sur mon visage. Pour la première fois depuis l'arrivée de ma grand-mère, cette femme souriait vraiment. Cette femme devait vivre un calvaire pour vivre avec son mari qui lui aussi devait vivre un calvaire à cause de sa mère. Ma grand-mère avait du beaucoup souffrir pour faire souffrir des gens de cette façon. Une vague d'empathie m'envahie mais je n'en voulais pas. Je pris mon sac et ma veste, m'inclinais respectueusement devant mon oncle et ma tante, dit a Jungkook que je l'attendrais dehors et qu'il pouvait prendre son temps et sortis.

Dehors il faisait froid, mais ça me fit du bien, si bien que je ne rentrai pas tout de suite dans la voiture. Je mis mes écouteurs et partis à la recherche d'une musique douce pour réfléchir à tout ce qui venait de se passer. Une fois la musique idéale trouvée, je m'assis sur les marches du perron. Je restai là un moment, et les musiques défilèrent. Je me laissais emporter et je chantonnais tranquillement.

Je sentais un vide au fond de ma poitrine. Mais pas le vide qui fait peur et qui est triste, le vide qui est réconfortant et joyeux. J'avais l'impression qu'il me disait : bravo tu as réussi, tu peux être fière de toi. Et je l'étais.

DifférenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant