Sa petite robe légère se soulevait au gré du vent, dé- couvrant ses genoux, ses cuisses et parfois d'avantage. Les rues de Bushwick sont toujours agréables en cette saison. Alessandra avait emprunté le vélo de Clara, une amie de laWashington Irving Library, la petite bibliothèque où elle donnait parfois quelques cours de photo. De toutes façons, c'est pas le job à mi-temps décroché au Starbucks qui lui suffisait pour vivre.
Après le parc, elle bifurqua sur sa droite et descendait maintenant Myrtle Avenue à son rythme, entre les maisons aux graffitis colorés et les amandiers en fleurs.
Elle attacha son vélo devant l'ancienne "Factory", une vieille usine aux murs de briques rouges, recyclée en ate- liers d'artistes, plus ou moins occupés.
"Scott sera certainement là. Même s'il n'est pas trop du matin, il m'offrira bien un café", pensa-t-elle, son petit sac de donuts encore chauds, à la main.
Tout le dernier étage, c'était l'atelier de peinture de Scott et c'était aussi là qu'il habitait. Un immense loft sous un toit de verre avec une charpente en bois, soutenue par de grandes poutres d'acier, une terrasse immense avec vue sur Manhattan à l'arrière plan.
Quatre étages à monter, plus le dernier avec un es- calier de fer en colimaçon, faisait de cet endroit une forter-
esse quasi imprenable. L'ascenseur, qui était en réalité un ancien monte-charge avec des grilles de fer en guise de porte comme on en voit dans les films de psychopathe, Alex, ne voulait pas en entendre parler. Bien que ça ne soit jamais arrivé, elle avait une peur bleue de rester bloquée à l'intérieur.
Elle arriva enfin sur le palier un peu essoufflée et frappa à la porte.
- Scott, t'es là ?
Elle frappa plus fort.
- Scott, qu'est que tu fabriques ? Tu dors encore ?Bouge-toi de m'offrir un café, j'ai apporté le petit déj, merde !
Un peu agacée et avant de redescendre, elle actionna la poignée et la porte s'ouvrit. Ben voilà... c'est pas plus compliqué que ça ! Elle entra.
Ca sentait l'essence de térébenthine, la clope et la pizza froide. En cherchant un endroit propre pour poser son sac, elle aperçu Scott allongé complètement nu au milieu de la pièce, baignant dans une marre de sang.
"Scooooott !" cria-t-elle. "Mais putain, tu fais chier ! Qu'est-ce que t'as foutu ?"
Elle se jeta sur lui vérifier s'il respirait encore et le re- tourna pour le prendre dans ses bras. Le regard vague, le
souffle lent, il tenta d'ouvrir la bouche pour parler, mais rien n'en sorti.
Il s'était, sans aucun doute, coupé les veines de son poignet gauche au-dessus d'une toile blanche avec un verre à whisky cassé, puis s'était couché dans son sang, pour y appliquer les formes de son corps.
"Merde, merde, merde ! Scott, merde !"
Alex fouilla dans son sac pour trouver son téléphone. "Mais putain ! Comment on appelle les secours, dans ce foutu pays ?" pensa-t-elle. Elle se sentait paniquer. Les secondes perdues lui semblaient interminables. Le temps filait sous ses doigts et la vie de son ami aussi.
"HELP !" cria-t-elle par désespoir, mais personne ne l'entendait.
Son téléphone à la main, elle courrait partout espérant trouver quelque chose qui l'aiderait. Là, enfin sur le frigo, un magnet avec écrit : "EMERGENCY : CALL 911".
Moins de 10 minutes plus tard, les secours étaient là. Masque à oxygène, intraveineuse de glucose, pansement compressif. L'efficacité des pompiers de New York est admirable. Scott se laissa emporter sur le brancard à roulettes, avec un regard sans expression qui semblait quand même vouloir dire merci. Alex ne le quittait pas des yeux, comme pour guetter le moindre signe de sa part.
Cette fois, pour rejoindre l'ambulance, le monte- charge ne posa aucun problème à Alex.
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Les mois qui suivirent et quelques jours de plus
RomanceNew York. Alex, une jeune photographe tombe amoureuse de Scott, un artiste gay. Elle est Italienne, lui, Français. Les mois qui vont suivre les entraineront dans une relation amoureuse qui les dépassera, jusqu'à ce qu'un terrible malentendu, les pou...