En désespoir de clause

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Ce matin-là, Scott se leva le premier, avec une idée bien précise en tête. Appeler Vittorio, le patron du Golden Boy Friend.

Il s'installa sur la terrasse avec son mug de café encore fumant. Il ne faisait pas froid, mais un ciel blanc, sans âme, recouvrait la ville de son silence. Il se brûla en avalant la première gorgée et composa le numéro.

- Allo... Vittorio ?

- Scott putain ! Si ça continue, je vais me tirer sans payer... Garçon, s'il vous plait ! Ils en ont rien à foutre... Ca fait presque une demi-heure que j'ai commandé une putain de pizza... Faut pas une demi-heure pour faire une pizza, merde !

- Vittorio... ça va ?

- Non, ça va pas ! Je bouffe presque tous les jours seul comme une vieille tante chez Tony's Di Napoli et on me traite pire qu'une de ces merdes de touristes !

- Vittorio, faut qu'on se voit...

- T'as qu'à passer... ça risque pas de refroidir !

- Non... c'est au sujet du tableau...

- Ah ! Ben... tu te réveilles un peu tard, mon chéri... les Ruskofs se sont tirés depuis un bail, déjà ! Fallait y penser avant !

- Laisse tomber les Ruskofs... je passe au Golden.

Quand Alex se réveilla, Scott était en train de dégager Dirty Blood de derrière une invraisemblable accumulation de cadres, de toiles, de planches et de pots de peintures qui rendaient l'œuvre inaccessible, même à son créateur.

- Qu'est-ce que tu trafiques ? demanda-t-elle.

- Je fais du vide.

Alex inséra une capsule dans la cafetière avant d'aller pisser.

- J'ai un de ces mal de tronche... Tu jettes quoi ?

- Rien... je fais du vide.

- Ah d'accord.

Elle s'approcha de Scott avec son mug à la main et l'embrassa.

Il dégagea enfin le tableau et le plaça devant eux.

- C'est ça, qui disparait. Je vais le donner à Vittorio.

- ...

Ils restèrent un moment silencieux à le contempler, puis Alex se retourna pour sortir sur la terrasse.

- Excellente idée ! Je t'appelle un taxi.

- Un taxi ? Pour quoi faire ?

- Vue la taille du cadre... je ne pense pas que tu puisses le transporter à moto.

* * *

Pour quelques dollars de plus, le taxi Pakistanais accepta de rouler jusqu'à la 5ème Avenue avec le coffre ouvert, car le cadre était encore bien plus grand qu'Alex ne l'avait évalué.

Voir la façade du Golden en plein jour, lui faisait toujours une drôle d'impression. Une sensation désagréable de désenchantement. Un arrière goût de désillusion.

Scott appuya délicatement l'imposant tableau contre le mur du club privé et sonna.

La porte du Golden Boy Friend, avait quelque chose d'austère et d'inhospitalier avec ses plaques de métal noires et ses rivets apparents.

Les mois qui suivirent et quelques jours de plusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant