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Bip Bip-Bip Bip...

Je ne supporte définitivement pas cette fichue sonnerie de réveil, mais je me dis que c'est toujours mieux que le clairon, qui m'attend de pied ferme à 5h tout les matins pendant un mois...
Je me lève de suite, je m'étire longuement et je file prendre mon petit déjeuner. Cinq minutes plus tard, je monte prendre une douche et enfile une tenue d'été confortable et décente. Max m'a expliqué que le dimanche où l'on arriverai pour s'installer, la tenue militaire ne serai pas demander. Aujourd'hui, ce sera donc short en jean pas trop court et débardeur noir pas trop fin.
Une heure plus tard, j'enfile mes baskets, des Superstar de chez Adidas qui vont me manquer d'ici le weekend prochain et je charge mes valises dans le coffre et l'arrière de la voiture. Seul les accompagnants adultes sont autorisés à accompagner les jeunes jusqu'à l'entrer du camp, je ferai donc la route seulement avec ma mamie, en ayant pour mission de la rassurer un maximum avant de l'abandonner à une profonde angoisse. Ma mamie et moi sommes très angoissées, mais nous savons comment faire passer l'angoisse de l'autre. Une complémentarité qui me ravie au quotidien.

- Tu tâcheras de revenir en un seul morceau, me prévient mamie.

C'est drôle, j'ai comme une impression de "déjà entendu"...

- Mais oui, ça fait quinze fois que tu me le répètes depuis que nous sommes parties et Liam me bassine avec ça depuis au moins un mois...

- Bien, je n'en dis pas plus mais tu es prévenue.

Je n'aime pas le ton sec que mamie prend quand elle me dit des choses comme ça.

- Je sais que tu t'inquiètes mais ça va aller, promis je ferai tout pour qu'il ne m'arrive rien.
J'essaie de faire baisser cette vague tension qui s'est immiscée en elle, parce que j'ai horreur qu'on se prenne la tête.

Elle se radoucie et nous jouons aux devinettes le restant du trajet.
Après deux heures et demi de route, j'aperçois des panneaux indiquant le Camp de Souge. L'adrénaline commence à monter dans tout mon corps et je sens que l'arrivée est proche. Effectivement, au bout de quelques minutes, nous arrivons sur un parking devant un grand portail en métal portant les insignes militaires de l'armée de terre.
J'observe arriver des voitures et voir d'autres jeunes descendre des bagages. Leurs parents, leurs frères et sœurs les accompagnent et les câlinent dans la voiture avant de les laisser sortir. Nous sommes effectivement assez nombreux. Mais quelque chose d'autre m'inquiète...
Je descend de la voiture, je sors mes valises, embrasse une dernière fois ma mamie chérie et rejoins le groupe d'ados qui s'est formé devant l'ouverture.
Max arrive de l'autre côté du portail et vient nous rejoindre. Il me fait un signe de la tête et me signifie qu'il me dira bonjour amicalement plus tard.

- Bonjour à tous, je suis le Commandant Foret et c'est moi qui suis chargé de votre stage. Avant de vous expliquer comment va s'organiser ce mois, permettez moi de vous présenter le Camp de Souge, qui abrite un régiment girondin de l'armée de terre. Maintenant, suivez moi vers l'aile droite, c'est là bas que sont les dortoirs que vous allez occuper.

Il ne m'avait pas préciser que le début serait si peu dans l'esprit militaire...

Pendant que nous longeons la grande allée, j'observe dans mon coin mes futurs camarades d'arme. Certains ont l'air de s'être déjà fais des amis... La plupart des mecs qui m'entourent ne sont pas transcendants et je repense à Liam qui voulait que je prenne des tenues sexy pour emballer pendant les permissions... Je crois que je vais m'emballer moi même et ça ira.

C'est bien ce que je craignais... Je ne vois absolument aucune autre fille que moi... Soudain, Max s'arrête devant le bâtiment principal du camp.

- Ce bâtiment sera votre nouvelle maison. C'est ici que vos entraînements internes auront lieu. Je ne précise pas que le matériel mis à votre disposition est professionnel et que de vrais militaires s'en servent tous les jours.

Évidemment, il le précise... Je trouve toujours autant idiot de dire qu'on ne dit pas quelque chose pour le dire en suivant... Bref, je profite que les autres soient occupés à admirer la beauté de l'édifice pour aller vers Max.

- Tu savais que je serais la seule fille ? dis-je sur un ton légèrement crispé.

- Oui je le savais, mais je ne voulais pas que tu t'inquiètes, parce qu'il n'y a pas de raison. Néanmoins, tu auras ta chambre et ta salle de bain séparer.

Il y a quelques mois, lors de mon inscription, je lui avais précisé que je ne voulais aucun traitement de faveur, sous prétexte que je le connais en dehors de l'armée... Je ne me gène pas pour lui rappeler en prenant un ton agacé, mais il se penche vers moi et me chuchote doucement :

- Fais moi confiance. Sur ce point, il vaut mieux que tu sois tranquille de ton côté.

Il a ce ton sûr de lui mais qui cache de mauvaises éventualités... Je décide de ne pas protester et de le laisser assurer ce point du stage, parce que je ne cache pas que j'ai plusieurs fois imaginé qu'on vienne m'attacher à mon lit, ou ouvrir la porte de la douche pendant que je ferrais mes affaires...
Il reprend sa marche et le groupe suit. Je ne repars pas de suite ce qui me vaut de fermer la marche.

À ce moment là, je remarque un garçon qui marche à l'écart du groupe et comme moi, à l'arrière des bavardages incultes des autres engagés. Il a l'air d'avoir mon âge. Je le regarde intensément. Il a quelque chose de différent. Il est plutôt grand et fin mais avec un minimum de muscles apparent. Des cheveux bruns mal coiffés sur le côté et de grands yeux bleus verts. Il porte un jean noir troué, un t-shirt blanc à manches courtes et des Stan Smith. Il a un air fermé, comme s'il ne voulait pas être là. Il se tient droit et ne prête pas attention au paysage qui l'entoure. Soudain, ses yeux se dirigent vers moi et arborent un regards dur. Je détourne immédiatement la tête et prend un air assuré mais fermé. Un air qui s'apparente méchamment au sien... Mais je pense qu'il est moins habituel chez moi que chez lui...

Lorsque nous arrivons devant les dortoirs de l'aile droite, Max sépare les garçons en plusieurs groupes de chambre puis m'amène à la mienne. Elle est simple mais confortable. Il y a deux lits une place, chacun collé à un mur qui fait face à l'autre. Un bureau avec des livres sur l'armée et une porte qui donne sur une petite salle d'eau avec une douche, un lavabo avec un miroir et des toilettes. Le minimum syndical mais ça suffit largement. La fenêtre donne sur un lac magnifique et une forêt de pins qui sent bon l'océan. Je passe les deux heures suivantes à m'installer, à ranger mes affaires dans le placard de ma chambre et à me balader autour de l'aile droite. Vers 15h, Max nous rassemble dans une salle, qui s'apparente aux salles de cours d'un lycée, pour développer le programme de ces premiers jours. Demain, nous rencontrerons les fusiliers marins et les aviateurs de l'armée de l'air (je vais enfin voir mon Rafale !). Mardi, se sera le tour de la Gendarmerie Nationale de nous présenter leur travail. C'est ce jour là que je vais pouvoir mettre en avant mes talents de cavalière agréée sur les travaux pratique. Je rigole d'avance en imaginant les autres essayant de mettre le filet à leur cheval... Mercredi, nous rendrons visite aux Sapeurs Pompiers et enfin, aux maîtres chien. Le plus dur va être de ne pas craquer devant les bons toutous qui servent la France mais qui, au fond d'eux, demandent caresses et bisous... Non, ce n'est qu'une idée, sois forte, tu ne craqueras pas. Jeudi et Vendredi seront nos premiers jours d'entraînement intensif et la semaine prochaine, déplacement sur un QG en forêt mais, on y est pas encore.

Le soir, après la présentation des rituels quotidiens, quelques explications sur les distinctions et les grades que l'on va éventuellement recevoir pendant le stage, nous passons à table puis allons tous nous coucher à 21h. Beaucoup d'entre nous protestent mais Max nous assure que c'est l'heure maximale pour éviter que le clairon de 5h du mat ne pique trop... De mon côté, je m'endors en pensant à tout ce que je vais découvrir ces prochains jours, et en revoyant le regard profond du garçon qui m'a dévisagé plus tôt dans la journée...

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