Ça y est, le clairon sonne... Je ne sais pas si c'est parce que c'est le premier jour, mais je ne trouve pas ça si horrible. Je me lève d'un bond et enfile à toute vitesse mon uniforme de repos : pantalon camouflage, débardeur kaki et bottes de l'armée. Pour l'instant, il fait encore frais, mais ça ne va pas durer, et j'imagine déjà le poids des habits qui retiendront un maximum de chaleur sur ma peau.
Je me dirige vers la salle commune. Je suis la première à sortir de ma chambre. Enfin, pas vraiment... Le garçon qui a attiré mon attention hier sort premier aussi... Autant dire que les retrouvailles sont aussi froides que son premier regard. Il se met à courir dans le couloir comme pour être plus rapide que moi... Je fais de même mais il est déjà sorti de l'aile droite. Quand j'arrive dans la salle où nous allons prendre notre premier petit déjeuner militaire, il est déjà au garde à vous devant sa place, en bout de table. Je me place à une table assez éloignée de la sienne et dos à lui pour ne pas avoir à affronter son regard. Mais même de dos, je sens ses yeux posés sur moi et je ne parviens pas à comprendre la sensation que cela me procure...
Après que les retardataires soient arrivés et que le discours du matin ait été prononcé, nous commençons à manger. Max vient me voir pour me demander si j'ai passé une bonne nuit. J'en profite pour lui demander comment s'appelle le mystérieux garçon du fond qui, au passage, ne m'a pas quitté des yeux... Il me répond aussi normalement que possible :- Il s'appelle Antoine Rivière, il a ton âge et est ici pour à peu près les mêmes raisons que toi, découvrir l'armée et fuir ses parents.
Je ne fuis pas mes parents mais je ne relève pas sa remarque, je me contente de poser le prénom sur le visage d'Antoine. Je l'observe longuement mais Max me rappelle à l'ordre en me demandant s'il m'intéresse.
- Non, absolument pas, il a une façon de mépriser les gens qui me dépasse...
- Il te méprise ? Pourquoi ? me demande Max, étonné que nous nous connaissions déjà assez bien pour savoir qu'on ne peut pas se voir en peinture.
- Je ne sais pas s'il me méprise vraiment, mais il a une façon très irritante de me regarder et ça m'énerve au possible... dis-je sur un ton agacé.
- Peut être qu'il t'aime bien en vrai, lance Max prenant un air sûr de lui.
- Humf... Je ne pense pas, mais au pire, je suis pas là pour emballer mais pour apprendre à me battre, alors si j'ai à le mettre au tapis, ce sera sans problèmes.
Je pose les yeux sur mon bol et ne le lâche plus jusqu'à ce que Max nous donne l'ordre d'aller chercher notre sac pour nous rendre dans l'aile gauche. Nous sortons tous de la salle à manger et là, même topo qu'à l'aller, Antoine me passe devant en me dévisageant de haut en bas avec un air dédaigneux et rentre dans son dortoir. Je remarque qu'il est juste à coté du mien et une angoisse injustifiée s'empare de moi. Pourquoi devrais-je être stressée à l'idée que nos deux lits ne soient séparés que par un mur qui, pour infos, est assez fin... La pensée que je pourrai lui parler à travers ce mur passe dans mon esprit, mais je la repousse immédiatement : pourquoi je lui parlerai ? Avec son attitude, je n'ai même plus envie de regarder son visage si bien formé et ses yeux si vifs et perçants. N'y pense même pas ma vieille, c'est pas le genre de type avec qui t'as la moindre chance, et puis au pire, tu ne dois même pas l'intéresser. J'écoute ma petite voix intérieure et ferme mon esprit, pour m'empêcher de reposer les yeux sur lui si je le recroise dans le couloir en sortant. D'ailleurs, ça ne loupe pas... Malheureusement, je suis une pauvre fille faible et je n'arrive pas à m'empêcher de le fixer droit dans les yeux lorsque nous sortons devant nos dortoirs respectifs. J'aurai tellement mieux fais de vérifier si je n'avais rien oublié avant de sortir pour gagner du temps puisqu'il me lance sur un ton hyper agressif :
- Qu'est ce que t'as à me fixer tout le temps ? On n'est pas dans une cour de récréation ici !
Il n'attend pas ma réponse et passe devant moi avec son sac pour rejoindre la cour. Mais je lui lance de loin sur un ton aussi sec que le sien :
- Et toi, qu'est ce qui te prends de me dévisager comme tu le fais ? Tu t'attendais pas à avoir une fille comme frère d'armes ?
- Je m'attends à tout ici. Et j'espère que t'es bien assurée, parce que tu tiendras pas deux jours à l'armée.
Il se retourne et continue son chemin sans me laisser le temps de m'indigner contre ses propos sexistes... En fait, il n'était pas différent des autres, encore un mec con sans intérêt. J'ai le don pour tomber que sur ça... En outre, sa voix m'a tiré une flèche en plein cœur... Elle est si profonde mais douce à la fois, si envoutante et mystérieuse, si claire et pure... Au secours, une âme à terre...
En l'occurrence, se sont les fusiliers qui se sont déplacés pour nous. Ok, c'était pas si simple, mais c'est comme ça que Max me l'a expliqué alors je ne cherche pas plus loin. Nous accueillons donc amiraux, mariniers et fuses qui nous exposent leur quotidien. Jusqu'ici, pas de travaux pratique, juste des questions/réponses, mais je ne suis pas inquiète, ça viendra en son temps.
Sinon, malgré notre accrochage de ce matin, et il est déjà midi, Antoine continue de me fixer... Je ne sais pas ce qui me retiens d'aller lui en mettre une...
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Option de vie
Fiksi RemajaUn stage à l'armée, Cassiopé ne s'attendait pas à être la seule fille des 40 participants... Elle aurait facilement pu passer au dessus des moqueries de certains garçons, si c'était resté dans le cadre du sexisme des ados de collège... Mais ça a vit...