L'Histoire d'une Burkinabé

Partie 22

Nous étions de retour à la maison et papa était déjà rentré du travail. Il voulu lui aussi jeter un coup d'oeil sur les papiers que j'avais en mains. Après une quinzaine de minutes de concentration, il me les retourna et me félicita en me disant : << c'est bien ma fille ! >>. Il était fier de moi, et ça, c'était la chose la plus importante à mes yeux.

Ce soir-là, il y avait du poulet au menu. Tout pour me faire plaisir. C'est aussi ce soir que j'ai ouvert la boîte dans laquelle il y avait mon casque audio. J'ai écouté la musique toute la soirée, ça m'a vraiment fait du bien. Je pouvais enfin faire tout ce que je n'avais pas pu faire au cours de l'année y compris passer beaucoup plus de temps avec mon copain.

Comme mentionné précédemment, je voulais poursuivre mes études avec un bachelor en administration des affaires car pour moi c'était le programme qui me correspondait le mieux même si mon père ne comprenait pas trop mon choix. Je rêvais d'étudier au Canada, c'était le pays de mes rêves, je ne sais pas vraiment pourquoi d'ailleurs. Oh si, peut-être parce que ma mère avait eu la chance d'y étudier après le lycée. Elle me parlait souvent de son expérience là-bas, comment les choses se sont passées pour elle. Elle avait aussi des photos d'elle en train de faire à manger dans son appartement et passer du temps avec ses amis. Elle en parlait tellement que je crois que c'est ce qui a fait que je voulais moi aussi y aller et vivre cette expérience fabuleuse.

Ghislain venait de temps en temps à la maison. Bien sûr, j'aurai voulu en faire de même mais je n'avais pas de moyen de déplacement même si en réalité, ça n'est pas une excuse car lui non plus n'en avait pas. Ses grand-parents vivaient à deux pas de chez moi donc lorsqu'il venait leur rendre visite, il passait chez moi pour me faire un coucou. Quand il venait, on passait le temps à discuter, regarder la télé et je me souviens que quand j'étais assise près de lui en train de regarder la télé, lui il me regardait. Et quand je le remarquais, je lui disais :

Moi : Mais t'as quel problème toi ? Pourquoi tu me regarde ? Regarde la télé !

Lui : Je ne suis pas venu pour regarder la télé mais pour te regarder toi.

J'avais l'habitude de lui parler durement tout en étant gentille, je ne voulais pas forcément toujours être douce et collante, je ne sais pas si vous voyez un peu. Quand lui il essayait de faire de même, ça ne marchait pas car il restait toujours doux. Il était mon meilleur ami et j'étais sa meilleure amie, ou du moins c'est ce que l'on croyais tous les deux. 

A un moment, nous n'avions plus de fille de maison pour s'occuper des travaux du coup, nous nous sommes partagés les tâches ménagères et moi je devais m'occuper de la cuisine. Pendant cette période, lorsque Ghislain est venu me rendre visite, je ne pouvais pas rester assise à discuter avec lui car je devais faire à manger, alors il proposa de m'aider. On formait une équipe du tonnerre. Au menu : Attieke (semoule de manioc) + poisson frit. Je m'occupais des légumes à découper tout en gardant un oeil sur l'attieke qui était au feu et pendant ce temps lui il s'occupait de la friture. Je n'avais jamais eu une relation comme celle-là.

Maman le connaissait et l'adorait. Elle disait tout le temps : "Et mon ami Ghislain ? Il va bien j'espères ?". Pour une fois qu'elle appréciait un garçon de mon entourage. Mes sœurs aussi l'appréciaient. Lui et moi, on voyait les choses de la même manière. Pour nous les études étaient placées en premier, la famille était primordiale et très importante, nous aimions tous les deux la langue anglais. A cette période des vacances, il courait à gauche et à droite pour les démarches administratives car il voulait passer une année entière en Australie à étudier l'anglais avant de sauter dans ses études. 

Moi, je savais que je voulais étudier au Canada mais comme second choix j'avais pris les Etats Unis. Nous étions conscient que la relation à distance allait être dure aussi bien pour lui que pour moi. Il était même prêt à me suivre et étudier dans le pays de mon choix. Honnêtement, j'aurai été trop contente de l'avoir avec moi mais au fond je ne voulais pas être égoïste, je n'avais pas le droit de le laisser mettre ses plans entre parenthèses pour venir avec moi.

PS : Pour ceux qui ne savent pas ce que c'est "l'attieke", j'ai mis une photo pour que vous puissiez avoir une idée de ce que c'est. Un plat d'origine ivoirienne. Et MERCI BEAUCOUP pour votre soutien :)