Partie 18

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Par rapport aux blagues, laissez-moi vous expliquer un peu. On appelle ça la "parenté à plaisanterie" ou encore "rakiré", l'insulte pour rire. C'est un élément essentiel de la culture Ouest-Africaine. Nous sommes Mossis dans ma famille (Mossé au pluriel  et Moaga au singulier). C'est une ethnie. Les Mossis représentent la population d'Afrique de l'Ouest établie au centre du Burkina et constituent environ 40% de la population burkinabé. Il y a plus d'une soixantaine d'ethnies au Burkina. 

Le rakiré consiste à charrier/chambrer les membres d'une autre ethnie. Il existe entre Samos et Mossés, Bobos et Peulhs, Gourmantchés et Yadsés, Bissas et Gourounsis etc... La plupart du temps il est question de goût pour la viande de chien, l'arachide, le lait, bière de mil ou encore les chenilles frites. Mon père adore user de la parenté à plaisanterie, il a un talent inné pour la comédie même si des fois ma mère trouve qu'il pousse le bouchon un peu trop loin. Ces deux-là, mes amours.

Après avoir passé un temps fou à rire avec les professeurs, papa me déposa à l'école car je voulais étudier. Une fois de plus, j'étudiais et pendant un instant j'ai pensé à mon copain puis boum, le voilà en train d'entrer dans la pièce. Décidemment il arrivait toujours au bon moment. Et comme j'avais presque terminé l'exercice sur lequel il m'a trouvé, je me suis mise à lui poser des questions sur son épreuve sportive. Il n'avait pas pu passer ce jour-là parce qu'il y avait beaucoup trop d'élèves, du coup ils ont répartis l'épreuve sur plusieurs jours afin de permettre à tout le monde de passer.

Nous avons discuté jusqu'à ce que maman vienne me chercher. Il avait l'habitude de rester avec moi jusqu'à ce que l'on vienne me chercher pour ne pas que je sois toute seule à attendre. 

On était à "Jour J - 1 ".J'allais composer dans le même centre, celui à deux pas de chez moi. Je m'y suis rendue la veille pour trouver la classe dans laquelle j'allais devoir composer ainsi que mon siège, histoire de me rassurer et d'éviter le lendemain de perdre du temps. Le jour même de l'examen, tôt le matin, aux environs de 7h, mon père m'accompagna. Je n'étais pas la seule élève de mon école, avec moi il y avait mes camarades : Elodie et Oumar. Nous étions tous dans la même salle. Il y en avait d'autres mais dans des salles différentes. 

Mon père a l'habitude d'être réservé comme personne, avec un visage sérieux et stricte à tel point que mes amis quand ils venaient à la maison, ils avaient peur de le croiser. Mais le jour numéro 1 de l'examen, il parlait avec les élèves de ma salle. Il les conseillait et essayait de les rassurer en leur disant de rester calme et concentré, de cette façon tout se passera bien. 

L'heure de l'appel sonna, papa me fit un gros bisou, me souhaita bonne chance et s'en alla. J'étais stressée, je m'étais préparée pendant des mois et maintenant c'était le moment de montrer ce que j'avais appris. 

A la fin de chaque épreuve, j'avais droit au "alors, c'était comment ?" de mes parents et aussi de mes amis. Cette question était inévitable, même jusqu'à présent j'y ai droit. J'évitais de rester avec mes amis à la sortie parce qu'ils se posaient des questions sur les épreuves du genre ici tu as mis quoi, et là tu as choisis quelle réponse. Je n'avais pas du tout besoin de ça. Une épreuve terminée eh bien elle était classée.

L'Histoire d'une BurkinabéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant