La Tour d'Ivoire - Tome 1

La reine des dieux

« If it's cost your peace, it's too expensive. »

-Les Représentants sont morts ! hurla soudain Melech, sans préambule.

Un murmure confus envahit la salle.

-À présent, c'est moi et moi seul qui vous gouverne. Aujourd'hui, s'ouvre devant nous une nouvelle ère, une ère dominée par les quatre Familles fondatrices. (Tous les regards se tournèrent vers nous, Galaad exultait à côté de moi.)

-Les injustices ont gangréné notre société, continua Melech, je vais vous libérer de tout ça. Maximilian Malkam, mon glorieux ancêtre, n'a pas vu assez loin.  Moi, j'ai vu. J'ai vu ce dont notre peuple a besoin ! Pour commencer, je vais détruire ces Lois qui ont pollué nos vies et j'en ferai des nouvelles, je vous redonnerai le pouvoir, à vous !

Un coup d'État. C'était exactement ça. Certains l'acclamèrent dans la salle, mais la majorité se tut et comprit que la situation était dramatique.

-Oublions cette utopie qu'est la démocratie, l'Histoire nous l'a montré, elle n'a jamais porté ses fruits, mais nous a conduit à notre perte... nous avons été trop doux avec nos opposants. Ainsi, dès aujourd'hui, nous allons montrer à ces gens ce qui arrive à ceux qui se mettent au travers de notre chemin !

Il fit un signe au militaire puis ce fut l'horreur. Des hurlements et des cris de protestation retentirent dans la salle. Des gens furent trainés sur la scène, ils devaient être une bonne trentaine. Tous jeunes. Bien trop jeunes.

Melech et Ayaan les regardèrent avec dégout.

-Ces gens, continua Melech en les montrant du doigt, ont clairement affiché leur opposition aux Familles des Créateurs et voulaient une « vraie » démocratie débarrassée de son aristocratie ! Ces gens sont un danger pour notre société, pour nos enfants, pour nous tous. À partir d'aujourd'hui, tous ceux qui s'opposeront à nous seront expulsés de la Tour d'Ivoire. Des familles entières s'il le faut.

Personne n'avait le droit de faire ça, c'était interdit, nos lois, les Perles des Temps l'interdisaient ! C'était un crime, personne ne pouvait survivre dehors, autant les jeter à des cannibales assoiffés de sang.

-Mais ces jeunes gens auront un sort différent, termina durement Melech, que leur destin vous serve d'exemple.

Melech et son fils sortirent des revolvers et là, devant des millions de gens, devant des enfants, ils assassinèrent trente jeunes gens, d'une balle dans la nuque.

Je sursautai à chaque détonation. Des cris retentirent, des hurlements d'horreur, de tristesse. Des gens tentèrent de se ruer sur scène et de sortir, les soldats tirèrent alors sur les contestataires. Je vis les corps tomber un à un sur le sol pour ne jamais se relever.

Du sang baignait la scène - Melech et Ayaan en étaient recouverts – ainsi que d'autres organes humains dont je ne préférais pas connaître l'origine.

Le regard fou, Melech se retourna vers l'assemblée et s'exclama :

-Agenouillez-vous devant votre roi, peuple de la Tour d'Ivoire !

Entourés des soldats d'élites qui les tenaient en joue, ils s'agenouillèrent un à un, ceux qui refusaient étaient tués d'une balle en pleine tête, mais ils étaient bien rares. Nous, les Familles, contemplâmes la scène, à la fois fascinées et horrifiées.

La liberté tant chérie par ma grand-mère venait de mourir, pour de bon. La mienne avec.

Melech parla encore, des nouvelles restrictions, couvre-feu, liberté d'expression maintenant durement réprimée, et j'en passais... je n'entendais plus, je revoyais le visage de ceux qui avaient été froidement tués par Ayaan et Melech. Ça aurait pu être moi, Iris, Sofian ou Morgan....