La Tour d'Ivoire - Tome 1

Le Prince déchu, partie 1

« In the end we won't remember the most beautiful face and body. We'll remember the most beautiful heart and soul. »

Auteur inconnu

Je trouvai Seth dehors, juste en face de l'immeuble, devant un vieux bâtiment délabré.

            -Tu voulais me parler ?

            -Que t'a dit Sven ?

            Déroutée par son ton très dur, je ne sus pas tout de suite quoi répondre.

            -Je... euh... elle m'a expliqué qu'elle était leur rôle ici, à Narda.

            -C'est tout ?

            -Non. Elle m'a aussi parlé de l'importance que j'avais aux yeux des Nations. Et qu'ils n'avaient pas le droit de me dénoncer à la Tour. J'aurais aimé être au courant de tout ça.

            Il hocha la tête.

            -C'est ce que je pensais. A-t-elle essayé de te convaincre de rejoindre la Nation de Diamant ?

            -Quoi ? Non, non. Les Rubis sont les seuls à m'avoir un peu fait comprendre qu'ils souhaitaient me voir parmi eux. Sven a plutôt été... désagréable. Mais pourquoi veux-tu savoir ça ?

            Il ne répondit pas. Je l'observai alors avec attention, essayant de comprendre ce qui pouvait bien se passer dans sa tête, puis je compris.

            -C'est pour ça que tu m'as fait venir. Tu m'as laissée seule avec eux dans le but de savoir quels ordres ils avaient reçus de la part de leur dirigeant. N'est-ce pas ? Tu savais que Sven perdrait son calme en me voyant.

            Mon ton était plein de colère et d'amertume. Je n'étais qu'une marionnette entre les mains des Nations. J'avais été idiote de croire qu'il m'avait emmenée pour me faire plaisir, pour me faire sortir d'Amidror, ou bien parce qu'il souhaitait ma présence à ses côtés. J'avais été sotte.

            -C'est exact.

            -Tu te fous de moi ? hurlai-je.

            Les yeux de Seth s'enflammèrent. Soudain, il me prit par les épaules et me plaqua contre le mur avec violence. Il tenait mes bras avec force, m'empêchant de faire le moindre mouvement. Son visage était à quelques centimètres du mien. Ma respiration devint laborieuse, entre son corps bien trop près du mien et ma colère, la tête me tournait.

            - Je ne me moque pas de toi, Lévana Sildek. J'essaye de sauver ta vie. Il fallait que je sache ce que les autres Nations avaient décidé à ton sujet, particulièrement les Diamants. S'ils comptaient te dénoncer, te rallier à leur cause, essayer de te kidnapper ou bien te tuer. Je connais Sven, je savais qu'en te rencontrant, sa colère lui ferait tout dire. J'ai mes réponses à présent.

            Il me lâcha, me permettant enfin de respirer.

            -Tu te comportes comme une gamine égoïste, Lévana Sildek. Quand vas-tu enfin grandir ?

            Ses mots me brulèrent, s'inscrire dans ma chair, dans mon cœur. La rage et la haine me quittèrent d'un coup, remplacées par une tristesse immense, un vide profond. Seth Sarkis venait de me briser, rien qu'avec une simple phrase.

            J'avais grandi dans un monde pourri, sans foi ni loi, sans amour. J'avais toujours eu tout ce que je voulais, mais je n'avais jamais connu ni amour, ni tendresse, ni respect. Ni liberté. Les seules personnes qui m'avaient fait gouter à cela étaient ma grand-mère, que l'on m'avait arrachée, et Iris, mais même ce monde m'avait pris ma meilleure amie. J'étais égoïste, oui. Mais personne n'avait jamais osé me le dire avant lui. Personne n'aurait osé dire cela à Era Eléazar.