Les trésors du passé

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« You're a rose in the field where wolves walk. »

    Le reste du discours fut flou pour moi, je ne me souvenais de rien. Juste de la vague sensation d'avoir marché et la lumière artificielle de notre soleil me réchauffant la peau.    
Maintenant, j'étais debout, au beau milieu de notre salon, ma mère assise dans un fauteuil bleu clair, mon frère, debout derrière elle, l'air préoccupé. Nous ne nous étions pas adressé le moindre mot depuis, depuis... le discours et l'annonce de mon mariage avec Ayaan. Ils ne me regardaient même pas, l'ambiance était pesante.

    -Pourquoi ? demandai-je simplement, je ... j'ai toujours cru que je devrais épouser Sofian, jamais je n'aurai pensé que....

    Ma mère garda les yeux fixement baissés sur le tapis et tira une longue bouffée de sa cigarette. Ma mère fumait tout le temps, de sorte que tout l'appartement empestait le tabac.

-Tu mérites plus que ça, ma fille. Sofian Razane n'est qu'un ridicule gamin comparé à Ayaan Malkam. Ce n'est pas notre faute si tu n'as aucune ambition et que nous sommes toujours obligés de décider nous-même ce qui est le meilleur pour toi....

-Le meilleur pour moi ? sifflai-je, hors de moi. Le meilleur pour vous, plutôt !

-Tu l'épouseras, un point c'est tout. Cesse donc de faire l'enfant, Era et comporte-toi en femme pour une fois !

-Pourquoi m'avez-vous fait ça... lâchai-je dans un gémissement minable.

Je ne montrais jamais mes sentiments devant les autres, mais là, c'en était trop, j'avais envie de hurler, de pleurer jusqu'à ce que mes larmes ne suffisent plus à repousser cette angoisse qui m'oppressait le cœur.

Galaad, surpris par mon ton plein de désespoir, releva subitement les yeux et planta son regard doré dans le mien. Il avait l'air tourmenté pour la première fois de sa vie. Son air sombre faisait échos au mien. Lui qui se réjouissait tout le temps de mon malheur, je pensais que cette nouvelle le comblerait de joie, c'était d'ailleurs ce qu'il m'avait d'abord fait comprendre.

Ma mère, quant à elle, ne laissa rien paraitre d'un quelconque trouble, seul un tic nerveux vint agiter le coin de ses lèvres, signe qu'elle était nerveuse. Ses cheveux blonds étaient soigneusement attachés, mais elle semblait fatiguée.

La porte s'ouvrit alors, nous nous crispâmes tous trois. Azel Eléazar entra, son costume noir impeccable, plus aucune trace de sang visible, je l'avais pourtant vu en être éclaboussé.

Je le dévisageai sans vergogne. Son air était froid, mais adouci par des traits harmonieux, contrairement à ceux de Melech qui étaient plus tranchés, plus durs, mais qui n'engageait en rien sa beauté mortelle. Ces deux hommes se complétaient, tels le yin et le yang, tels la lune et le soleil. Melech lumineux, charismatique, souriant et possédant un génie tactique effrayant. Mon père, distant, taciturne, diaboliquement intelligent, œuvrant dans l'ombre. L'un ne pouvait triompher sans l'autre.

    Je repensai à grand-mère. Comment ce même homme qui venait de prendre part à des assassinats pouvait-il être le sang, la chair, le fils de l'âme la plus belle et la lumineuse que le monde n'avait jamais portée ?

-Comment as-tu pu faire ça, murmurai-je... comment as-tu pu prendre part à ... à ça !

Mon père ne se laissa pas démonter et se contenta de me regarder, l'air passablement ennuyé.

-Ne parle pas comme ça à ton père, Era, siffla ma mère.

Elle se leva et se posta au côté de mon père, j'étais seule contre tous.

La Tour d'Ivoire - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant