Transparent Lies (nouvelle version)

Chapitre 17

Hugo

Je fulmine intérieurement, la vérité que cette salope m'a crachée au visage me fait tellement mal. Comment a-t-elle pu me cacher une chose pareille ? J'ai souffert durant des années, je l'appelais silencieusement dans la pénombre pour qu'il me protège. Je le suppliais d'écourter mon sinistre séjour sur terre et de m'envelopper dans ses ailes. Et ce soir, j'apprends que, non seulement elle m'a menti, mais en plus, elle se fichait bien des sévices que m'infligerait l'autre salopard. Elle aurait pu tout arrêter, me confier à mon père, elle aurait pu m'offrir une autre vie. Mais elle m'a laissé dans le désarroi le plus total, accuser les coups, les injures, la perversion malsaine de ce taré... tout ça en pleine conscience.
– Hugo, calme-toi, supplie Mina.
Pris de rage, je ne fais plus la différence entre les biens matériels auquel je tiens ou non. Je casse tout. Je lance de toutes mes forces les objets que j'attrape. J'ai besoin de faire des dégâts, si je ne m'autorise pas ce moment de décadence, je risque de prendre la fuite pour me retrouver seul avec une bouteille d'alcool. Je ne veux pas lui laisser ce pouvoir sur moi, pas encore. Cette sale vipère m'a suffisamment anéanti par le passé.
– Je t'ai dit de foutre le camp ! beuglé-je sans la regarder.
– N'y compte pas, tu as besoin de moi.
Elle me devance pour me faire face. Je recule lorsqu'elle s'avance, elle est complètement givrée. Elle sait que je ne me contrôle pas quand je suis dans cet état.
– Torne barre-toi ! Je ne veux pas de toi ici, c'est suffisamment clair comme phrase ?
– Si ! tu en as besoin. Et moi j'ai besoin de rester auprès de toi pour m'assurer que tu vas bien.
– Je ne vais pas bien !
– Je sais... murmure-t-elle.
Elle se rapproche un peu plus de moi, je lui lance un regard glacial. Il y a des limites à ne pas franchir quand cette fureur m'habite. Mais elle est têtue et n'en tient pas compte. Sa main se dirige vers mon visage, je la bloque au vol, ne supportant pas l'idée d'être touché à cet instant, pas même par elle.
– Bordel Torne, si je me laisse aller, je te prie de me croire que ce que tu as connu de moi à ce jour n'est qu'un aperçu. Je ne veux pas te faire mal, c'est pour cette raison que je te demande de m'écouter.
– Je te fais confiance, avoue-t-elle d'une voix douce.
– Tu es débile ou quoi ? Je ne me fais pas confiance moi-même. Enlève tes œillères, ne te prends pas pour le sauveur de l'histoire. On n'est pas dans un de tes livres à la con où tu pourras me délivrer de mon triste sort, c'est la réalité et la seule chose que tu risques de gagner ce soir c'est une putain de belle humiliation !
– Pourquoi ce besoin de passer par le sexe pour te venger ? lance-t-elle subitement.
– Parce que je suis comme ça, merde !
Une fois de plus elle ignore mes recommandations, prends mon visage dans ses paumes et m'oblige à la regarder dans les yeux.
– J'ignore tout ce que tu as vécu quand tu étais enfant. Je n'ai pas la moindre idée de ce qui t'a poussé à devenir celui que tu es. Et je ne te laisserais pas tomber parce que je t'aime ! Je suis prête à t'écouter, à te soutenir, à t'accompagner dans des moments comme celui-ci. Mais je t'en prie, Hugo ne me rejette pas.
– Ne me sort pas la carte des émotions. Ça ne prend pas avec moi.
– La carte des... oh putain, sanglote-t-elle. Je ne suis pas comme ceux qui t'ont menti, je te le jure. Quand je te dis, je t'aime, c'est mon âme qui te parle. Te voir souffrir ainsi, ça me tue ! Je te promets qu'il ne s'agit pas de pitié. Je ne supporte pas qu'on te blesse, ça me déchire.
Elle a compris que les seuls mots d'amour qu'on m'ait donné à ce jour étaient destinés à me manipuler. À faire de moi le coupable plutôt que la victime. Bien entendu, j'en ai eu d'autres sans importance. Mais ces sept lettres provenant d'elle ce n'est pas rien pour moi.
– Torne... chuchoté-je d'une voix éraillée, ne sachant pas quoi répondre.
– Est-ce que tu doutes de moi ? demande-t-elle en pleurant.
Non, c'est de moi que je me méfie. Parce que même si tu es honnête, si tu ressens pour moi un tel amour, je finirais par te briser.
Je sors de ma torpeur peu à peu. Elle est pendue à mes lèvres comme si sa vie dépendait de ma réponse. Je souffle un bon coup avant de lui dire ce que je pense sincèrement.
– Non, c'est en moi que je n'ai pas confiance. D'une manière ou d'une autre je finirai par te faire mal. Sors d'ici pendant que je te le demande, tu mérites bien mieux que ce que je suis capable de t'apporter.
– Tu es ce qui m'est arrivé de mieux ! Je ne me suis jamais sentie vivante comme c'est le cas depuis que tu es entré dans ma vie. S'il te plaît, Hugo, ne nous met pas à l'épreuve. Demain, tu reviendras me chercher et je serais là après avoir passé toute la nuit à pleurer et à me tracasser pour toi. Épargne-nous cela, dit-elle en ravalant un sanglot.
Je l'attire contre moi, la serre dans mes bras sans réfléchir, délestant le contrôle pour la première fois. Je m'autorise à lâcher prise, c'est autant libérateur qu'effrayant.