Hugo
Putain... pas ça ! Je me fige en voyant son regard. Ses yeux sont noyés sous un torrent de larmes. Mon frère est lui aussi choqué. Je n'avais pas conscience de leur présence. Je me retourne sur la vieille peau, et lui lance un regard menaçant.
– Tu as trente secondes pour quitter cette maison. Si tu ne sors pas de toi-même, je te promets que tu n'oublieras jamais ce qui va suivre !
Comprenant que nous sommes arrivés à un point de non-retour, elle se dirige vers la sortie. Theo quant à lui ne bouge pas d'un poil. Mes yeux se dirigent sur leurs mains enlacées. En réalisant que je les observe, mina se précipite au sol, afin de ramasser les résidus de verres. Elle pleure à gros sanglots, ses mains tremblent et je comprends rapidement qu'elle n'ose pas me parler.
– Stop arrête ça, chuchoté-je en me baissant à sa hauteur.
– Je suis désolée, je vais ramasser, bredouille-t-elle.
J'attrape ses mains et la force à se relever. Je cherche son regard, mais il me fuit.
– Hey... regarde-moi.
– Mon Dieu, Hugo, je suis tellement désolée, dit-elle, larmoyante.
– Tu n'as pas à l'être, d'accord ?
– Je te jure que je n'étais pas là dans le but d'écouter. Excuse-moi.
– Va t'installer sur le canapé, j'arrive, OK ?
Elle s'exécute et mon attention se porte alors sur mon frère qui, lui, reste silencieux.
– Tu ferais bien d'aller la rejoindre, dis-je en désignant la porte d'entrée.
– Je...
Il me prend dans ses bras et se met à chialer comme un gamin. Je me serais bien passé de tout cela. Cependant, je ne peux pas en vouloir à mes proches d'avoir de la pitié pour moi.
– Ça va aller, dis-je en tapotant son dos.
– Je ne sais pas quoi dire...
– Il n'y a rien à dire... est-ce qu'on peut y revenir plus tard ?
Il comprend mon empressement d'être seul avec Mina et quitte les lieux sans plus attendre.
– Je comprends mieux maintenant, hoquète-t-elle en se retournant vers moi lorsque j'arrive dans le living.
– Qu'est-ce que tu veux dire ? demandé-je, soucieux de connaître le fond de sa pensée.
– Il y a des parcelles de toi que je ne parvenais pas à saisir, mais maintenant je comprends mieux ce besoin de punir, débite-t-elle. Ces deux fois là, tu reproduisais le même schéma que tu as vécu. Cependant les sentiments s'en sont mêlés et tu ne supportais plus de m'infliger ça. Je me trompe ?
– Ne t'aventure pas là-dedans, supplié-je.
– Ce n'est pas de ta faute si tu te sers du sexe pour soulager ta colère. On t'a conditionné dès ton jeune âge à croire qu'une relation sexuelle pouvait servir d'exutoire.
– Stop ! J'ai eu ma dose pour ce soir, hurlé-je.
Je ne veux pas entendre ces mots sortir de sa bouche. Je ne suis pas prêt à ce qu'elle analyse toutes ces choses qui me possèdent et que je hais le plus.
– J'ai mal pour toi, parce que maintenant je sais quel est le fardeau que tu trimbales.
– Je suis quoi, bordel ? Ce que tu sais fait de moi un sujet ? l'interrogé-je.
– Non, loin de ça Hugo. Je n'arrête pas de repasser en boucle ces images de toi enfant.
– Abstiens-toi, tu n'as aucune idée que ce qui s'est réellement passé, d'accord ? dis-je en haussant le ton.
– Parle-moi. J'ai besoin d'être là pour toi.
– S'il te plaît, Torne, épargne-moi ta pitié.
– Il n'est pas question de ça. C'est tellement...
– Je crois que tu devrais peut-être rentrer chez toi ! tranché-je.
– Quoi, mais, pourquoi ? bafouille-t-elle.
– Parce que je ne veux pas que tu restes. Et puis, j'aurais peut-être dû m'écouter. Tu n'es pas en mesure de supporter ça sans te victimiser !
À mes mots, elle se pétrifie sur place. Je ne suis pas en mesure de la consoler. Pas plus que je ne le suis de supporter sa présence. J'ai imaginé un court instant que la retrouver soulagerait mon âme meurtrie. Mais pas ce soir.
Alors que sa main cherche à atteindre ma joue, j'emprisonne son poignet. Bloquant ainsi son désir de me toucher.
– Je serais prête à soulever des montagnes pour toi, proteste-t-elle. Et je m'excuse si je te donne l'impression de me plaindre. Je cherche mes mots, Hugo... c'est tellement...
Je fais comme si je ne l'écoutais pas. Je me retourne, prends son sac posé à côté du canapé et le lui tend.
– Tu peux y aller, claqué-je.
Elle récupère son bien et enfile sa veste. Avant de quitter la pièce, elle me fait à nouveau face et murmure :
– Je t'aime Hugo. De toute mon âme, chaque parcelle de mon corps est accro à toi. Tu es le plus beau cadeau que la vie ait pu me faire. Auprès de toi je me sens vivante. J'ai appris à connaître certains aspects de moi que j'ignorais. Je suis prête à me battre à tes côtés, à te consoler quand c'est nécessaire et à encaisser lorsque c'est inévitable. Mais je ne peux pas si tu me fermes la porte. Je te laisse le double des clés de mon appartement, j'attendrais que tu sois prêt, dit-elle en les déposant sur la table basse.
Je baisse la tête, cachant ainsi les larmes qui me montent aux yeux. Le bruit de ses pas résonne dans le soir et ce n'est qu'au moment où j'entends la porte claquer que je me redresse.***
Je reste là, pris au piège. Dans l'enfer de mes tourments et pour la première fois depuis trop longtemps, je pleure comme un môme.
Toutes ces absurdités que j'ai vécues sont en train de me revenir en pleine gueule. Je me sens suffoquer à la perspective que je ne puisse pas gérer tout cela.
J'ai mis des années à me construire une carapace. Superposant un masque après l'autre. À l'idée que tout cela est en train de m'échapper, me retrouver mis à nu devant des êtres qui me sont chers, me terrifie.
Je ne réfléchis pas ce que je fais. Je prends mon téléphone et appelle la première personne qui me vient à l'esprit.
– Allô ?
– Gisèle, je m'excuse de te déranger, hasardé-je.
– Hugo, est-ce que tout va bien ? hoquète-t-elle.
– Non, ça ne va pas, glapis-je.
J'aurais pu appeler n'importe qui. J'aurais également pu me murer dans le silence une nouvelle fois. Mais sans comprendre pourquoi, c'est à elle que j'ai eu besoin de parler. Alors pour la première fois de toute ma vie, je suis totalement transparent. Je lui raconte tout, ne négligeant aucun détail de cette soirée. Elle m'accompagne dans mes sanglots, me console à distance, m'écoute sans le moindre jugement. Ce soir j'ai le sentiment de retrouver en elle, un peu de cet amour maternel que je n'ai jamais eu.
–Je suis tellement malheureuse d'entendre toutes ces choses. Mais ne te puni pas davantage d'accord ? Mina t'aime ! Je ne la connais pas, mais au vu de ce que tu me racontes, j'ai la certitude qu'elle tient à toi.
– Je sais, soufflé-je.
– Dans ce cas, accepte qu'elle sache enfin la vérité. C'est toi que tu sanctionnes en restant seul chez toi alors que tu as besoin de sa présence.
Ses paroles me font l'effet d'une gifle. Nous discutons encore un court moment. Gisèle me certifie qu'elle est là pour moi et que si je souhaite retourner en Suisse, c'est avec plaisir qu'ils m'accueilleront tous les trois.***
L'aube est proche, quand, après m'être débarrassé de la colère en compagnie de ma vieille amie ; ma guitare, je me rends au domicile de Mina.
J'avance à pas de souris. Par chance, je parviens à ouvrir la porte sans problème. Je distingue des voix à l'étage et lorsque j'atteins l'entrée de sa chambre, je constate qu'elle pleure. Son meilleur ami est auprès d'elle, cherchant à la consoler du mieux qu'il peut.
– Je peux entrer ? dis-je pour m'annoncer.
Je réalise à la tête qu'ils font qu'ils sont surpris de me voir là.
– Je vais vous laisser. Content de te voir, me jette Ronan.
Lorsqu'il n'est plus dans les parages, je m'installe auprès d'elle.
– Je te demande pardon, murmuré-je en caressant son visage.
– C'est moi, je suis parfois intrusive et...
– Je ne sais pas comment j'aurais réagi si j'avais été à ta place, la coupé-je.
– Je pensais que tu ne viendrais pas, chuchote-t-elle.
– Je me surprends moi-même, avoué-je.
Elle se blottit dans mes bras, je la serre fort contre moi.
– Est-ce que tu as l'intention d'appeler Theo ? demande-t-elle.
– Je n'en suis pas sûr, grommelé-je
Elle se redresse, son regard plonge dans le mien.
– Je crois que tu devrais.
– Tu as deviné ça lorsque ta main tenait la sienne ?
Crétin, c'était mal placé.
J'ai bien conscience que la situation n'est pas à prendre à la légère. Qu'à aucun moment cet acte n'était réfléchi. Pourtant, c'est un détail qui me dérange.
– Ce n'était pas calculé ! Je regrette. Sauf que... il t'aime. Ce qui a pu se produire en ton absence n'enlève rien à l'amour qu'il te porte, assure-t-elle.
– Torne...
– Oui ?
– Maintenant que tu sais ça, j'ai peur que tu ressentes du dégoût pour moi.
– Quoi ? Jamais ! J'en éprouve pour ceux qui t'ont fait mal. Mais toi... je t'aime, dit-elle d'une voix tendre.
– Et lorsque le jour se lèvera, tu m'aimeras encore ?
– À jamais.
– Promis ?
– Promis !
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Transparent Lies (nouvelle version)
RomanceBonjour et bienvenues sur la nouvelle version de Transparent Lies. Pour celles qui découvrent l'histoire, notez qu'elle est destinée à un public adulte ! Certaines scènes à caractère érotique sont très explicites. Bonne lecture. Résumé : Mina et H...