Point de vu d'Irène
Quand je reviens dans le salon, Hakim semble réfléchir. Il a les sourcils froncés. Forcément il doit être en train d'essayer de comprendre ce qu'il se passe. Je ne peux pas vraiment lui donner beaucoup plus d'explication.
Il s'aperçoit de ma présence seulement au moment où je m'assoie à ses côtés. D'un coup il se lève ce qui me laisse perplexe.
- Je vais y aller. Dit-il en me lançant à peine un regard. J'ai la vague impression qu'il cherche à me fuir.
- Attend rien ne presse non? J'essaie de le retenir, en vain, j'en ai bien peur.
- Je vais te laisser avec elle. De toute façon les gars font une soirée ce soir chez Deen et si je n'y vais pas c'est suspect.
Je sais très bien qu'il s'agit d'une excuse, mais je décide qu'il vaut mieux le laisser partir. Bien sure ce départ me rend triste, mais après tout je m'attendais à quoi? J'ai un faible pour lui depuis le lycée. A l'époque je manquais trop de confiance pour l'aborder, lui, si fière et sûre de lui. Et puis il faut se l'avouer, il avait cruellement la cote auprès des filles et il les préférait facile et sans attache.
C'est travailler dans la photos et me faire un nom qui m'a aidé à m'affirmer. J'ai voyagé, j'ai rencontré plein de gens, des garçons... n'étant quasiment jamais sur paris, j'ai pu me libérer du regards sur-protecteur de mon frère et ça m'a aidé à me détacher de ce béguin d'adolescente.
Et puis Ken a commencé à devenir de plus en plus mélancolique. Il a toujours eu ce coté artiste tourmenté et torturé, mais cette mauvaise passe nous à tous inquiéter un peu plus que d'habitude alors on s'est rendu un peu plus disponible pour être avec lui et s'assurer qu'il ne reste pas seul trop longtemps avec ses démons. On ne voulait pas qu'il s'enfonce encore plus dans cette solitude dévastatrice. J'ai donc naturellement revu de plus en plus les amis de mon frère. J'ai donc retrouvé Hakim et même si j'avais grandie j'avais toujours ce quelque chose pour lui.
Au début nos conversations tournaient beaucoup autour de Ken et puis petit à petit ça a dévié sur nous, nos vies, nos espoirs, nos attentes... et puis passer du temps avec lui était devenu quelque chose d'important, presque nécessaire pour qu'une journée soit une bonne journée... je suis retournée dans mes travers d'adolescente tout en m'efforçant de faire comme si de rien n'était.
J'attendais beaucoup de cette soirée. J'espérais un déclic de sa part, qu'il me voit enfin comme une femme et pas comme la petite soeur d'un de ses meilleurs amis. Quand il a accepté, j'ai cru que mon coeur allait sortir de ma poitrine tellement il battait fort, j'ai du me faire violence pour ne pas faire la danse de la victoire devant lui... mais à l'évidence il n'avait pas les mêmes attentes que moi... alors autant le laisser partir.
A peine la porte claque que je sens un pincement au coeur. Pour ne pas m'apitoyer sur mon sort je range les traces de son passage, comme si faire disparaitre les preuves m'aiderait à ne pas avoir mal au coeur.
Je finis de laver le dernier verre quand la porte de la salle de bain s'ouvre. Léa en sort elle a meilleure mine même si elle ne respire pas la joie non plus. Elle porte un short noir en coton et un T-Shirt simple blanc à col rond. Les jambes amaigris le visage creusé, toute la fatigue peut se lire sur son corps et je me rend compte que je n'ai rien vu venir. Elle semble hésitant, se triture les mains alors je l'invite à s'assoir dans le canapé pendant que je prépare deux tasses de thé. Une fois les boissons chaudes terminées je les poses sur la table basse et vais nous chercher deux plaids histoire d'être confortablement installée .
- Alors raconte moi.
- Par où commencer ?
- Peut importe on remettra les pièces du puzzles dans l'ordre plus tard.
Mon amie part dans ses pensées. Elle hésite. Elle triture ses mains. Sans dire un mot je voie l'émotion la gagner peu à peu et ses yeux se replissent de larmes. Moi qui suis sont amie, je suis totalement déboussolée par ce trop plein de tristesse. Jamais, pas une seule fois elle n'a laissé sous entendre que ça n'allait pas. Je ne peux rien faire d'autre que de tenter de la réconforter. Je lui caresse doucement le dos tout en lui disant des mots réconfrotants.
- hey, chhhh tout va bien. Tu sais que je suis là pour toi? T'inquiète pas je suis là maintenant.
Quand cette vague d'émotion semble enfin s'éloigner, elle prend sa tasse de thé entre ses mains comme si la chaleur du breuvage pouvais apaiser un peu son coeur. Elle se réinstalle confortablement et balance.
- C'est jusque que... des moments je me demande si tous les sacrifices que nous avons fait valaient la peine. On a mis tellement d'énergie dans tout ça, et pour quoi au final? Pour être là, seule, et vide et...
Sa voix se brise dans un sanglot. Je suis totalement bouleversée par ces aveux.
- Au final ça m'a emmené quoi tout ça? De l'argent? Super! La gloire? Mais je m'en fou de tout ça moi. J'aurais dû... j'aurais dû rester à Paris, continuer de faire des vêtements juste pour les gens que j'aimais... et être avec les gens que j'aimais... Je... j'ai tout foutu en l'air. J'ai tout brisé. Et tout ça pour quoi? Pour être juste une coquille vide?
Elle se tait. Elle n'attend pas de réponse. Je n'en ai pas à lui donner. Je ne peux qu'être la pour elle. L'écouter, l'aimer et attendre qu'elle retrouve du sens.
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Pas moi sans toi
Fanfiction* Londres - Gare St Pancras Internationale - 19h50* En ce mois de décembre, la gare fourmille de monde. Des gens pressés, des touristes émerveillés, des familles, des couples, des amis, des personnes seules... et puis elle, Léa Stanfield cherchant à...