« Le désir réprimé s'évanouit peu à peu jusqu'à n'être plus que l'ombre du désir. »
William Blake.
J'ouvris les yeux bien avant mon réveil. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine, sauvage et indomptable. La chair de poule mangeait ma peau et j'avais froid.
J'avais repoussé le drap dans le peu de laps de temps où j'avais réussi à dormir et l'air frais de la nuit s'était engouffré dans ma chambre. Je pouvais entendre les premiers oiseaux et le murmure de la rue où des gens étaient déjà dehors, malgré qu'il ne soit que cinq heures et demie. Là, le moteur d'une voiture, le grincement d'un vélo et quelqu'un en train de siffler. Il fallait être de sacrée bonne humeur pour agir ainsi à cette heure. Je posai mon bras sur mes yeux et inspirai. Mon cauchemar me collait à la peau ; mauvais souvenir de ma jeunesse, un passé dont je tentai encore de m'extraire, sans grand succès. Je mordis ma lèvre et me redressai, assise dans le lit. Sur ma table basse, un fatras sans nom. Bien un truc qui n'avait pas changé : je manquais de temps à peu près pour tout. J'aimais vivre dans l'urgence. J'aimais le stress, même si ce n'était pas bon pour l'organisme d'après les médecins. Je respirai flic depuis toujours et vivre de cette façon, c'était le vivre pleinement. On ne faisait pas dans la demi-mesure, quitter à laisser sa vie de côté.
J'attrapai la boîte de médocs et en sortie une pilule que j'enfournai dans ma bouche et que j'avalai avec une gorgée d'eau. La lumière du jour ne baignait pas encore la pièce et une obscurité toute relative m'enveloppait. Je croisai le regard d'Hachi à travers le cadre photo et la culpabilité revint me botter le cul avec force et acharnement. Dans ma fuite, j'avais consciemment laissé la gamine de côté. Quel genre de monstre étais-je ?
Je finis par me laver et après un crochet rapide par la salle de bain, je descendis. La maison était bien silencieuse. Deelon, une des quatre personnes vivants ici, n'était pas rentré cette nuit ; sûrement une mission en cours qui avait nécessité sa présence. Ou il avait encore finit chez une femme dont il ne se souviendrait même pas du prénom. Parce qu'il était comme ça, le cœur sur la main doublé d'un connard arrogant. Joaquim m'avait expliqué qu'il avait deux facettes bien distinctes et qu'il choisissait laquelle montrer à qui. C'était un peu trop compliqué pour moi dans le sens où j'aimais que les gens soient honnêtes. Mais je savais aussi, de par mon métier, que tout le monde n'était jamais vraiment ce qu'il paraissait être.
Que ce soit Joaquim, moi, même Warren. Qui pouvait se taxer de connaître les gens par cœur ? Les connaître vraiment ? Avant, j'aurais pu croire que je savais tout d'Ashika ou même de son père, mais c'était se mentir.
Je finis de boutonner ma chemise en satin et relevai les yeux sur Hadar, assis au niveau de la table, le nez plongé dans l'ordinateur. Il portait ses lunettes, ce qui me faisait toujours bizarre si on considérait le fait que c'était un loup et que leurs sens étaient censés être surdéveloppés. Pour autant, ce n'était pas le premier que je voyais user de lentilles ou autre. Comme quoi, nous avions, nous humains, une représentation biaisée des surnaturels sur bien des aspects.
Ses yeux glissèrent en bas de l'écran :
— Tu es matinale.
Sur le plan de travail, mon téléphone m'indiquait un message par son clignotement lumineux. Sûrement Abel qui s'était amusé pendant que j'avais enfin réussi à grappiller quelques heures de sommeil. Le début de semaine allait être mouvementé entre l'interpellation d'un nouveau suspect et l'interrogatoire prolongé de l'autre débile profond. Grâce au boulot de Nevena, nous avions pu dire avec précision que les bourreaux avaient été plusieurs, ce qui nous avait permis de faire une avancée considérable dans l'enquête. Bientôt on pourrait la boucler et ne resterait plus que le travail fastidieux des rapports à taper.
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OUR ANCHOR T2 Forgotten [Terminée]
Loup-garouCeci est un tome 2. Ashika, de retour chez elle, doit apprendre à oublier Yona et à composer avec la nouvelle personne qu'elle est devenue. Les traumatismes des derniers mois la talonne et ne lui laisse aucun répit. Sa relation con...