chap'22

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✈︎ Valletta, malta
23:00
13 juillet

L'astronomie était loin d'être mon fort, mais dans les ténèbres les plus claires, j'étais certain que Yoongi était l'étoile qui brillait le plus dans ce putain d'univers.
Il les contemplaient toutes, unes par unes, leur accordant à chacune une touchante importance.

Nos coudes étaient appuyés sur une rambarde rouillée qui servait de plongeon pour les téméraires de l'après-midi. Ses cheveux rouges vin reposaient sur mon épaule, et sa respiration était aussi lente que profonde.
L'alcool courant dans mes veines m'empêchait de lui offrir la sérénade qu'il méritait pour accompagner son observation, alors je me contentais de hummer une mélodie aléatoire. Des notes rassurantes se mêlaient au souffle tranquille de la ville, se prélassant sur les sombre vagues aux paillettes floues.

"Qu'est-ce que-, commençai je en remarquant l'application Dictaphone ouverte bien devant ma bouche.

-Chut. Continue, j'aime bien cette mélodie." Répondît il.

Je souris et poursuivis, un peu plus fort cette fois. Ses paupières s'étaient closes, ses muscles se détendaient et son poids devenait plus désagréable à supporter. Il fondait complètement sur mon épaule, confortable et en sécurité. J'en souriais, j'étais satisfait de soutenir cette poupée fragile faite de cristaux et d'émotions.
Mais je n'avais pensé au conséquences de l'endormissement d'un homme qui prétendait tenir fermement quelque chose de précieux dans sa main.
Comme toute personne sobre l'aurait prévu, son téléphone glissa.

Plouf.

Mes vêtements tombèrent sur le sol, plouf.

D'en bas, j'entendais des sons.
Et moi, sous l'eau, les yeux grands ouverts,
je ne comprenais rien, car je ne pouvais rien comprendre.

Un rectangle me toucha, je rejoins la surface et jetai le mobile aux cieux flous.

Je devinai que Yoongi l'attrapa de justesse, mais, je me senti de suite glacé, puis, paralysé.
Comme emprisonné dans un iceberg métallique.

Je ne percevait rien autant que je ressentais tout d'un coup. La douleur, le confort, le passé et la peur, tout me faisait frissonner dans la mer.
Mes doigts rejoignirent mon front, puis devant mes yeux, apparu beaucoup de rouge.
Le presque noir de l'eau aussi, mais surtout une vague de rouge, glissant le long de ma main.

La minute d'après, j'étais nu dans une baignoire.

Mon corps sous une chaude montagne de mousse me faisait mal un peu partout, des maux de têtes me firent pleurer des plaintes enfantines. Et de ce fait, Yoongi se précipita, le visage inquiet et pâle, déjà courbé, prêt à me donner toute l'attention du monde.
Il était douloureusement silencieux, zéro once de soulagement ne trahissait son expression anxieuse, peut-être perdu dans une spirale d'inquiétudes qu'il n'osait briser.
Ses mains tremblaient autour de moi, caressant mes cheveux, paniquant là et là.

Mais d'où venait cette attitude maternelle dont il n'avait aucune honte d'exposer ?

"Je vais bien, hey, calme." Soufflais-je faiblement, entourant ses poignets de mes doigts lourds.

Ses sourcils se haussèrent, sa bouche s'entrouvrit, et d'entre ses lèvres rougissantes de paix s'échappa un soupir qui baissa ses épaules. J'embrassa sa main, puis la garda dans le creux de la mienne, le regardant un peu plus longtemps avant de laisser mes paupières se reposer dans des couettes aqueuses.
Des bulles commencèrent à chatouiller mes tempes, puis je sentis l'eau me quitter, m'offrant au froid de la pièce.
Toujours aveuglé d'une fatigue inexpliquée, je ressentis la douceur de serviettes entourant tout mon corps. Grognant tel un enfant, je me tenais à peu près debout, appuyé sur une béquille humaine que je savais être Yoongi.
Me vint l'image de son maigre corps me transporter jusqu'au lit, je me redressai brusquement, demandant le minimum d'aide.

Et enfin allongé dans le vagues de linges, milles aiguilles semblaient s'implanter dans mon crâne. Je retînt un cri, apportai mes doigts a la zone qui me tordait de douleur, et y senti un pansement collé soigneusement.

"Pourquoi te blesses tu autant, commença  Yoongi, à l'autre bout du lit. J'espère que tu ne penses pas que tu mérites tout ça hein ? Tu sais que je t'aime maintenant, p-pourquoi avoir jeté ta tête la première pour un fichu téléphone ?"

Un sanglot lui échappa, mais il ne pleurait pas la tête dans les mains avec les entrailles en cendres bleues.
Il riait, échappant mon regard comme s'il commettait un crime.
Il continuait de rire, me montrant son dos, à moi, un malade perdu.

"Mais t'es con ou quoi ?" S'exclama-t-il en s'abandonnant sur la couverture. Je ne vis que le reflet blanc d'une goutte glissant le long de son visage. Il semblait si fragile, allongé parmi des dunes d'amour qui écrasait son cœur et ses poumons.

Je me serais hissé au dessus de lui, réchauffant son petit être d'un baiser fou... si je n'étais pas bêtement cloué. M'enfin, il n'y avait techniquement pas de clous qui m'empêchait de sentir la peau de celui que j'aime, contre la mienne.

Je me dégageai de la masse de couverture, et le rejoint, nos épaules se touchant parfaitement.

"Aujourd'hui était beau. Je veux des milliers d'aujourd'hui avec toi, prononçai je au plafond ou apparaissait mes paroles.

-Tu t'es ouvert le crâne, répondît Yoongi en me brûlant du regard.

-La blessure n'est pas si profonde si j'arrive clairement à voir.

-Voir quoi ?

-Que je n'ai besoin que de toi."

Je lis sur son visage son embarras face à cette phrase ridicule. Il rit ensuite, collant ses lèvres sur mon pansement, chuchotant contre celui-ci des injures contre ma mon impulsivité que je n'expliquais que par le désir d'être sous la protection de mon aîné.

Je souhaitais tout bas qu'il s'attache assez à moi, pour que la lourdeur de mes secrets deviennent poussière face à son amour.
Qu'ôter le plus grand pansement du monde, ne me sépare pas de lui.
Mon égoïsme maîtrisait tant l'art de lui mentir que j'en frissonnais, tout en lui offrant mon plus grand sourire.

⌈ switching ⌋ ᵀᴬᴱᴳᴵOù les histoires vivent. Découvrez maintenant