chap'26

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✈︎ France, Provence
00:34
18 juillet

Hope m'eut soudainement manqué lorsque j'étais encore à table, fixant les couverts intactes en argent, n'avalant rien, oppressé par le silence séparant mes parents.
L'odeur de Malte, les pavés de Valetta et le son de l'eau salée contre les roches tournoyaient en se creusant dans ma poitrine.
Oui, il me fallait bien un ami à ce moment précis.
Alors j'étais assis au milieu de l'aéroport, la tête inondée, sur ma valise, attendant le prochain décollage, la main plongée dans un paquet de chips.

Quitter le pays où Yoongi offrait sans doute son sourire à Jimin au même instant, me délivrerait des chaînes glacées qui serpentaient autour de mon cou, m'empêchant alors de penser correctement.
Je me mentais à moi-même, c'était flagrant.
Car au final je n'étais qu'un menteur.
C'était écrit sur mon front, au couteau.
J'avais le sang de Hoseok et les larmes de Yoongi sur les mains, ainsi que des pensées en plomb qui me tiraient hors de mes vacances.
J'étais le fautif de tout et rien n'avait de sens.

Je regrettais avoir peint mes paroles avant de les avoir offertes.
Je regrettais être un parfait représentant de ma famille de vipères.
J'étais surtout désolé d'avoir menti pour le confort des bras de Yoongi, désolé à en mourir.

Mais il fallait que je tienne, je devais m'assurer que ce chat allait bien là où il était. Il fallait vraiment que je le retrouve et que je ne le quitte jamais.
Il fallait aussi que je pleure lors de mon prochain vol. Je méritais de ressentir les restes de mon cœur se propulser contre les parois de ma cage thoracique, de me sentir vide et absurde quelques heures, et enfin, de me reprendre l'immensité d'une vague noire dans la gueule, que ma souffrance se répète.
C'était un châtiment naturel, bien trop injuste pour le monstre que j'étais.

Sérieusement.
Que m'avait il pris pour que je lui dise, aussi calme que je le paraissais, que je ne toucherais jamais à de la drogue alors que j'étais l'héritier de la plus grande entreprise pharmaceutique aux sous-sols et laboratoires douteux ?
Que m'avait il pris d'avoir faussé des aveux sincères lorsque je guérissais de ma première blessure ? D'avoir expliqué la raison de mes pleurs soudains le jour où s'ignorer ne faisait plus parti de notre dictionnaire. Et de lui avoir dit, masquant un sourire crasseux, que les rumeurs qui me couraient après en Corée traitaient seulement un usage interdit et singulier d'un joint.

Sérieusement.
La vérité était loin d'en être proche.

Je suis Kim Taehyung et Hoseok était un client comme un autre, au départ. Il passait des coups de fils brefs, demandait des rendez-vous après ses heures de travail, vers dix-huit heures, dans des ruelles non loin de sa maison disait-il, au pied de grands immeubles abandonnés, des cachettes parfaites. Il se foutait de savoir qui lui livrait ses déchets, mais un jour il fallut que je m'énerve pour un rien, que j'attrape une casquette, et que j'enfile les chaussures des employés de mes parents. Une certaine histoire de prendre l'air. Il y en avait assez dans mes poumons pourtant.
Je savais que c'était une personne seule puisqu'il ne commandait que des petites quantités contrairement aux clubs glauques de Daegu. Sûrement un énième adolescent victime du système éducatif de Corée. Je descendis de mon vélo puis. lui envoyai un message auquel il répondit une photo du bâtiment devant lequel il trainait. Je le reconnu et m'y rendit en silence.
Arrivé, je ne vis qu'un petit être recroquevillé sur lui-même, sans manteau, assis sur un lit de feuilles mortes. Sa montre semblait chère et nous avions les mêmes chaussures. Devant sa figure affaiblie, je me demandais si j'allais parvenir à lui offrir du poison, puis tourner les talons.
Je vis son visage trempé, sa peau bronzée, ses yeux rougies et ses lèvres d'où s'échappait un soupir d'exhaustion dissimulé derrière un sourire en forme de cœur.
Je m'assis à coté de lui, préparai sa session fumette, et lorsqu'il pris sa première inspiration, je lui avais demandé comment il allait.
J'ai fait l'erreur de lui demander comment il allait, puis rien ni personne ne nous sépara.
Rien ni personne, à part sa maladie.

Je vivais de ces commandes chuchotées, de ce réseau secret et de peintures anonymes.
Je vivais de ça, et les rumeurs étaient mon homosexualité.
Rien que ça.

Ma démission n'excusait rien, Yoongi avait tous les droits de vouloir ma mort. J'avais tous les droits de ne rien faire face à ça.

Dans l'aéroport, quelques heures avant le vol, la tête noyée, j'espérais que l'avion s'écrase.

⌈ switching ⌋ ᵀᴬᴱᴳᴵOù les histoires vivent. Découvrez maintenant