Chapitre 4

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Le mercredi matin, Alexandre eut l'heureuse surprise de voir qu'un simple pansement avait remplacé le bandage sur le poignet droit d'Ellis. Il hocha la tête pour lui-même. Tant mieux si la plaie guérissait bien. Il se sentait toujours froissé par le comportement de sa camarde vis-à-vis de sa blessure, et était content qu'elle se résorbe rapidement. Il se retint difficilement de ne pas lui faire remarquer devant tout le groupe, mais savait bien qu'elle n'apprécierait pas du tout. La sonnerie le délivra de son impatience.

- Ça évolue comment, ton histoire ? lui demanda-t-il au premier intercours, alors qu'ils quittaient la salle d'espagnol devant le reste du groupe.

- Bien. Je t'avais dit de ne pas t'en faire. Elle est toujours aussi propre et devrait finir de se refermer rapidement. La croûte est stable malgré sa finesse, je serais guérie d'ici la fin de la semaine, vraiment, ne te bile pas pour ça.

Alexandre sourit à l'exaspération d'Ellis. Elle ne changerait pas. Il se perdit un temps dans ses pensées.

- Tiens au fait, ça me revient, tu ne t'es pas éclipsée, hier !

- En effet. Pourquoi ? s'étonna Ellis.

- Non, comme ça.

Sa camarade le regarda en plissant les yeux mais n'insista pas. Cela arrangea Alexandre qui ne tenait pas spécialement à préciser qu'il tenait le compte de ces jours où elle ne quittait pas les cours de façon intempestive. Ils posèrent leurs sacs devant la salle de français, rejoints par la bande.

- Yes, l'envie d'aller en cours est clairement présente, ironisa Antoine en grimaçant.

- Et encore, c'est un euphémisme, renchérit Nicolas.

La moue de tous se changea en éclats de rires, l'ambiance remonta rapidement. C'était une blague propre au groupe que de plaisanter sur les figures de style, depuis la fiche récapitulative de leur enseignant en début d'année. Ils enchaînèrent les plaisanteries jusqu'à ce que le professeur passe la tête par la porte pour signaler aux élèves d'entrer, coupant la bande dans son élan rieur. La classe s'installa et le cours débuta.

Le cours se termina avec une impression générale de soulagement de la part des élèves. La classe se déversa dans le couloir. Avec la récréation, la bonne humeur revint. Le groupe s'éloigna dans un couloir en direction de l'anglais qui suivrait.

- Je ne sais pas comment elle fait, avec son autorisation de quitter les cours comme ça, pour ne pas sécher. Parce que le français, qu'est-ce que c'est long ... râla Benoît.

Il n'eut pas besoin de préciser qu'il parlait d'Ellis pour se faire comprendre de ses amis. Le silence lui répondit. Alexandre regarda autour de lui, cherchant Ellis qui aurait dû réagir. Elle n'était pas là.

- Tu lui demanderas, finit-il par dire.

Alexandre avait pris l'habitude de voir Ellis se joindre à eux et avait presque oublié que la jeune fille restait très indépendante, et que souvent personne ne savait où elle était. Elle avait passé la plupart de l'année seule. Elle parlait à tout le monde, s'entendait avec tout le monde mais n'avait pas d'attache affective. Alexandre aimait à se considérer comme son ami mais il n'avait aucune idée de la façon dont la jeune fille envisageait leur relation. Certes, il était notable qu'elle traînait de plus en plus avec lui et sa bande mais pour autant, cela voulait-il dire qu'elle les considérait comme des copains ? Alexandre dut bien s'avouer que la réponse était très incertaine.

Le cours d'anglais fut marqué par cette cruciale réflexion. Alexandre observait du coin de l'œil Ellis, assise à côté de lui, en essayant de déterminer comment elle voyait leur rapprochement. Elle lui retourna quelques regards, qui lui firent songer qu'il n'était pas tout à fait aussi discret qu'il l'avait pensé en début de cours, et que du coup, le professeur avait peut-être remarqué qu'il était moins attentif que d'ordinaire. Ce qui ne l'empêcha pas de poursuivre sa réflexion en contemplant Ellis à la dérobée.

EllisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant