Chapitre 10

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Alexandre se jeta sur son lit. Il était heureux mais épuisé. Sa soirée avec son père venait de s'achever, il était tard, il avait froid. Ce qui ne l'empêchait pas d'être ravi de ce moment partagé avec son père. Nonobstant l'énergie que lui conférait sa bonne humeur, sa fatigue le poussa à se mettre en pyjama au plus vite. Il expédia le brossage de dents et revint à sa chambre.

Dans un premier temps, trop exténué, il ne remarqua pas l'ombre derrière la fenêtre. Quand elle fit un mouvement, Alexandre leva la tête, alerte. La silhouette tapa doucement au carreau. Doucement mais urgemment. Yeux écarquillés, Alexandre s'avança et ouvrit le battant à Ellis. Qui d'autre qu'elle ?

Sa camarade de classe se coula prestement à l'intérieur. Elle avait l'air paniqué, ce qui était tout à fait inédit. Même lorsqu'elle avait débarqué avec son hémorragie abdominale, elle avait un air plus calme et plus serein que désormais. Elle tira les rideaux sans demander son avis à Alexandre, puis éteignit la lumière, toujours sans le concerter. Quand la pièce fut au plus sombre seulement elle souffla un peu.

- Merci, glissa-t-elle à un Alexandre hébété.

Le jeune homme n'avait pas esquissé un geste, comme profondément enraciné depuis qu'Ellis était passée à l'intérieur. Il l'observa, persuadé d'être repassé dans un monde parallèle. Deux temps hors du temps, qui ne voulaient rien dire dans la continuité des événements de sa vie ... Oui, telle devait être l'explication.

Dans l'obscurité profonde de la pièce, Ellis remonta un peu son haut et examina son bandage. Il était rouge sang, entièrement imbibé. Avec une grimace, elle commença à le défaire.

- Tu aurais des bandages pour moi je te prie ?

Alexandre partit à la salle de bain presque automatiquement et rapporta le sac à pharmacie sans croiser ses parents.

- Je vais avoir besoin de refaire ces points de suture, annonça-t-elle à voix basse. Ils n'ont pas tenu le coup. Quelle surprise.

Elle lui prit le sac des mains en le remerciant et chercha tout ce dont elle aurait l'usage. Elle trouva et sortit certaines choses, dont, derechef, le nécessaire à couture. Elle s'assit par terre et refit son pansement taille extra large. Puis elle rangea le matériel utilisé. Elle se leva. Ce fut l'élément déclencheur. Il se secoua, réagit enfin.

- Qu'est-ce que, commença-t-il, perdu.

- J'ai eu la mauvaise idée de ressortir ce soir. J'étais guettée. Ils m'ont vite repéré, je ne cherchais pas à être discrète en plus -quelle erreur, je ne suis pas en terrain conquis, jamais, nulle part- et puis ils m'ont prise en chasse. Sauf que me faire traquer, avec ma plaie, c'est un peu mission impossible. Je suis sincèrement désolée, dans la panique je réfléchissais à disparaître mais je vais certainement les attirer chez toi. Si c'est le cas ...

- Attends, stop, tu m'as perdu au début là, l'interrompit Alexandre.

- Tu as lu le feuillet ? questionna-t-elle.

- Ton roman ? Oui. Quel rapport ?

Elle le fixa longuement. Il semblait à Alexandre qu'elle clignait rapidement, comme attendant qu'il ajoute quelque chose, mais avec l'obscurité le jeune homme n'était pas sûr de lui.

- Non, tu ne saisis pas ? le relança-t-elle.

- Tout ce que j'ai saisi, c'est que tu as une imagination débordante. Mais pour ta gouverne, le quantique, c'est juste le mot qu'on utilise quand on ne souhaite pas s'embêter avec des explications scientifiques plausibles donc complexes. Mais c'est une excellente théorie du complot, exposa-t-il.

EllisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant