Martin se dirige à son tour vers la sortie en grommelant qu'il avait bien besoin qu'elle se mette en mode casse pied... Mais, il s'arrête net, se traitant de «gros con» tout seul. Un passant lui montre la direction qu'une femme en tenue militaire a pris peu de temps avant, vers le village.
Malgré son dos, il se dépêche. Il trouve Nikita assise à la terrasse d'un petit restaurant. Elle discute avec une femme en dévorant un gâteau au chocolat. Elle le voit, son regard se ferme, l'autre femme se lève et s'éloigne.
- excuses moi, fait il en s'asseyant.
- OK tu es excusé, va t en prendre ton avion...
- quoi? Non!
- si, si, tu t'en vas...
- Nikita, qu'est ce que tu fais?
- je viens de te demander de partir et je le répète, j'ai pas envie de crier comme toutes tes précédentes nanas ont du le faire, va t en, laisse moi tranquille...
- j'ai réagi comme un con... voila, y a pas de quoi en faire 3 tonnes, je te demande pardon...
- non, tranche t elle d'une voix ferme, ce n'est pas comme ça que ça va se passer... ce n'est pas parce que je suis enceinte de toi que tu peux me dégager et revenir en me demandant de ne pas te faire chier à en faire trois tonnes en étant sur que ça passera..
- ce n'est pas ce que...
- en fait, c'est même tout le contraire...
- oui, je comprends, ne crois pas...
- va t en avec ton temps si précieux...
Il croise les bras.
- tu es en train de me quitter, alors?
- voilà...
- je ne suis pas d'accord...
- je n'ai jamais eu d'homme près de moi pendant que je portais mes enfants et je viens de comprendre qu'au final je préfère ça... vraiment... plutôt que de vivre en ayant peur de me faire jeter, en me disant, «ohlala j'espère qu'il va pas en avoir marre», «j'espère qu'il va rester»...
- je ne vais pas te jeter, je n'en ai pas marre, je veux rester... je t'aime... je parlais de temps pour gérer... ben mes fantômes.. à moi à présent...
- ah oui? Ne me parles pas de fantômes... ils n'ont jamais été une excuse pour que je te parle de la sorte ou que je te plante comme ça... je n'ai pas de courage pour une engueulade débile... va prendre ton putain d'avion... moi, je reste ici...
- effectivement, et je me suis excusé pour ça, finalement je comprends que tu ne me fais toujours pas confiance, tu n'as pas confiance dans les sentiments que j'ai pour toi...
- je... c'est un luxe que je peux pas me permettre... ils vont naître ces bébés... et il faudra bien que je m'en occupe pendant que tu auras besoin de temps!! et si je suis brisée... je n'y arriverai pas...
Elle tremble de tous ses membres alors qu'il voit avec terreur se réaliser la prédiction d'Alvilde au début de leur relation.
Il approche sa chaise d'elle en se traitant intérieurement de tous les noms.
- tu ne seras pas seule... ni pour cette grossesse, ni pour accoucher, ni pour les élever... tu ne seras pas seule... jamais plus... je ne suis pas là pour une obscure raison de culpabilité ou de devoir assumer ton état, je suis là et je ne pars pas parce que je suis malade de t'avoir fait du mal, parce que je t'aime , je tiens à toi plus qu'à ma vie...
Il prend une profonde inspiration et d'une voix morte lui raconte:
- quand j'étais dans leur camp de merde... j'ai retiré mon alliance, je l'ai enterrée dans un coin de ma... cellule et j'ai gravé... en grattant le mur avec mes ongles et un petit bâton, un petit dessin qui voulait représenter l'église de Lillesand, l'église où on s'est mariés... parce que je pensais pas survivre longtemps à ce qu'ils me faisaient... et que ce petit morceau de métal... c'était tout ce qui me restait de toi... et que je ne voulais pas qu'ils y touchent, qu'ils salissent mon amour pour toi... ensuite le soir, quand ils en avaient fini avec moi, je regardais ce mur... je pensais à notre bonheur ce jour là et puis, je me disais que si tu venais là, que j'étais... mort, tu verrais peut être ce petit dessin de rien du tout et que si tu retrouvais mon alliance, tu comprendrais à quel point je t'aimais... à quel point je t'aime...
Elle se jette dans ses bras en larmes. Il la serre fort contre lui en pleurant aussi.
- pardon... min kjærlighet, je t'en supplie... pardonne moi...
- tu... vas pas partir alors? parce que du temps... moi, j'en ai pas... chaque minute, chaque heure, chaque jour, ils grandissent en moi... tu comprends? ils ont rien demandé... je vais devoir... faire en sorte qu'ils aient une belle vie... j'ai pas le choix... avec ou sans un homme près de moi...
- voilà... je ne suis qu'un pauvre con... soupire t il, qui sait pas comment être si faible et en même temps, un homme...
Elle le dévisage intensément.
- un «homme», ça peut pas être faible, ou traumatisé ou blessé, alors?
- j'ai l'impression que tu as besoin d'un bonhomme qui tient le coup... pas un qui est les trois à la fois...
- tu te trompes... murmure t elle, tu te trompes complètement, c'est juste de toi que j'ai besoin... juste toi... même l'ombre de toi... tu comprends?
- ben voilà, je me sens exactement comme ça, l'ombre de moi même...
- il va te falloir du temps pour aller mieux, ça, tu as raison, mais... tu crois pas que ce temps serait plus doux si on le passe ensemble...
- si ... tu as raison... mais comment tu vas faire? Pour être forte pour 2? pour 4?
- ben tu vois, là, j'y arrive pas... et alors? on pleure comme deux cons, voilà tout...
Il rit doucement à travers ses larmes. Elle lui sèche les larmes d'une caresse, il fait pareil.
- aller, min kjærlighet il faut retourner à l'avion...
- non, sourit elle, en se mordillant la lèvre, là, il me faut un câlin, un câlin à la mode italienne...
Il esquisse un petit sourire triste.
- je ne crois pas... pouvoir faire ça... je sens déjà mes coutures qui coulent...
Alarmée, elle regarde son dos.
- TU SAIGNES!!!
- ben oui, j'ai couru...
- tu as raison, retournons vite à l'avion...
Elle le tire par la main en direction de leur appareil. Il doit prendre sur lui car chaque pas est une torture.
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ENCEINTE DE TOI M.A.P.L.V. tome 2
Romancela suite... ils se sont trouvés... maintenant, il faut tenir le coup... s'aimer assez fort.