Chapitre 7

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Il mit plusieurs heures à trouver un hôpital, le plus grand de la région. Mais avant d'y entrer, il avait prit le temps de se calmer, à l'abri des regards, de paraître tout à fait sain, et d'oublier un peu sa blessure pour reprendre des couleurs.

Puis il s'engouffra dans ce lieu immaculé, quatre murs qui hantaient ses rêves. Les blouses blanches des médecins, la peinture blanche des murs, jusqu'à la couleur des bandages et les visages trop blêmes lui rappelaient des souvenirs qu'il aurait préféré oublier. Il avait trop cotôyé cette odeur d'anesthésiant, de maladie, tout l'oppressait et il fallait bien ce genre d'urgence pour qu'il rentre de son plein gré dans ce genre d'établissement.

Il se faufila entre les mourants et les malades pour atteindre un étage qui lui paraissait être le bon. En plein milieu du deuxième étage, se trouvait un chariot rempli de médicaments, d'aiguilles et de serviettes stérilisées. Il lança un rapide regard circulaire. Le couloir était vide. Il s'approcha à allure normale du chariot, comme s'il cherchait une chambre, vérifia une deuxième fois qu'on ne le surprendrait pas, et s'accroupit pour chercher ce dont il avait besoin : un peu de désinfectant, un bandage, une aiguille et du fil, et un peu d'anti douleur. Puis il se releva et s'enfuit comme un brigand.

"Hep, hep, hep, qu'est-ce que tu fais là, petit voleur ?"

On lui avait attrapé le bras avant qu'il n'ait pu descendre l'escalier, et malgré le coup sec qu'il avait donné pour se libérer, il se trouvait toujours prisonnier.

Il tourna la tête pour protester, mais s'interrompit immédiatement. Le médecin qui l'avait rattrapé n'était autre que celui qui l'avait soigné. Il jurait entre ses dents. Pourquoi avait-il fallu qu'il tombe exactement sur lui ?

"Lâchez-moi ou je crie, rétorqua-t-il menaçant.

-Réponds-moi ou je hurle au voleur, répliqua le médecin, malicieux."

Le jeune homme fit une moue, jetant des regards dans le couloir, inquiet, mais il ne répondit pas. L'homme soupira, comme lassé, et continua :

"Pourquoi ne veux-tu pas qu'on t'aide ? Que s'est-il passé ? Sois franc. Je ne peux pas te laisser dans la rue sans rien faire.

-Je ne suis pas à la rue, tout va bien. Vous allez me lâcher à la fin ! Je n'ai aucun compte à vous rendre, c'est vous qui avez tenu à me soigner.

-Justement, peut-être un peu de reconnaissance serait la bienvenue... soupira-t-il. Passons, donne-moi au moins ton nom, s'il te plaît."

Son interlocuteur ne répondit pas, et tira un peu plus sur son bras pour pouvoir partir. Le médecin lui expliqua qu'il ne le laisserait pas tranquille tant qu'il n'aurait pas de réponse, et le menaça encore une fois de le dénoncer, mais rien n'y fit. Il ne voulait pas répondre.

Une infirmière sortit à ce moment-là de l'une des chambres.

"Anna, tu peux venir voir deux minutes ? Je voudrais que tu m'aides avec ce jeune homme, appela le médecin, sans même hausser la voix."

Le garçon prit peur en entendant ces mots. Il comprit que ce qu'il lui avait dit n'était pas qu'une menace. Il tira un peu plus fort sur son bras. Il ne fallait pas qu'il y ait encore des obstacles. Il ne pouvait plus se le permettre. Le temps allait manquer... Mais comme le médecin ne desserrait pas son emprise, il plia.

"Ok, d'accord, c'est bon, je vais vous répondre... Mais ne dites rien, s'il vous plaît..."

L'exécution de la menace se rapprochait avec l'infirmière, que le médecin ne congédiait pas. Il se prit à le détester encore un peu plus. Ce médecin n'avait jamais voulu avoir des réponses, il voulait le coincer, c'était tout. Il s'agita un peu, alors qu'elle arrivait à leur hauteur.

"Tu veux bien aller chercher quelques petites compresses pour lui. Il a une vilaine blessure.

-Tout de suite, Gérard, lui répondit-elle avec un grand sourire avant de faire demi-tour."

Le jeune homme, surpris, s'arrêta immédiatement de tirer, et détailla l'infirmière qui venait de repartir. Puis, il s'énerva de plus belle.

"Vous ne me ferez pas retourner dans un lit !

-Vas-tu te calmer un jour ? lui répondit-il en lui posant une main sur l'épaule. Les compresses n'étaient qu'un prétexte. Je ne cherche qu'à t'aider. J'ai bien compris que tu ne voulais pas rester scotché à un lit. Très bien. Je n'ai aucun moyen de te retenir. J'aimerais juste savoir, et c'est la moindre des politesses, qui tu es, ce que tu fais ici, et comment tu as atterri dans cette ville avec cette blessure. Si tu savais tous les scénarios que je me fais en pensant à toi. Moi, je te ramènerais bien à la police si tu ne me laisses pas le choix."

Le jeune homme sonda son regard, méfiant, et réfléchissant. Avant qu'il n'ouvre la bouche, l'infirmière reparut avec ce qu'on lui avait demandé. Le médecin la remercia, et reposa les yeux sur son interlocuteur, patient, mais toujours ferme.

"D'accord... soupira le blessé, vaincu. Je m'appelle Peter.

-Tu as quel âge ?"

Le jeune homme lui lança un regard noir. Une réponse ne lui suffisait donc pas ?

"Je ne vais pas vous raconter ma vie ! Je ne vous connais pas !

-Moi non plus je ne te connais pas. Et pourtant, on a partagé presque un mois ensemble. Tu ne trouves pas ça étrange. Même pas un merci à celle qui t'as sauvé, ni même pour les cinq cent euros qui ont mystérieusement disparu. Quel âge as-tu ?

-Dix-huit ans."

Le médecin parut surpris de la réponse, mais l'accepta.

"Que fais-tu ici ?

-C'est pas fini l'interrogatoire ?

-Tu le préfères au commissariat peut-être ?

-Je... me suis perdu, grommela-t-il, agacé.

-C'est pour ça que tu restes dans la région ? Bref, écourta-t-il en voyant qu'il s'agitait de nouveau. Comment t'es-tu fais ça ? A qui as-tu cherché des problèmes ?

-Je n'ai rien cherché du tout ! Mais laissez-moi tranquille à la fin ! Vous savez qui je suis, vous avez ce que vous voulez, maintenant laissez-moi partir, termina-t-il d'un ton autoritaire.

-Je n'ai que ton prénom, je ne vais pas aller très loin avec ça... Que t'es-t-il arrivé ? demanda-t-il de nouveau, très inquiet, s'asseyant sur les marches, lui lâchant le bras. Tu sais qu'il existe... comment dire ça... si tu subis des...

-Je ne suis pas un pauvre gamin sans défense, l'interrompit-il, exaspéré. Ca va, il ne s'est rien passé de grave. Maintenant laissez-moi tranquille."

Peter partit en courant sans pas même un au revoir qui arracha un dernier soupir au médecin.

"Rien de grave... tu t'es pris un coup de couteau dans l'abdomen quand même... répondit-il pour lui-même encore assis alors que le jeune adulte disparaissait dans les escaliers. Et tu fuis, sans arrêt..."

Parce que je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant