Chapitre 11

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Après cette courte pause, la nuit même, Peter reprit ses recherches. Et il commença par l'adresse d'Alexandre Tripaud. Il la trouva facilement grâce aux pages jaunes en ligne. En plus, il n'y avait pas d'homonymes !

En voyant l'adresse, Peter roula des yeux et soupira. Celui qu'il recherchait habitait Neuilly-sur-Seine, sûrement dans un bel appartement sur deux étages et toutes les luxures qui allaient avec. Dégoûté, peut-être un peu jaloux, il prit un papier et un crayon pour la noter. Il irait le lendemain.

Il ouvrit un nouvel onglet privé. Le médecin qui lui offrait gracieusement un toit inspirait confiance, et il était vraiment adorable, mais le jeune homme se méfiait de tout le monde, même de son ombre. Surtout par les temps qui couraient, et compte-tenu de ce qu'il recherchait. Cette fois pour tout autre chose.

Comme il ne savait pas si le propriétaire avait une deuxième clé de sa chambre, il préférait chercher un stratagème pour savoir si quelqu'un était entré en son absence. Il ne laisserait rien d'important dans la chambre pendant quelques jours. Il ne voulait vraiment pas risquer que le médecin découvrît tout de cette manière là, et pour savoir s'il pouvait lui faire confiance, il voulait s'assurer qu'il ne rentrait pas dans sa chambre. Sur internet, il trouva une technique avec une mine de critérium. En la positionnant entre la porte et ses gonds, la mine serait presque invisible et casserait si quelqu'un entrait puis sortait de la chambre sans la retirer d'où elle était. Il trouva l'idée ingénieuse et la reprit.

Le réveil sur la table de chevet indiquait une heure et demie. C'était bien l'heure de se coucher et de se reposer. Il aurait une longue journée le lendemain.

Le matin, il se réveilla de bonne heure. Il n'avait pas beaucoup dormi mais son esprit n'était pas fatigué. De toute manière, il était tendu. Il avait une chance de le retrouver, et cet espoir était plus fort que toutes les souffrances qu'il pouvait avoir.

Il croisa le médecin qui se préparait aussi pour commencer son service à l'hôpital. Ils dejeunèrent ensemble. Ils parlèrent de choses banales, Peter ne mentionna pas son activité de la journée et Gérard ne posa même pas la question.

Ils se séparèrent à sept heures du matin.

Peter se rendit en transport - cette fois en règle - jusqu'à Neuilly-sur-Seine. Il ne prenait pas le temps de s'extasier face à la richesse des bâtiments ; il courait presque.

Il se perdit, deux fois. Mais il finit par trouver l'immeuble, un beau bâtiment au milieu d'autres. Il roula des yeux en contemplant la façade, mais avant qu'il ait pu exprimer un quelconque sentiment, quelqu'un ouvrit la porte principale et il en profita pour se faufiler à l'intérieur.

Il chercha le nom de Tripaud sur les boîtes aux lettres, puis sur les portes. Il s'orienta assez vite, frappa à la bonne porte.

Un homme à la cravate rouge et au veston bleu noble lui ouvrit. Il était en train de mettre son écharpe. Il le regarda de haut, dévisageant cet adolescent qui venait le déranger jusque devant chez lui.

Peter eut un sourire qu'il ne put contrôler. Il avança à l'intérieur pour le faire reculer, et le poussa du plat de la main.

"Alors, tu te souviens de moi ? Dit-il se retenant de le frapper pour le moment."

L'autre, agacé, allait le repousser à l'extérieur quand ce gamin lui rappela effectivement quelque chose. Il eut un sourire en coin, moqueur.

"Qu'est-ce qu'il y a morveux ? Les grands travaillent tu sais, et j'allais partir."

Il le poussa de la main pour le faire sortir et refermer sa porte. Mais Peter ne se laissa pas faire et le frappa au ventre. Son adversaire toussa, surpris. Il parut considérablement énervé.

"Où est-il ? lança Peter, cette fois ne contenant plus sa colère.

-De qui parles-tu ? Répondit l'homme, avec mauvaise foi et un grand sourire.

-Tu sais très bien de qui je parle."

Peter s'était retenu de hurler. Il serrait les dents, et le poing. L'autre l'avait vu, mais il n'eut pas peur. Il le prit plutôt par le col pour le dissuader de faire quoi que ce soit, et le faire un peu reculer.

"Eh morveux, tu comptes faire quoi là ? Je t'ai déglingué déjà une fois. Ne me dis pas que tu veux que je recommence. J'ai été assez gentil comme ça pour ne pas t'achever."

Un sourire malsain courait sur le visage du propriétaire. Sans réfléchir, l'adolescent balança son pied entre les jambes de son agresseur qui lâcha son emprise, se pliant sur lui-même. Il grommela des injures avant de se jeter sur Peter, hors de lui.

"Où est-il ? répéta Peter, en hurlant cette fois."

Il n'eut pas de réponse, ou seulement celle de la violence.

La bagarre entre les deux individus ne passa pas inaperçue chez les voisins. Les coups pleuvaient sur l'un puis sur l'autre, parfois s'éclataient contre un mur. Quelquefois des cris vainement retenus.

La porte d'entrée était restée ouverte. Ils se battaient dans le vestibule. Et lorsque la console en marbre fut renversée, le bruit sourd parcourut tout le couloir.

Après un moment, et beaucoup d'efforts, Peter réussit à prendre le dessus, s'assit sur son adversaire et continua de le frapper.

"Où est-il ? cria-t-il, en appuyant sur chaque mot, entre deux coups de poing."

Mais l'autre ne répondait pas, il se défendait, et avant qu'il ait pu se dégager, Peter attrapa près de lui un ouvre-lettre, tombé avec la console. Il se prépara à le planter dans le corps de son agresseur, enragé.

"Posez votre arme, mettez les mains en l'air !"

La voix d'autorité fit s'interrompre les deux belligérants, interloqués. Un groupe de policiers était posté devant la porte, l'un d'eux pointant son revolver sur Peter.

Alexandre, qui tenait l'adolescent par le col, pour l'empêcher de trop s'approcher de lui, considéra la scène. Il était la victime, qui ne faisait que se défendre contre un gamin complètement fou qui cherchait à attenter à sa vie. Il eut du mal à retenir un sourire, et il arrêta net de faire quoi que ce soit. Ce ne serait pas lui qui serait en faute. Il lâcha même le col de son adversaire et leva ses mains en signe d'innocence.

Les deux avaient le visage défoncé par les coups, leurs vêtements étaient déchirés et tachés par le sang de l'un et de l'autre.

Les forces de l'ordre répétèrent leur injonction, à l'égard de Peter, qui, ébaubi, était comme figé dans son mouvement, l'ouvre-lettre toujours à la main.

L'information finit par arriver jusqu'à son esprit et, tout en continuant de dévisager le groupe de policiers, il posa doucement son arme. Il s'efforçait de tourner les mots dans sa tête pour leur expliquer la situation. Il eut un regard sur Alexandre, en-dessous de lui. La très mauvaise et inopportune situation...

"Mais, c'est lui qui m'a attaqué !"

Personne ne daigna lui répondre et, lorsque l'arme fut à terre, trois hommes se jetèrent sur lui pour le plaquer au mur et lui mettre les menottes. Cette action eut pour effet de faire taire l'adolescent. Il s'énervait en silence, tentait de ne pas paniquer en constatant que ses poignets étaient bel et bien attachés. On lui indiqua qu'il était en garde-à-vue, et on lui énonça ses droits.

Pendant ce temps, d'autres hommes de l'ordre aidaient Alexandre à se relever, on lui demanda comment il allait et on lui proposa d'aller au commissariat pour voir un médecin et lui permettre d'expliquer ce qu'il s'était passé. Il accepta.

Les deux voitures de police qui étaient arrivées toute sirène hurlante, reprirent le même chemin en sens inverse, pour se rendre au commissariat.

Parce que je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant