Chapitre 4

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São Rafael se réveillait paisiblement sous le chant de quelques oiseaux et de différents coqs aux divers coins du village. Ils semblaient se répondre les uns aux autres dans une compétition acharnée et quotidienne.

Jack ouvrit les yeux difficilement. Il avait terriblement chaud, souffrait de l'estomac et de la tête. Encore une de ces soirées trop arrosées dont il éprouvait de plus en plus de difficulté à s'en remettre. Il aimerait posséder un antidote ou un remède miracle qui lui permettrait de quitter sur le champ cet état vaseux et déprimant.

Il attrapa son téléphone portable afin de vérifier l'heure. Il affichait 10h25 en ce dimanche 4 avril 2013.

Jack, comme trop souvent lors de ces lendemains alcoolisés, pensait, allongé encore dans son lit, à la mort. Il émettait différents scénarios possibles correspondants à ses attentes ou espérances après cette ultime échéance. Il se posait alors une infinité de questions existentielles. Il n'y avait absolument aucune connotation religieuse dans ses réflexions malgré son éducation catholique mais non pratiquante. Sa foi ne lui permettait pas de visualiser un paradis ou un enfer avec cette sélection draconienne entre les âmes pures et les âmes impures.

- «Mais qu'y a t-il après tout ça? Notre âme s'éteint elle à tout jamais ou persiste t' elle consciente quelque part au fin fond de l'univers?

Pourquoi notre passage sur terre est il si bref finalement? A t-on réellement un destin, un fil conducteur ou un rôle à tenir dans une vie parfois remplie d'obstacles, de leçons, de messages, de bonheur et de malheur?

Après tout, cela ne peut pas se terminer d'un coup subitement puis plus rien. Le néant, le noir complet et l'obscurité à tout jamais»

Ces réflexions l'effrayaient et l'attristaient profondément. Dans ces moments-là, sa femme et sa fille lui manquaient à un point difficilement supportable. Ses choix personnels et autres décisions continuaient de le hanter.

En effet, Jeanne suite à un divorce douloureux il y a maintenant près d'un an, retourna avec leur fille dans le sud de la France près de ses racines et de ses proches. Les infidélités répétées de Jack, lors de soirées de plus en plus fréquentes et incontrôlables, les avaient clairement poussées toutes les deux vers la porte de sortie.

Paula, alors âgée de dix ans, en voulait terriblement à son père. Il avait brisé une famille proche et solide afin d'assouvir des pulsions de pervers alcoolisé mal dans sa peau. C'est ainsi qu'elle qualifiait l'attitude de son père et sa souffrance rejoignait celle de sa mère, toutes deux inconsolables.

Se fut une véritable et difficile épreuve pour Paula qui dû s'adapter à une nouvelle vie, culture, langue et autres amis. Mais elle pouvait compter sur l'amour de sa mère et toutes deux s'appuyaient, s'entraidaient dans ces moments éprouvants.

Cette relation était admirée et de plus en plus jalousée par Jack. 

Il leur versait une coquette somme, bien supérieure à celle requise par l'avocat adverse afin de sécuriser et garantir une vie confortable à ses princesses comme il les appelait autrefois.

Il avait également pris la peine de financer, en partie, l'appartement tant recherché par son ex femme sans dresser volontairement d'obstacles à la réalisation de ses futurs projets. Il s'estimait suffisamment fautif et coupable. De puissants remords le rongeaient un peu plus chaque jour. Il respectait profondément sa famille malgré la distance.

Il finit par se lever péniblement, titubant sur les premiers mètres. Les effets de l'alcool étaient encore bien présents.

Il jeta un coup d'œil par la fenêtre de la salle de bains et aperçut quelques berlines allemandes puissantes encore stationnées dans sa gigantesque allée. Il en déduit que certains de ses confrères, certainement autant déboussolés que lui, étaient encore présents dans son gigantesque palace.

Il entendait déjà les diverses femmes de chambre, mises à rude épreuve, afin de tout remettre en ordre et en état. Il oubliait et se trompait systématiquement dans le prénom de chacune de ces 20 domestiques à son service.

Il se brossa en priorité les dents, écœuré par une bouche collante, à la salive épaisse et pâteuse. Reposant sa brosse à dent dans un coin du lavabo, il sentit une douleur provenant de son bras droit, plus exactement d'une veine au niveau de son avant bras. Elle était encore particulièrement rougie et grossie par une injection faite quelques heures auparavant. Lui et un groupe d'amis, également médecins, s'injectaient par intraveineuse des doses, à priori contrôlées, de stupéfiants et d'alcool pur. 

En effet, il se procurait avec une facilité déconcertante certains stupéfiants à l'hôpital par le biais de relations interprofessionnelles. Si tout cela s'ébruitait, l'opinion publique s'ébranlerait. Le corps médical simulait bien souvent des chutes et autres accidents d'ampoules de stupéfiants,  le tout représentant des quantités non négligeables. Une simple attestation sur l'honneur était alors requise à la personne responsable de l'accident en question.

Il s'assit sur le bord du lit et porta ses mains sur son visage puis dans ses cheveux. Il pensait déjà à sa permanence du soir qui l'attendait à partir de 20 heures.

«T'as intérêt à te requinquer mon pote» se dit-il.

Café, aspirine, paracétamol, jus d'orange, eau gazéifiée et même une petite sieste étaient au programme pour attaquer sereinement et efficacement cette longue nuit de travail. Mais il ne se doutait pas alors, à cet instant, des événements qui l'attendaient.  Il risquait fortement de ne pas s'en remettre.

Dr PerkinsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant