Chapitre 13

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Les semaines et les mois passaient et Jack s'enfonçait dans une profonde phase de désocialisation handicapante à plusieurs niveaux et points de vue. Les factures s'amassaient. De puissantes phobies grandissaient en lui comme un cancer à l'échappatoire incertaine et inconnue.

Il se cloîtrait chez lui. Il ne donnait aucune importance aux différents courriers de divers organismes sociaux vantant le bien fondé de formations qualifiantes idéales à une reconversion professionnelle.

- «Je suis né pour être médecin, je ne sais rien faire d'autre et surtout je ne dispose ni du désir ni de la volonté de vouloir faire autre chose»

Ce sont les arguments qu'il répondait systématiquement à ses différents interlocuteurs.

En cet fin d'après midi, l'ex docteur reçut la visite de son meilleur ami qui n'était autre qu'un chirurgien argentin opérant dans le sud du pays à une centaine de kilomètres de là.

Gêné et embarrassé par le vide total et inhabituel de son réfrigérateur, il se rendit à l'épicerie du village laissant son ami inquiet seul sur le canapé poussiéreux.

Esteban se leva et regarda tout autour de lui. Il ne reconnaissait plus cette superbe maison. Cet amer constat confirmait que son ami de longue date avait besoin d'une aide plutôt urgente.

Il remarqua rapidement la pile de courriers recommandés jetés en vrac sur l'énorme table du salon. Ces lettres portaient, pour la plupart, l'inscription en caractères gras ou en couleur «DERNIER AVERTISSEMENT» ou «DERNIER RECOURS».

Des bouteilles de bière et de whisky étaient répandues partout dans l'énorme séjour, abandonnées tels des trophées ingrats mettant en évidence un mal être profond et grandissant.

Jack arriva avec son dernier bolide à l'épicerie. Le voyant orangé réclamant désespérément du carburant était allumé depuis trop longtemps. La mécanique ne tarderait pas à s'arrêter et l'échéance de la dépanneuse était imminente.

«Je prendrai mon vélo» pensait Jack alors.

Il connaissait bien Maria la gérante depuis plusieurs années de cette charmante épicerie familiale. Il avait énormément de considération pour cette quadragénaire élevant seule ses trois enfants. Elle était en pole position des personnes les mieux informées concernant les différents ragots et rumeurs circulant dans le village

Il était habitué, bien modestement et fidèlement, à faire ses achats hebdomadaires chez elle malgré le surplus de prix appliqués aux produits par rapport aux puissants hypermarchés. Il achetait systématiquement, avec fierté, la bière nationale. Il admirait la médaille d'or collée au sommet de la bouteille vantant les 16 victoires d'une bière remarquable et délicieuse. 16 fois médaille d'or lors de concours internationaux de bières blondes.

Quand Jack pénétra dans l'épicerie, il s'immobilisa de stupeur en tombant nez à nez avec madame Ricardo, accompagnée de son vieux panier en osier. Il était sur le point de se désintégrer sous le poids du sachet de pommes de terre qu'il contenait.

- «Madame Ricardo comment allez-vous? Vous êtes de retour dans la région?»

Jack releva immédiatement le côté surprenant de son interrogation. Une incompréhension légitime apparut sur le visage de la dame.

- «Bonjour Docteur. Que voulez vous dire?»

En retrait, Maria, fidèle à elle même, se rapprochait progressivement afin de ne rien rater de cette discussion.

- «Monsieur Spinoza est venu se présenter à mon domicile de lui même. Il m'a alors confié qu'il était le nouveau propriétaire de votre maison. Un homme charmant et mystérieux à la fois»

Dr PerkinsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant