101 - Un goût amer

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L'approche furtive avait quelque chose d'excitant.
C'était un peu comme une traque, dont Algalle était le prédateur.
Localiser, s'approcher, observer, le tout sans se faire voir. C'était tellement grisant.
Elle se demanda si cette excitation était en lien avec les capacités de son démon, ses sens aiguisés et son physique de loup en faisant un parfait prédateur. 
A cet instant, elle se sentait en osmose avec lui, leurs attentions réciproques tournées vers un même objectif. Il ne formait alors qu'un seul et même être.
Mais cette euphorie fut de courte durée.
Algalle fit signe à Kankurô de s'arrêter et s'accroupit derrière un arbre.
Elle chassa la nostalgie de ce moment d'union, et huma l'air, l'odeur de fumée était forte. Kankurô contourna l'arbre puis lui adressa un regard interrogateur.

_ « Je sens aucune présence. »_ renseigna Ashitako.

Algalle trouva son démon bien prudent.

– Apparemment personne, souffla t'elle.

Kankurô hocha la tête et s'avança le premier. Algalle le regarda au travers des buissons, alors qu'il faisait le tour de ce qui semblait être un petit campement. Elle hésita puis s'approcha à son tour.

– C'est encore tiède, fit Kankurô en tendant sa main au dessus du foyer d'un feu. Ils sont partis récemment.

Algalle hocha la tête puis balaya les alentours du regard. Tout cela ressemblait bien trop à un piège. Un piège dans lequel elle les avait menée...
Elle regardait le sol quand elle remarqua un étrange détail : deux cercles d'herbes couchés.
Ashitako grogna.

_ « Il y a au moins deux types camouflés ! »_

– « Un piège ? »


_ « Vu qu'ils sont à terre, je dirais plus que vous les avez surprit. En tout cas, ce sont des ninjas, ils savent se camoufler. »_

Algalle continua à regarder autour d'elle pour ne pas éveiller les soupçons et, discrètement, elle se rapprocha de Kankurô.

– C'est le moment... souffla t'elle.

– Quoi ?

Algalle grimaça face au ton trop fort du garçon.

– Il faut agir...

D'un mouvement d'yeux, elle indiqua la direction des deux camouflés. Kankurô fronça les sourcils.

– Je comprends pas, qu'est-ce que tu racontes ?

_ « Mais quel idiot ! Il est plus lent d'esprit que son frère, Gaara les aurait déjà réduit en sorbet ! »_ enragea Ashitako.

Algalle réprimanda un soupire et soutint le regard de Kankurô. Aussi discrètement que possible, elle fit le chiffre deux avec ses doigts puis ré-indiqua la direction avec ses yeux. Une lueur de compréhension envahit alors le regard du garçon.

_ « C'est pas trop tôt ! Balayes moi ces nazes qui prennent racines ! »_ s'exclama le démon.

Algalle composa de rapides signes avant de pivoter et d'envoyer une rafale de vent vers les deux intrus. Son attaque ne fut pas aussi forte qu'elle l'aurait voulu mais elle fut efficace. Pris de court, les inconnus perdirent leur camouflage et Kankurô passa aussitôt à l'attaque.
Algalle le regardait user de sa marionnette quand une longue aiguille se planta dans son épaule.

_ « Hé, je viens juste de terminer de la soigner !! »_ s'indigna Ashitako.

Algalle grimaça et s'empressa de retirer l'arme de sa chair. Son démon s'occupait de refermer la blessure tandis qu'elle tentait de localiser son ennemi.
Il était rapide, bondissant d'arbres au sol sans qu'elle parvienne à anticiper ses trajectoires. Soudain une pluie d'aiguilles jaillit des arbres pour s'abattre sur Algalle. Aussitôt un des pantins de Kankurô se plaça au dessus du Passeur et intercepta les armes dans une série de bruits sourds.
Quand il se retira, Algalle vit que le ninja de Suna avait défait son adversaire. Il ne restait plus que le très rapide armé de mille et un aiguilles.

– Il est rapide, pesta le garçon. J'arrive à peine à le voir.

– Pareil, soupira Algalle. Il arrête pas de bouger mais ses tirs sont précis.

Elle sauta sur le côté pour esquiver de nouvelles aiguilles. Kankurô tenta de lancer une de ses marionnettes tandis que l'autre restait en protection, mais ses attaques étaient trop lentes. Il était clairement désavantagé sur ce terrain boisé.

– Faut qu'on batte en retrait, pesta Kankurô. J'arrive à rien ici, il nous faut un endroit plus découvert.

– D'accord, on fait comment ?

– Je vais l'occuper, puis on court.

Algalle hésita, ça lui semblait bancale comme plan, mais déjà le garçon lançait ses deux marionnettes en rempart avant de s'élancer dans les bois.
Algalle dérapa en voulant partir trop vite puis le rattrapa sans problème.

_ « Nous voilà en lapin maintenant !! »_ gronda Ashitako mécontent.

– Faut retourner à découvert.

_ « Il vous suit de près ! »_

Algalle ne répondit pas et se concentra sur sa course, elle ne voulait pas semer Kankurô mais encore moins s'embroncher et tomber bêtement.
Soudain l'air se fit plus frais, moins emplit des odeurs de la forêt. La jeune fille s'en étonna puis ralentit sa course.

– Faut qu'on atteigne la prairie, fit Kankurô en la dépassant.

« On avait autant avancé dans la forêt ? » demanda Algalle en pensée.

_ « Aucune idée, puis vous avez détallés sans considérer la direction à prendre. »_

Ça sonnait comme un reproche mais surtout Algalle fut prise d'un mauvais pressentiment. Les odeurs ne correspondaient plus à ce qu'elle voyait. Des fragrances florales et de grands airs, alors que les arbres étaient toujours aussi denses. Algalle remarqua alors qu'ils avaient un étrange air de ressemblance : ils se répétaient à l'infinie.
La panique agita la jeune fille, il y avait trop d'air...
Soudain elle comprit : une illusion.
Ils étaient prit dans une illusion !

– Stop !

Kankurô s'arrêta aussitôt et elle manqua lui rentrer dedans.

– C'est une illusion ! Tout autour de nous, ça n'existe pas !

D'un même geste, Algalle et Kankurô rompirent le sort. Le Passeur hoqueta en voyant qu'ils se trouvaient en haut d'une falaise. Encore quelques mètres et c'était la chute assurée.

– Merde... souffla Kankurô en reculant.

Le vent tourbillonnant agitait leurs vêtements.

_ « Une chance que vous soyez pas tombés... »_

Algalle ne put qu'acquiescer les paroles de son démon puis elle fit volte-face pour se remettre face à la forêt. Leur poursuivant n'avait sans doute pas arrêté sa course.

– Tu le vois ? Demanda Kankurô tout bas.

– Non, mais je le sens. Il est là...

Soudain des aiguilles fusèrent à nouveau. Ils bondirent chacun de leur côté pour les éviter, elles étaient fines et aiguisées et les tirs d'une grande précision.
Kankurô se protégeait avec ses pantins tandis qu'Algalle usait de ses sens pour les esquiver, mais ils devaient se rendre à l'évidence : ils étaient prit entre les aiguilles et la falaise.

– On va pas pouvoir esquiver tout le temps, pesta Kankurô. Il nous faut un plan.

_ « Il est marrant lui, il a qu'à en trouver un ! »_  gronda Ashitako.

Algalle composa des signes et envoya une rafale de vent mais les aiguilles étaient trop fines et le tir trop puissant pour être impactés.
Kankurô tenta avec ses marionnettes mais hormis intercepter les aiguilles il n'avait pas à plus de résultats.

_ « Y a bien un moment où il n'aura plus d'aiguilles ! »_ enragea Ashitako.

Algalle acquiesça mais soudain l'ennemi passa à l'attaque. Il bondit en avant, repoussa violemment la jeune fille sur le côté avant de se jeter sur Kankurô, arme en main.

– Attention ! Cria Agalle en roulant à plat ventre.

Kankurô parvint à esquiver de justesse mais le ninja avait réussi à se glisser derrière la protection de ses marionnettes. Le garçon de Suna recula à nouveau, frôlant le précipice derrière lui. Algalle se releva et voulu charger mais déjà le ninja repartait vers la forêt. La jeune fille le suivit du regard alors qu'il se retournait dans les airs pour lancer une aiguille bien plus grosse que les autres. Algalle n'eut pas à esquiver car le tir ne lui était pas adressé ; il termina sa course dans la jambe de Kankurô qui tituba en arrière.
Il y eut un moment, suspendu dans le temps, où le garçon tenta de récupérer son équilibre puis il bascula en arrière.
Kankurô chuta dans le vide.

– Kankurô !!!!

Alarmée, Algalle bondit en avant. Elle puisa dans le chakra de son démon pour augmenter sa vitesse puis se jeta sur le rebord de la falaise. Dans un réflexe, ou par pur hasard, elle parvint à agripper le bras de Kankurô.
Ils échangèrent un regard incrédule mais alors une série d'aiguilles se plantèrent dans le dos d'Algalle. Elle serra les dents, étouffant un cri, mais refusa de lâcher prise. Du sang s'écoula de sa bouche et sous sa main agrippée au rebord, la pierre s'effrita.

– Lâches-moi, cria Kankurô. Je suis trop lourd pour toi !

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