Il arrive à tout homme de faillir, Sophocle.Après avoir poussé la porte de chez elle, tout en essayant de faire le moins de bruit possible, Illéa monta dans sa chambre et s'effondra. Cette soirée lui laissait un gout amer en bouche. Elle s'en voulait d'avoir était si faible face à Conrad. Comment avait-t-elle pu le laisser lui parler comme cela ? Il ne l'avait pas touché, peut être grâce à l'arrivée d'Emerson, mais elle se sentait sale. L'entendre lui faire des reproches, la critiquer, la rabaisser, tout cela lui avait fait beaucoup de mal, surtout venant de la part de quelqu'un qu'elle considérait comme un ami.
Elle s'enferma dans la salle de bain, laissa glisser son corps contre la porte et resta assise à même le sol. Elle pleura. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pas versé de larmes qu'elles ne pouvaient même plus les contrôler. Elle plaqua sa main contre sa bouche afin d'éviter de faire du bruit. Elle connaissait ces techniques là par cœur. Elle n'arrivait plus à respirer et les images tournaient en boucle dans sa tête.
Elle voulait mourir, chaque jour au moins une pensée suicidaire lui trottait dans l'esprit et aucun psy ne pourrait changer cela, c'était comme ça, elle se sentait mal et ce n'était pas près de changer. Ses démons la hantaient, ils l'empêchaient de vivre, la gardait prisonnière avec des chaînes invisibles qui lui faisaient de plus en plus mal.
Le lendemain, elle ne sortit presque pas de sa chambre et resta silencieuse toute la journée. Sa mère se força à ne pas s'inquiéter comme elle en avait l'habitude, elle savait qu'Illéa détestait cela. Elle se persuada alors que sa fille avait juste trop bu la veille et qu'elle était en train de décuver. Même si cette idée ne l'enchantait pas non plus.
Illéa n'arrivait plus à détourner son attention, ses pensées restaient bloquées. Même les maths n'y pouvaient rien.
Elle ressentait tellement de dégoût envers elle-même, et encore plus depuis cette scène. Mais c'était comme ça apparemment que la vie se déroulait de nos jours. Les garçons faisaient des choses horribles aux filles, et la plupart du temps n'étaient pas punis. Et les filles, elles, se sentaient sales et coupables jusqu'à la fin de leur vie.
Illéa souhaitait tellement faire bouger les choses, changer le monde, faire du bien autour d'elle. Quand elle était petite, elle rêvait de devenir présidente des Etats-Unis d'Amérique. Désormais, elle savait que cela n'arriverait jamais. Ils avaient brisé son enfance et balayé ses rêves et ses envies.
Le lendemain matin, elle n'alla pas au lycée. Sa mère commençait à réellement s'inquiéter, mais sa fille ne voulait rien lui dire, lui affirmant que tout allait bien, qu'elle était juste souffrante.
Ally et Judie tentèrent de la joindre un grand nombre de fois sans obtenir de réponses. Illéa ne leur avait même pas parlé de ce qu'il c'était passé, elle faisait comme toujours, s'enfermer dans sa bulle et ne parler à personne de ses problèmes, quel que soit leur gravité.
Ce jour-là, elle fit une très grosse crise de panique. Celle-ci la vida de toute son énergie. Comme toujours.
Illéa avait développer une très grande anxiété dès l'âge de ses 11 ans. Depuis, elle prenait généralement des calmants, afin de ne pas sombrer dans la folie de ses crises.C'était toujours le même schéma : un élément déclencheur, la foule ou bien une parole ou peut importe, ensuite, l'angoisse montait peu à peu dans son corps, elle s'emparait de chacun de ses membres, lui rongeait les entrailles, lui faisait tellement de mal. Un étau enserrait son cœur et le compressait de plus en plus fort. Ses poumons n'acceptaient plus l'air qu'on leur proposait. Elle se voyait mourir. Elle ne contrôlait ni ses pensées, ni son corps. Tout était hors de sa portée. Elle suffoquait et les larmes dévalaient son visage à toute vitesse. Cette impression horrible de disparaître, de mourir étouffée, elle la connaissait par cœur. Ces crises ont rythmé tout son collège et elles continuaient au lycée.
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Parallèles
Teen FictionParallèles : se dit de deux droites qui ne se rencontrent pas. C'est ce qu'ils étaient, deux droites parallèles entre elles. C'est aussi ce que Illéa avait tracé sur ses avants bras. Des droites parallèles, tracées à main levée , qui avaient failli...